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Cheikhou Oumar El Foutiyou : La vie du saint homme, « waliyou des waliyou »


Rédigé par leral.net le Mercredi 28 Juin 2017 à 15:52 commentaire(s)|

On reconnaît les grands historiens d’abord par leur volonté de connaitre et de garder les récits transmis ou écrits par des gardiens traditionnels du patrimoine culturel de leur environnement social.  Feu Amadou Tamimou Wane était le prototype des historiens fouineurs, curieux et perspicaces. Il a fait ses humanités auprès du Satigui Ciré Abbas, Baïla Birane Wane et tant d’autres érudits qui ont conservé jalousement leurs sources sûres de l’identité du Fouta sénégalais.
Dans les années 1960, il a sillonné le Fouta pour approcher, passez nous l’expression : «  Les gardiens du temple ». Tel Amadou Windou-Nodi, très versé dans la vie de Cheikh Oumar Tall, nous vous livrons la première partie intitulée : questions et réponses.

Q : M. Amadou Mamadou, vous êtes d’ici ?
R : Oui, je suis d’ici, du village de Windou-Nodi dont j’ai pris la terminologie de Amadou Windou-Nodi pour m’identifier.
Q : Est-ce l’histoire de Cheikh Oumar que vous voulez nous raconter ?
R : Oui, je connais l’histoire du Fouta, mais je m’identifie à celle de Cheikhou Oumar.
Q : Nous vous écoutons alors, commencez…
Après les chants épiques sur la généalogie de Cheikh Oumar Tall, chants qui constituent l’entrée en matière, Amadou Windou-Nodi entonna la version en ces termes : «  Cheikhou Oumar est né au village de Halwar dans la nuit de mercredi à jeudi. Cette nuit-là, le ciel fit entendre dans la région du Nord quatre grondements significatifs parce qu’annonçant chacun un fait événementiel sur cette naissance du grand Cheikh pour présager des faits sur les péripéties de sa vie.

Ainsi, le premier tonnerre disait  qu’il deviendra un  grand khalife de la Tijanya, par volonté même de Cheikh Ahmed Tijane, fondateur de la confrérie.
Le second tonnerre disait que la nuit de sa naissance est un signe de révélation qui atténuera les contestations sur l’apparition de la nouvelle lune du mois de Ramadan, évitant ainsi les prières à deux temps. 
Le troisième tonnerre faisait savoir à Elimane Saïdou et Sokhna Adama, parents du nouveau-né béni, que lorsque leur enfant grandira, il entreprendra le jihad (la guerre sainte).

Enfin, le quatrième tonnerre informait aux parents que leur nouveau-né n’était rien d’autre que l’incarnation de leur défunt enfant dévoré par les hyènes au moment où ils priaient tous les deux le Maghreb (timiss en wolof).
Au huitième jour de sa naissance, l’enfant fut baptisé. Plus tard, Cheikhou précéda Oumar, pas comme titre universitaire, honorifique ou circonstanciel, loin s’en faut. Les prénoms Cheikhou Oumar écrits en arabe se composent de cinq lettres en Cheikh et trois en Oumar. L’ensemble forme huit lettres. Chacune a sa définition particulière qui annonce différents dons de Dieu qui feront de lui un homme comblé. La définition des huit lettres que voici résume toute sa mission sur terre.

•     En guerre sainte, il a la faculté de tuer tout individu qui refuserait de se convertir à l’Islam.
•    Tout livre qu’il aura lu une fois, il le conservera en mémoire et pourra le reproduire textuellement sans en omettre une virgule.
•    C’est sa résignation totale sur les faits de Dieu.
•    Pendant 63 ans de sa mission divine, il ne fera au peuple que de bonnes recommandations sur l’Islam. Il lui sera loisible d’interdire toute chose en porte-à-faux avec l’Islam sans lever les armes.
•    Sa crainte absolue et sa soumission totale à Dieu dépassent celles de tous ses contemporains.
•    Il vivra plus de 70 ans, mais n’atteindra pas 80 ans, et sera érudit de plusieurs disciplines.
•    Il sera fortuné, baignera dans l’opulence et effectuera 160 combats de pacification.
•    Il sera couvert de la clémence et de la miséricorde divine.


« Codda Adama Aïssé » comme aiment l’appeler les poètes, c’est-à-dire le cadet de Adama Aïssé, est né et a grandi à Halwar où il apprit la théologie avant d’aller poursuivre ses études ailleurs. Imbu de toutes les sciences, il revient dans son village à l’âge de vingt ans pour y rester trois autres années au cours desquelles il construisit la zawiya de Halwar. Les habitants du saint village, ses propres parents, démolirent sa mosquée prétextant qu’il était précoce pour édifier la maison de Dieu.


Cheikhou Oumar alla se plaindre auprès de Alpha Amadou, son frère aîné, et ce dernier lui dit : « N’en fait point cas, cela n’a aucune importance. Je te conseille de garder ton sang-froid, s’il plaît à Dieu, tu auras à construire dans beaucoup de pays du monde d’innombrables grandes mosquées et zawiya qui feront date dans l’histoire de l’humanité ».

Suite à cette mésaventure qu’il encaissa grâce aux conseils du frère aîné, Cheikhou Oumar acheta une parcelle cultivable à un terrien de Halwar contre de l’or. Après la décrue des inondations annuelles, juste au moment où il s’apprêtait à cultiver son lougan, le terrien qui le lui avait vendu s’en empara et le cultiva pour lui-même. Le sage homme ayant perdu et son or et sa parcelle s’en alla se plaindre encore auprès de son frère et conseiller Alpha Amadou qui lui dit : « Abandonne cet or à cet homme injuste, Dieu te donnera beaucoup d’or et des terres à la place ».

A la quatrième année de son séjour à Halwar, Cheikhou Oumar Tall se résolut à effectuer un pèlerinage à la Mecque en passant par le Fouta-Djalon. 
C’est ainsi qu’à l’âge de 24 ans, il partit de Halwar un jour de mercredi, quelques heures après l’aube du mois appelé en arabe « Rabi’ou Lawal » de l’an 1241 de l’Hégire.
Il était accompagné de son petit frère Saliou Seydou dont il était le professeur. Il fit un long séjour au Fouta-Djalon auprès d’un marabout savant et sagace professeur qui lui apprit la science mystique. Ce même professeur décida d’effectuer le pèlerinage à la Mecque avec Cheikhou Oumar.

Mais, Cheikhou Oumar, bien que consentant, lui demanda de l’attendre pour faire ses adieux à ses parents. De retour au Fouta-Djalon, Oumar constata que son professeur est parti, car l’ayant longtemps attendu. Et Omar le suivit étape par étape. Arrivé à un certain village de son itinéraire, on lui annonçât le décès de son maître à la suite d’une fièvre. On lui présenta ses livres et d’autres objets qu’il avait laissé avant de mourir. Contrairement à la vérité populaire qui laisse croire que l’autorisation d’exercer le « wird tijane » lui provenait de Cheikh Mohammad El Ghaly, c’est bien le professeur foutanké du Djalon qui autorisa Cheikhou Oumar El Foutiyou à l’exercer et fit de lui le khalife de ladite secte sur toute l’Afrique noire. Par la suite, Cheikh Ahmed Tijane lui apparut en rêve aux dernières heures de sa vie. Cheikh Oumar recueilli les livres et les objets de son défunt maître et continua sa route jusqu’au royaume de Bornou, au Nigéria, où il trouva un souverain autoritaire, violent, injuste, régnant avec cruauté sans égale ni pitié envers les musulmans.

Ce monarque ayant appris l’arrivée du Cheikh le convoqua dans sa capitale. Il lui signifia de donner tout l’or dont il pourrait disposer. Cheikhou Oumar répondit à l’envoyé du souverain en ces termes : «  Vous direz à votre souverain que s’il plaît à Dieu, il n’aura pas mon or ; si également, c’est le contraire qui plaît à Dieu, je ne peux rien contre sa volonté ».


Récit de Amadou Windou-Nodi rapporté par    
Mamadou Amadou Tamimou WANE
Expert en communication, Pca Sspp « Le Soleil »

source:
lesoleil.sn