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Diouma Dieng Diakhaté (Ambassadeur itinérant) : "Je suis entrée dans l’histoire du Sénégal..."

Styliste, ambassadrice de la mode depuis plus de trois décennies, Diouma Dieng Diakhaté a ajouté, depuis 2012, une nouvelle étoile dans son grade. Elle est, en effet, ambassadeur itinérant. Dans cet entretien qu’elle a accordé à Wal Fadjri, elle fait découvrir aux lecteurs les contours de sa mission auprès du président de la République, réfute les éventuelles collusions avec son activité professionnelle. En vrac, elle évoque sa candidature à la présidentielle de 2012, ses relations avec le couple présidentiel, avec les Premières dames africaines, le secret de son éternelle jeunesse…Tout y passe.


Rédigé par leral.net le Lundi 23 Février 2015 à 12:21 | | 0 commentaire(s)|

Diouma Dieng Diakhaté (Ambassadeur itinérant) : "Je suis entrée dans l’histoire du Sénégal..."
Wal Fadjri : Vous occupez aujourd’hui les fonctions d’ambassadeur itinérant auprès du président de la République. Dites-nous en quoi cela consiste ?

Diouma Dieng Diakhaté : C’est un rôle qui m’est déjà familier. Tout le monde sait que je suis une ambassadrice de la mode. Je profite de l’opportunité que m’offre votre journal pour remercier vivement Son Excellence, le président de la République, Macky Sall, de m’avoir nommée à ce prestigieux poste. D’autres auraient pu certainement me nommer. Mais, Dieu a voulu que ma nomination soit le fait de Macky Sall. Et mieux vaut tard que jamais. Aujourd’hui, cela fait 35 ans que je suis ambassadrice de la mode. Ce titre m’a permis de sillonner presque les trois quarts du monde entier. Ces voyages ont permis aux Européens, aux Américains, aux Asiatiques, de connaître davantage notre pays.

Est-ce que vous pouvez nous résumer vos journées auprès du président de la République ?


Je voyage souvent au nom du Président. Et parfois avec lui. Néanmoins, je voyage très souvent sur invitation pour mon propre compte mais toujours au nom du Sénégal. Parfois, je suis invitée par la diaspora où je préside de grands colloques qui réunissent des hommes et femmes d’affaires et d’autres personnalités importantes pour échanger sur des sujets qui peuvent intéresser le Sénégal. Je dois, d’ailleurs, me rendre en France du 1er au 4 avril pour répondre à nos compatriotes qui vivent dans ce pays pour passer avec eux la fête de l’Indépendance.

N’avez-vous pas l’impression d’empiéter sur les compétences des ambassadeurs classiques ?


Je ne le pense pas du tout. Car, eux sont des diplomates qui travaillent plutôt dans la diplomatie. Ce qui n’a rien à voir avec ce que moi je fais en tant qu’ambassadeur itinérant.

C’est de la diplomatie parallèle donc ?

(Enervée) Non, il ne faut pas l’interpréter comme ça. Je vous ai dit que tout ce que je fais en tant qu’ambassadeur itinérant, c’est juste pour promouvoir l’image de mon très cher Sénégal. Ce n’est nullement la même chose. Eux, c’est de la pure diplomatie qu’ils font pour l’Etat du Sénégal. C’est-à-dire au sens des relations entre les chefs d’Etat, entre les gouvernements. Encore une fois, mon véritable rôle consiste à faire aimer mon pays, le Sénégal, au reste du monde. Ce dont nous sommes capables. Aujourd’hui, dès que l’on parle de couture, on ne peut pas ne pas penser à Diouma Dieng. Rien que cela est important pour notre pays. Donc, cela peut quelque part impacter un secteur tel que le tourisme. Ces gens qui viennent chez nous pour le tourisme, peuvent être attirés par notre couture et être intéressés par notre artisanat. N’oubliez pas que nous avons l’un des villages artisanaux les plus importants en Afrique voire au monde. Ces gens qui viennent peuvent investir dans ce secteur.
«Mon véritable rôle consiste à faire aimer mon pays, le Sénégal, au reste du monde»

Vous êtes ambassadeur itinérant mais aussi patronne d’une maison de couture. N’y a-t-il pas risque de conflit d’intérêts en ce sens que vous pouvez aller à l’extérieur au nom de la République et en profiter pour vendre votre propre label ?

Il n’y a aucun risque puisque quand on m’invite pour faire un défilé de mode à l’étranger, je me prends entièrement en charge : billet d’avion, hôtel, restauration, déplacements, etc. Cela n’a rien à avoir avec la présidence de la République. Maintenant, si c’est la diaspora qui m’invite en tant qu’ambassadeur itinérant, là, je me réfère à la Présidence pour la prise en charge. Ce n’est pas tout le temps que la Présidence le fait. Si elle le fait, c’est bien. Si elle ne décaisse pas pour mon voyage, je le fais avec mes propres moyens sans problème. Et je vous assure que je ne suis jamais partie avec un seul de mes produits dans mes déplacements officiels. Je ne l’ai jamais fait. Quand je suis en voyage officiel, je ne vends jamais mes produits. Je ne le ferai jamais.

Quel est l’avantage d’être dans l’entourage du président de la République ?

(Rires) Là, vous me posez une question vraiment piège. Et j’avoue que je ne saurais vous le dire. En fait, il y a des avantages, certes. Mais, à mon niveau, vous savez que j’ai toujours eu et continue d’avoir le privilège de côtoyer des chefs d’Etat. Je suis tout le temps dans leur entourage. C’est toujours un plus d’être à côté d’un Président. Quand il s’agit d’une proximité avec le Président de votre propre pays, c’est encore mieux.

Au-delà du prestige, quel avantage matériel ou financier peut-on tirer de cette proximité avec le président de la République ?

(Longue hésitation) Bon, je pense que, avant, c’était peut-être possible de tirer profit de sa proximité avec un président de la République pour se remplir les poches. Avant, on sortait de la Présidence avec des mallettes d’argent. L’argent était distribué à tour de bras. Heureusement, ces moments-là sont aujourd’hui révolus. Aujourd’hui, tout est ordonné. A commencer par la baisse des salaires au niveau de la Présidence. Macky Sall a revu les salaires, les dotations à la baisse. Il a considérablement diminué les charges de la Présidence.

Avez-vous un salaire en tant qu’ambassadeur itinérant ?

(Elle hésite) J’ai un salaire que je ne veux pas divulguer ici. Mais, nous avons un salaire et je préfère vraiment le garder pour moi.
De toutes les façons, les salaires de la Présidence sont publics…
Je gagne un peu plus de 500 mille Cfa.

Quels sont vos avantages, en dehors du salaire ? Avez-vous un passeport diplomatique ?

Nous avons du carburant chaque fin du mois. Pour le passeport diplomatique, je l’ai obtenu depuis le temps de Senghor. Quand Abdou Diouf est arrivé au pouvoir, on me l’a renouvelé. Avec Me Wade, je lui ai adressé un courrier pour lui demander une reconduction de mon passeport. Pour la petite histoire, j’avais même, en son temps, relevé le numéro du bordereau que lui-même avait signé et envoyé aux Affaires étrangères. Dans le bordereau, en général, on retrouve une dizaine voire une vingtaine de personnes. Dans ce bordereau, il n’y avait que mon nom. Cela, c’est Abdoulaye Wade qui l’a fait.

Votre ami, le Président Macky Sall, est réputé avare. Et vous-même l’avez insinué.

(Elle coupe) Insinué comment ?
Vous avez parlé de la baisse de tous les avantages au niveau de la Présidence. Vous avez eu à pratiquer presque tous nos quatre présidents. Quel est celui qui est beaucoup plus agréable de travailler ?
Franchement, il me sera très difficile de faire un jugement entre ces différents Présidents. J’avoue que je n’ai travaillé ni avec Senghor, ni avec Abdou Diouf encore moins avec Abdoulaye Wade. Par contre, j’ai côtoyé Macky Sall. Je sais que c’est un homme bien. Il est posé ; il écoute beaucoup les gens ; il est calme. Toutes ces caractéristiques sont liées à la bonne éducation qu’il a eue certainement de ses parents. Macky Sall est un homme sincère. Il n’aime pas les détails. C’est pourquoi il me plait beaucoup.

Marième Faye Sall est-elle votre amie puisque vous êtes amie de beaucoup de Premières dames ?

(Elle hésite) Amie, c’est trop dire ! C’est ma Première dame. Je l’ai côtoyée. C’est une personne très simple. Ce qui me fascine chez elle, c’est que c’est une femme qui n’est pas renfermée, pas guindée. Elle est très ouverte. Cela est important pour nous Sénégalais.

Avez-vous un bureau à la Présidence ?

J’ai un bureau dans un immeuble qui n’est pas loin de la Présidence. Quand j’ai demandé un bureau au président de la République, au niveau de la Présidence, il m’a dit : «Hé, Diouma, tu n’es pas à la quête d’un bureau.» Il m’a dit que, pour rien au monde, je ne vais laisser mon bureau de Shalimar couture pour avoir un bureau ailleurs. Mais, aujourd’hui, j’ai bel et bien un bureau.

Un ambassadeur itinérant a-t-il besoin de bureau ?

Je pense qu’itinérant, c’est un mot qu’on emploie pour les déplacements. Itinérant veut dire un ambassadeur qu’on peut envoyer à Pékin ou ailleurs en mission. Il ne doit pas rester sur place.

Si vous ne restez pas sur place, avez-vous alors besoin d’un bureau ?

Bien sûr ! Quand vous êtes à côté du Président, dès qu’il vous appelle ou bien, dès qu’il y a une réunion, en deux minutes, vous êtes à la Présidence. En outre, les personnes que je reçois dans le cadre des audiences qui concernent la République, vous pensez que je les reçois à Shalimar couture ? Je les reçois dans mon bureau officiel, quand même !

Comment s’appelle votre parti ?

S’il vous plaît, n’insistez pas ! J’ai déjà déposé le dossier qu’il faut au ministère de l’Intérieur. Et j’attends de recevoir mon récépissé. Pour le moment, je ne saurais vous communiquer le nom que portera mon parti. Une fois que j’aurais mon récépissé en bonne et due forme, je vous assure que vous serez les premiers à être informés.

Vous avez quand même un projet de nom ?

Comment puis-je déposer un dossier sans le nom du parti ? Vous aussi, vous savez que nous sommes au Sénégal. Bougouma thiat djitouma (je crains le mauvais sort, Ndlr). Dès que le récépissé sort, c’est en grandes pompes et dans un hôtel que je vais célébrer cela. Parce que, c’est très important dans ma carrière politique. Les choses seront faites de manière grandiose. Parce que vous savez que je ne fais jamais les choses à moitié.

Vous étiez candidate à la dernière présidentielle. Quel rang aviez vous occupé encore ?

(Rires) Je pense que j’étais presque la dernière.

Presque la dernière ou la dernière ?

(Elle coupe) Franchement, je pense que je ne regrette rien dans ces élections-là. Car je les ai préparées en 48 heures seulement. Et je me suis retrouvée à cette position. Je pense que les autres n’ont pas été plus méritants que moi. Ceux-là qui étaient là depuis 30 voire 40 ans n’ont pas eu plus de mérite que moi.
Si on faisait le classement des quatorze candidats à l’élection présidentielle, vous seriez à la dernière place ? …
Je suis d’accord. Mais, calculez mes points au prorata de notre entrée en campagne. Même si je suis dernière, je pense que je suis quand même très méritante. Car je n’ai jamais fait de la politique. Donc, quand je me retrouve avec plus de trois mille voix pour une candidate qui n’a eu que deux jours de préparation, je pense que je n’ai pas démérité. Des gens qui ont commencé à faire la politique avant ma naissance n’ont eu que dix mille voix voire moins. Vous pensez qu’ils sont plus méritants que moi ? Vous aussi, tirez-moi un coup de chapeau.
«Les élections, je les ai préparées en 48 heures. Ceux-là qui étaient là depuis 30 voire 40 ans n’ont pas eu plus de mérite que moi»
On vous reproche de n’avoir limité votre campagne que dans votre ville natale de Rufisque…
J’ai fait tout Dakar et toutes les villes environnantes ainsi que beaucoup de régions. Plusieurs de mes déplacements ont été faits par avion. Une fois de plus, je suis très réconfortée par ce score tout en remerciant les Sénégalais qui ont voté pour moi. Vous oubliez qu’il y a eu des candidats qui ne sont même pas sortis de Dakar. Il y en a qui étaient à la Place de l’Indépendance, debout dans leur voiture. Moi, j’ai au moins casqué en allant avec tout mon staff dans les profondeurs du pays. Je suis entrée dans l’histoire du Sénégal. D’ailleurs, l’Histoire retiendra que je suis la première femme, au Sénégal, à présenter ma candidature et aller en campagne.

Aujourd’hui, malgré votre classement, vous êtes dans la proximité du Président. Là où d’autres comme Djibril Ngom, Mor Dieng, Ibrahima Fall, en sont exclus. A quoi devez-vous cela ?

Pourquoi utilisez-vous ces mots-là ? Je pense que ce n’est pas du tout gentil. Ces gens-là n’ont pas été exclus. Et je ne saurai vous dire pourquoi ils n’ont pas été récompensés par Macky Sall comme vous le dites.

Est-ce qu’on peut savoir le secret de votre éternelle jeunesse ?

Comment suis-je ? Je suis jeune ? Je suis belle ? Pourtant, quand je suis devant ma glace, je me sens vieille. C’est vous qui me trouvez peut-être jeune. Mais, moi, pas du tout. Je me vois vieille déjà. Vous me donnez quel âge ?
55 ans ? Pourtant, je suis plus âgée que cela.

Votre secret ?

C’est peut-être parce que je fais beaucoup de sport pour maintenir ma forme. Je mange bien mais je mange sain. Je ne me prive de rien. Ensuite, je fais de la natation. Depuis le bas âge, je fréquente les salles de gymnastique. Pour retarder la vieillesse, je pense qu’il est important de respecter deux choses : éviter le stress et les détails dans la vie. C’est-à-dire aller à l’essentiel ; ne pas perdre son temps sur des détails qui vous retardent. Je mange beaucoup et bien et je dors presque dix heures d’affilée par jour et je prie beaucoup puisque je crois beaucoup en Dieu. Je ne sous-estime personne. Je suis bien avec tout le monde. Tout ce qui m’arrive, je le mets sur le compte de la volonté divine.

Vous êtes bien avec tout le monde y compris avec les Premières dames. Aujourd’hui, pouvez-vous nous en citer quelques unes ?

La plupart sont des amies à moi.