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Collusion Libérale (Par Pathé Mbodj)

Rédigé par leral.net le Vendredi 29 Septembre 2017 à 12:04 | | 0 commentaire(s)|

Me Abdoulaye Wade accentuera la pression sur le président Macky Sall pour élargir la brèche ouverte en direction du Parti démocratique sénégalais (Pds) et, plus généralement, de la classe politique invitée à un sempiternel dialogue réduit à un éternel monologue avec le Pds depuis le 28 mai 2016.


Collusion Libérale (Par Pathé Mbodj)
​Le Premier ministre, le 25 septembre à Massalikoul Jinan  : "Le chef de l’État souhaite longue vie au président Abdoulaye Wade",  et le leader de l'Alliance pour la République lui-même, à la veille de l'ouverture de la XIIIe législature, le 14 septembre, quand Macky Sall s'est félicité de la décision du secrétaire général national du Pds, de ne pas siéger au Parlement quand "le Sénégal et l'Afrique ont besoin de lui" avec lequel il devra "nécessairement parler", ont traduit des pourparlers parallèles quand tout semblait bloqué...et les signes subséquents de dégel dans d'autres secteurs sensibles, dont le patrimoine historique de l'opposant Abdoulaye Wade. et le soudain regret de l'emprisonnement de Khalifa Sall, maire de Dakar.

La déclaration de Me Wade, le 26 septembre, au cours du Comité directeur du Pds, et l'agenda politique 2018 étalé par Oumar Sarr de Dagana, sont le signe d'un dialogue diplomatique entre le pouvoir et le Pds, qui  se déroule loin de la place publique, ce qui explique les sautes d'humeur des alliés du pouvoir sans réel pouvoir.

Les frustrations nées de la mutualisation des efforts, malgré les libéralités du président de la République envers ses alliés, traduisent dans la réalité, la volonté de Macky Sall de retrouvailles libérales. Cela lui semble la seule solution pour se départir de l'encombrement du pouvoir et des risques d'implosion face au dépérissement des alliés en faveur de la formation au pouvoir. D'où la cour effrénée au Parti démocratique sénégalais et à Me Wade. 


Le Grand Soir
Le Grand Soir
Des Retrouvailles
... Entre Macky Sall
Et Le Pds
 
barrowUlcéré par des alliés en décrépitude incapables de s'entendre et préoccupé par les résultats décevants qui se multiplient, le président de la République veut se la jouer désormais libérale. Le Grand soir ne se fera pas avec la Gauche.
Pour une fois, Léonid Brejnev n'a pas trahi les autres membres du triumvirat, Alexis Kossyguine et  Nicolaï Podgorny : il a préféré l'or de Prague aux lambris dorées du palaisMamadou Ndoye "Mendoza", secrétaire général de la Ligue démocratique (Ld) recevait ainsi quatre millions de francs Cfa par mois qu'il reversait dans les caisses du parti au détriment du poste de ministre-conseiller à lui également proposé ; Mendoza parti et le poste de ministre-conseiller remis au goût du jour, le pactole a disparu,  même si certains prétendent qu'il n'a jamais servi la Ld. Ceci reste dans la longue logique des quotataires traditionnels, alliés de la dernière heure, souvent logés à l'immeuble des Eaux, recevant riz et subsides du pouvoir.
khalifa_sall_pensif
Ainsi s'expliquent partiellement les frustrations des alliés au pouvoir qui s'estiment payés pour faire de la figuration dans le casting du partage de responsabilités nationales, d'être avec le pouvoir mais sans pouvoir : une satellisation des formations autour du noyau central qu'est l'Alliance pour la République qui se renforce en absorbant les autres, tel Kronos de ses filsLa coalition a en effet ceci de particulier qu'elle est assise avant les élections du second tour avec l'appui au candidat de l'opposition le mieux placé (tout sauf) et ne garantit pas l'égalité de poids, contrairement à la cohabitation née des urnes, donc volonté populaire d'imposer un compagnonnage dans la dignité et l'égalité de responsabilités clairement définies ; l'opposition l'avait compris pendant la campagne pour les législatives du 30 juillet dernier, le pouvoir aussi.
 
La photo derrière Mackly Sall et  l'Apr réduit en effet le bassin électoral des formations regroupées autour du parti du président, même si la densité morale (l'idéologie) résiste à l'usure du temps et du pouvoir ; il reste quand même que le dépérissement des partis historiques suscite une révolution dans la mentalité d'un groupe de résistants qui invitent au retour aux fondamentaux. Les formations démocratiques anciennes comme le Parti socialiste et la Ligue démocratique en sont l'exemple le plus vivant, accessoirement l'Alliance des Forces de Progrès de Moustapha Niass dont le dissident (Malick Gakou) n'a malheureusement pas l'épaisseur d'un Khalifa Ababacar Sall, chez les socialistes, ou le besoin de rêve des doctrinaires du Grand soir de la Ligue démocratique Debout qui ont pris prétexte du gouvernement du 7 septembre pour apparaître au grand jour.
 
Affaiblis par les dissidences internes nées dès l'accession de Macky Sall au pouvoir, les formations coalisées avec l'Apr ont démontré leurs limites électorales avec une régression sans fin...sur fond de menaces à l'ordre public et les restrictions de plus en plus serrées des libertés civiles au niveau de l'ordre et de la sécurité publics. Le verdict des sociétés de défense des droits de l'homme est sans appel à ce propos, même s'il faut parfois relativiser les sentences des responsables de la Raddho, du Forum civil et autres Transparency.

Karim Wade

L'étude du front social de ces dix dernières années révèle une âme en deuil de son idéal devant un phénomène politique tournant autour d'un second mandat, à titre principal. Cette crise de langueur se manifeste par un réchauffement du front socio-économique avec des mobilisation tous azimuts autour de l'éducation, de la santé, des délestages, des inondations,... Sous diverses formes et en divers endroits du territoire national et même ultra-marin, des pans entiers des populations sénégalaises manifestent leur mal-vivre. Post-élections, après le second mandat surprise de Me Wade, ante, sous l'actuel pouvoir, ces activités démontrent une usure prématurée d'un pouvoir pourtant plébiscité sans aucun doute possible parce que perçu comme une bouée à l'abord. Avec, au finish, une anti-révolution à ce qui semble être un coup d’État institutionnel : 23 juin, sous les Libéraux de la première alternance, sous une forme encore hésitante avec l'attentat du 11 septembre 2017 avec l'affaire incroyable de la Caisse de Dépôt et de Consignations qui a vu le Sénégal vivre ce qu'il a combattu sous Me Wade : la dévolution déguisée du pouvoir de père en fils ou entre frères.  C'est que, après le baptême du feu de la crise malienne dès les élections de 2012, le président Macky Sall a pu jusqu'ici se sortir de la majorité des crises survenues à l'interne et dans l'environnement géographique immédiat du Sénégal : la Gambie, le Burkina Faso, l'amélioration sensible du secteur de l'énergie dans le vécu du quotidien des Sénégalais, le sauvetage du quantum horaire, dans le secteur de l'Éducation, ...
Moustapha Niass, le 23 juin 2011. Que celui qui n'a jamais péché lui jette la pierre.
Moustapha Niass, le 23 juin 2011. Que celui qui n'a jamais péché lui jette la pierre.
Moustapha Niass, le 23 juin 2011. Que celui qui n'a jamais péché lui jette la pierre.
Récapitulons. Sous Me Wade : mobilisation des imams de Guédiawaye, grève des internes des hôpitaux, manifestation des pêcheurs de Soumbédioune, manifestations de sinistrés de banlieues inondées, bras de fer entre techniciens du transport aérien et ministre de tutelle, mobilisation des populations de Sébikotane et de Mont Rolland contre l’enfouissement de déchets toxiques, les émeutes étudiantes de Kédougou, celles des marchands ambulants de Sandaga et la marche des femmes du Front Siggil Senegaal. Mais seulement après le second mandat, de novembre 2007 (pour les marchands de Sandaga), à décembre 2008 (Kédougou) et juillet de la même année pour les Aline Sitoe Diatta au Front. Avec un certain nombre de morts par la suite, notamment contre le 3ème mandat.
Aujourd'hui, en butte à un second mandat qui semble lui échapper, le président  Macky Sall est ulcéré par des alliés  incapables de s'entendre dans des formations sans prise réelle sur l'électorat ;  préoccupé par les résultats décevants qui se multiplient dans la coalition. Il semble donc vouloir désormais se la couler libérale.
 
Par Pathé Mbodj
Journaliste-sociologue