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Dialogue politique ou débat d'éthique ? - Par Nioxor Tine


Rédigé par leral.net le Samedi 21 Mai 2016 à 11:28 | | 0 commentaire(s)|

Dialogue politique ou débat d'éthique ? - Par Nioxor Tine
Après une course débridée de quatre années, de mars 2012 à mars 2015, durant lesquelles le pouvoir APR a foulé,aux pieds, les principes les plus élémentaires de coexistence politique pacifique, l’heure du réveil brutal semble avoir sonné.

Il y a d’abord eu un déficit patent de concertation au sein de la grande Coalition Benno BokkYakaar, que certains partis alliés, particulièrement la Ligue Démocratique, ont eu à déplorer plus d’une fois.

Faut-il rappeler que la première rencontre plénière des leaders s’est tenue 30 mois après l’accession au pouvoir de Benno BokkYakaar, en septembre 2012 ? Ce fut l’occasion, pour le président SALL, de réitérer son rejet de la Constitution proposée par la C.N.R.I et son intention de ne procéder qu’à des réformes institutionnelles partielles.

Sur un autre plan, le président avait déploré la dispersion des forces se réclamant de Benno BokkYakaar aux élections locales, lesquelles s’étaient tenues, quelques semaines plus tôt. Cela était dû, selon lui, à la non-structuration et au déficit de communication au sein de ladite coalition.

Depuis lors, le diagnostic du Président de la République sur sa Coalition est resté plus actuel et précis que jamais. Cette alliance politique n’a survécu à la terrible épreuve du référendum que par des artifices aussi contestables les uns que les autres.

De fait, certains partis de gauche,après avoir manifesté, sans ambages, leur désaccord avec le projet de réforme constitutionnelle du président de la République, ont dû faire, contre mauvaise fortune bon cœuret voter oui au référendum, pour éviter une fin de règne prématurée à leur allié, avec lequel, ils avaient choisi de lier leur destin. Cette rupture d’avec Benno BokkYakaar risquait d’être d’autant plus pénible, pour les amis fidèles du Président, que lesprochaines élections présidentielles avaient été reportées jusqu’en 2019, ce qui laissait augurer de trois longues années de « vaches maigres » !

Il fallait donc "sauver les meubles" et le président avec, car visiblement, il ne se rendait pas compte, qu’il courait droit vers une déroute référendaire mémorable, en raison de son refus d’accéder aux exigences de refondation institutionnelle du Peuple des Assises, auquel il devait, pourtant, sa station présidentielle.Le pire aura été évité de justesse, grâce à une corruption à grande échelle avec des achats de conscience massifs et une campagne très maladroite des libéraux et de leurs alliés.

L’analyse des résultats du scrutin référendaire montrait clairement, que la victoire électorale mitigée du camp présidentiel arrivait difficilement à masquer une défaite politique avérée avec seulement 25% des électeurs inscrits ayant approuvé le projet de réforme constitutionnelle.

Rien d’étonnant alors, qu’au lendemain de cette consultation référendaire, le président appelle au dialogue politique avec toutes les composantes de la Nation. A un an des élections législatives, la grande inconnue représentée par un taux d’abstention élevé, (sans oublier la défiance de la confrérie mouride) ressemblait, à s’y méprendre à une épée de Damoclès au-dessus des têtes des militants de l’APR et de leurs alliés !

Mais plus que de dialogue politique, ce dont le peuple sénégalais a actuellement besoin, c’est d’un débat éthique !

Si une grande Coalition unanimiste, telle que Benno BokkYakaar la symbolise à souhait est arrivée à une impasse politique, après quatre années de stratagèmes et d’entourloupes, ce n’est pas l’arrivée tardive d’invités libéraux, talibés invétérés du Pape du Sopi, éparpillés, discrédités et désorientés, qui va sauver ce regroupement de formations politiques, qui risque de perdre et son nom et encore un peu plus de son âme!

Comment mettre fin au phénomène honni de la transhumance et plus généralement comment bannir la corruption du champ politique ? Comment abolir définitivement le wax-waxeet de l’espace politique sénégalais ? Comment redonner à la politique ses lettres de noblesse en rétablissant les partis dans leurs véritables rôles de contre-pouvoirs et/ou de gestionnaires vertueux de la Cité, pour lesquels ils étaient initialement conçus ?

Ces interrogations à forte prégnance morale n’en sont pas moins des prérequis pour l’approfondissement de la démocratie dans notre pays. Mais cela, tout le monde le sait, depuis que les abus constatés lors du règne du parti démocratique sénégalais, ont conduit à la tenue des Assises Nationales du Sénégal et à la signature par la quasi-totalité des leaders de la Coalition présidentielle, y compris par le président MackySall lui-même, de la Charte de Gouvernance Démocratique.

La plupart des réponses à ces questions institutionnelles se trouvent dans l’avant-projet de Constitution proposé par la C.N.R.I et dont la Coalition Benno BokkYakaar n’a pas voulu, nous proposant, en lieu et place, des réformettes, trahissant ainsi l’esprit des Assises Nationales.

Devons-nous, comme le proposent YoonuAskan Wi, le RND/ tendance Dialo Diop, TaxawTemm… et d’autres de plus en plus nombreux, constituer un troisième pôlepolitique et imposer, lors des législatives de 2017, une cohabitation pour corriger les insuffisances des réformes du référendum ?

Certes oui !

Mais ce serait une erreur tragique, que de limiter le combat à de simples enjeux électoraux voire électoralistes, avec toutes les connotations péjoratives qu’ils drainent !

Nous devons garder, en mémoire, la présidentielle de février-mars 2012 et la récupération politique que le président Sall et ses amis ont fait de la belle victoire du peuple sur le régime de Wade.

Les principaux activistes du Mouvement du 23 juin, qui s’est disloqué en plusieurs sous-entités, ont été neutralisés.

C’est pourquoi, il s’agit de dire non à ce pseudo-dialogue politicien, qui n’est qu’une nouvelle "combinazzione" et initier des actions de mobilisation populaire et citoyenne, seule garante de changements authentiques et irréversibles.

Cela vaut mieux que de se nourrir d’illusions électoralistes, alors que – le référendum du 20 mars dernier vient de le confirmer- les modes de scrutin et les procédures de vote sont caractérisés par l’inéquité, la corruption et la manipulation !

NIOXOR TINE