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Crise Européenne : Quelles Leçons pour l’UMOA et la Grèce ? (Dr. Abdourahmane SARR)

Rédigé par leral.net le Jeudi 24 Mai 2012 à 21:26 | | 0 commentaire(s)|

Crise Européenne : Quelles Leçons pour l’UMOA et la Grèce ? (Dr. Abdourahmane SARR)
Nous sommes dans la même situation que la Grèce du point de vue des conséquences de notre arrangement monétaire sur nos économies et avons le même problème politique que les européens mais nous n’en parlons pas. Nous avons un ancrage sur l’euro et une faible croissance, nous ne sommes pas compétitifs, et peinons à mettre en œuvre des réformes structurelles à même d’améliorer notre compétitivité dans l’ensemble euro-dépendant dans lequel nous sommes. N’étant pas formellement dans l’euro, nous avons pu à une époque dévaluer notre monnaie, et nous avons eu la chance d’avoir nos dettes extérieures annulées pour la plupart grâce à l’initiative des pays pauvres très endettés. La volonté de maintenir une monnaie commune, le FCFA, nous avait en partie fait opter d’abord pour une austérité budgétaire pénible comme la Grèce suivie d’une dévaluation uniforme pour tous les pays de l’UMOA. Depuis, nous avons certes une stabilité macroéconomique que les grecques nous envieraient mais une pauvreté dont ils ne voudraient certainement pas. Pour préserver la stabilité macroéconomique acquise de haute lutte, un pays comme le Sénégal doit réduire son déficit budgétaire pour éviter que le niveau des dépenses publiques de ces dernières années sans croissance véritable ne nous amène à la situation que vit la Grèce aujourd’hui. De ce point de vue, les allemands ont peut-être raison de préconiser à leurs partenaires européens d’engager la discipline budgétaire car la croissance ne vient pas nécessairement de dépenses publiques plus importantes même lorsqu’on en améliore la composition.

Le maintien d’un ancrage sur l’euro porté par une Allemagne toujours plus compétitive continuera de coûter cher à tous ceux qui sont accrochés à cette locomotive sans en avoir les fondamentaux ou la capacité de les avoir assez vite. La Grèce est ainsi avertie par l’expérience de l’UMOA. En restant dans l’euro, l’ajustement sera très pénible et durable et l’inévitable arrivera, c'est-à-dire la restructuration de sa dette suivie d’une pauvreté relative prolongée et le décrochage de sa monnaie à terme. Autant avaler la pilule maintenant et changer de chemin si c’est ce tableau qui lui est réservé.

Ce dénouement inévitable pour la Grèce sera retardé le plus longtemps possible non pas parce que la Grèce est importante en elle-même vu son poids économique dans l’ensemble européen, mais parce que sa sortie donnerait des idées aux populations d’autres Etats beaucoup plus importants pour la construction européenne. La démocratie n’aide pas toujours les grands desseins des initiés.

Nous avons su préserver l’UMOA et avons choisi de continuer notre ancrage sur l’euro. Pourrons-nous continuer à maintenir notre union sans la caution de la France ou des institutions internationales qui de fait ont joué le rôle d’Etat central pour nous là où l’Europe n’arrive pas à concrétiser son projet politique fédéral? Quel rôle de pionnier pouvons-nous jouer dans la recherche de solutions au casse-tête européen ayant nous-mêmes le même problème? Avons-nous un projet fédéral et de décrochage véritable? Quel rôle pour notre banque centrale dans un tel projet? Nos élites sont interpellées.





Dr. Abdourahmane SARR, Président du Centre d’Etudes pour le Financement du Développement Local et du MRLD-Moom Sa Bopp/Mënël Sa Bopp