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Commissaire Cheikhna Keïta: “Le Colonel Ndaw est un héros”

Le colonel Abdoulaye Aziz Ndaw peut compter sur le soutien du commissaire Cheikhouna Keïta qui le considère comme un “héros”. Accroché, hier, au siège du M23, celui qui avait révélé l’affaire du trafic de drogue dans la Police livre, dans cet entretien accordé à EnQuête, son opinion sur le brûlot “Pour l’honneur de la gendarmerie sénégalaise” et s’explique sur sa nouvelle vie de militant du PDS.


Rédigé par leral.net le Dimanche 27 Juillet 2014 à 09:37 | | 0 commentaire(s)|

Commissaire Cheikhna Keïta: “Le Colonel Ndaw est un héros”
Comment analysez vous le tollé suscité par le livre du Colonel Abdoulaye Aziz Ndaw : “Pour l’honneur de la gendarmerie sénégalaise” ?

Il y a deux choses à retenir : le premier, c’est que le Colonel (Abdoulaye Aziz Ndaw), depuis qu’il a mis le document à la disposition du peuple sénégalais, est un héros. On doit le respecter. C’est un homme d’un certain rang, donc on ne doit pas le traiter avec la légèreté que je constate aujourd’hui. C’est une aubaine pour le Sénégal que de disposer d’informations de ce type-là pour marquer un temps d’arrêt et avant de rebondir sur un avenir plus radieux. C’est-à-dire corriger les erreurs et avancer.

L’Etat estime que le Colonel Ndaw a violé le droit de réserve. Partagez-vous cet avis ?

Nous considérons que c’est de la distraction. Ce qui nous intéresse, c’est le contenu de cet ouvrage. Pourquoi il (Aziz Ndaw) devait se taire ? Par rapport à quoi ? Par rapport à un système qui vous oblige à protéger les intérêts d’individus qui sont dans ce système-là ? Lui, (Aziz Ndaw) a choisi de défendre les intérêts du peuple. C’est pourquoi je le considère comme un héros.

Le colonel Ndaw a été rappelé au Sénégal par l’Etat alors que le Général Fall, qui fait l’objet de graves accusations, reste à son poste. Est-ce que la démarche vous paraît appropriée ?

Ça, c’est un problème d’Etat. Le Colonel Ndaw est un officier qui ouvre le champ d’un combat. L’Etat doit prendre la mesure de l’importance de ces informations et rassurer les populations sur la suite à donner à cette affaire. Cette suite ne doit être guidée que par l’intérêt national.

L’Etat doit appeler à l’essentiel, c’est- à-dire voir ce qui s’est passé. Quel tort on a causé au pays ? Quel bénéfice peut-on tirer de cette affaire pour régler tous les dossiers contenus dans ce livre ?

Pour vous, la solution, c’est l’ouverture d’une enquête ?

L’ouverture d’une enquête, c’est d’abord informer juste. Comme l’a dit l’autre, ça commence par tout le monde. On doit ouvrir, non pas une, mais des enquêtes pour savoir tout ce qui s’est passé ; ensuite mettre en œuvre la justice. Une enquête qui éclaire, ce n’est pas seulement une enquête judiciaire.

Mais d’abord, les autorités doivent rassurer les populations par rapport à la manière dont elles prennent cette affaire et le crédit qu’elles lui impriment.

Le groupe parlementaire Benno Bokk Yaakaar a exigé l’audition des personnes incriminées dont l’ancien président Abdoulaye Wade. Pensez-vous que cela va contribuer à l’éclatement de la vérité ?

Ce qui me dérange dans cette histoire, c’est le fait que Benno Bokk Yaakaar l’initie. Mais c’est une démarche tout à fait normale qui devait être une initiative gouvernementale. On a raté la première attitude, et c’est ce qui est à l’origine de tout ça.

Quelle devait être la première attitude ?

Les autorités devaient prendre cette affaire à bras le corps et mettre tout de suite une équipe qui aurait évacué tous ces problèmes. Au lieu d’attendre maintenant pour dire : “Tel devait faire ceci ; tel devait faire cela”. Cette équipe devait commencer depuis très longtemps et on aurait traité cette affaire avec beaucoup de sérénité comme dans les grandes démocraties.

Vous aviez en son temps attiré l’attention des autorités sur des pratiques peu orthodoxes dans la Police. Ce qui vous a valu une sanction disciplinaire. Est-ce qu’on peut dire que l’histoire vous a donné raison ?

Les journalistes me posent toujours cette question. Il n’y a pas d’histoire qui me donne raison. J’ai fait quelque chose sans rien attendre en retour. Je savais où mettre les pieds. J’étais un grand responsable dans ce pays qui luttait contre le trafic de drogue sur le plan national comme international.

Quand j’ai un dossier à élucider, je n’ai que le devoir de faire ce qu’il me revient de faire. Peu importe les conséquences. Je savais très bien la manière dont l’Etat fonctionne, et les intérêts croisés dès que le signal est donné. Mais je sacrifie quelque chose pour mon pays. Un point. Je me sens très à l’aise dans cette situation dans laquelle je me trouve aujourd’hui.

Vous avez décidé de vous engager en politique. Quelles en sont les raisons ?

Parce que tout simplement, je suis un citoyen sénégalais qui n’a pas plus de contrainte à faire de la politique. Servir son pays, c’est aussi faire de la politique. Investir mes valeurs, mon intelligence avec d’autres pour construire un avenir radieux.

Pourquoi le choix du PDS ? Est-ce qu’on ne peut pas vous soupçonner d’avoir été de mèche avec l’ancien régime ?

Non ! Le PDS, c’est juste un appareil politique. Je sais que le PDS, dans la situation actuelle, n’a rien à apprendre des autres. C’est l’appareil qui m’intéresse. Je ne suis ni derrière ni devant personne. J’ai décidé d’être un militant politique sénégalais qui a choisi de se mettre dans un appareil.

J’espère pouvoir, avec d’autres Sénégalais, changer le visage du PDS, lui donner une image beaucoup plus radieuse et respectable. C’est une mission que je me suis fixé. Si je n’y parviens pas, j’irai voir ailleurs parce que c’est le Sénégal qui m’intéresse.

EnQuête