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Discours d'une avocate internationale et d'autres réflexions pour l'avenir

Rédigé par leral.net le Samedi 23 Août 2014 à 12:35 | | 0 commentaire(s)|

Discours d'une avocate internationale et d'autres réflexions pour l'avenir

Dakar, le 16 novembre 2012

 
Son Excellence, Monsieur le Président de la République,
Madame la Directrice d’Intelligences Magazine,
Mesdames Messieurs les membres du panel,
Mesdames, Messieurs les invités
 
Je voudrais remercier Intelligences Magazine pour l’insigne honneur qui m’a été fait de m’avoir choisie afin de m’adresser à ce patrimoine fragile de la Nation, les élèves, étudiants, leaders de demain.
 
L’initiative d’Intelligences Magazine est à la fois pertinente, inédite et oh combien utile.
 
Le monde s’est durcit et les conditions d’épanouissement personnel aussi.
 
C’est pourquoi, il me plait aujourd’hui de vous faire face pour vous dire que quelque puisse être les difficultés, dites vous bien qu’autant ce faire peu le processus scolaire ne doit jamais être interrompu.
 
A chaque fois que je suis sollicitée afin d’échanger avec des plus jeunes pour leur parler d’avenir, c’est un mélange de sentiments aussi intenses que diffus qui m’habite.
 
Parce qu’il est évident que la question de son avenir touche le pan le plus sérieux de la vie de l’élève ou de l’étudiant.
 
Lorsqu’on parle d’avenir, on touche forcément à la précarité de la condition humaine mais Antoine De Saint Exupéry avait cette jolie phrase, il disait de l’avenir « qu’il ne s’agit pas de le prévoir mais de le rendre possible » ;
 
Je connais également l’anxiété qui habite chaque élève ou étudiant qui a cette impérieuse volonté de réussir.
 
Et me viennent des souvenirs qui se bousculent dans ma tête.
 
Il est vrai qu’au départ, j’avais cette volonté d’y arriver !!
 
Je ne dis pas cette volonté de réussir car justement lorsque j’évoque des sentiments diffus c’est parce que j’ai toujours été confrontée à ce dilemme : REUSSIR DANS LA VIE OU REUSSIR SA VIE ?
 
Et chaque branche de l’alternative constitue un vaste programme !!
 
Au départ, se poser les bonnes questions :
Qu’est ce que je veux, qu’est ce que je veux faire de ma vie, quels sont les moyens mis à ma disposition pour y arriver ?
 
Votre détermination, votre courage et votre motivation doivent être tels que tous les obstacles qui se présentent à vous seront surmontés. Vous êtes les premiers qui devez  comprendre que vous n’avez d’autres choix que celui de réussir.
 
Je vous y exhorte parce que c’est maintenant, au moment où vous êtes à la recherche du baccalauréat ou du diplôme universitaire que vous devez prendre conscience des exigences de la vie, et la vie est tellement exigeante!!!
 
C’est maintenant que vous devez vous rendre compte que lorsque vous aurez laissé passer toutes les occasions de réussite scolaire ou universitaire, vous arriverez bien diminué ou si vous voulez, bien démuni dans un monde du travail devenu très exigeant parce qu’étant habité par des déjà diplômés de toutes sortes que je surnomme gentiment les bacs+27.
 
Les obstacles sont innombrables, ils peuvent venir du milieu social, du milieu scolaire ou universitaire ou alors du milieu professionnel.
 
Et vous devez arriver dans le monde professionnel avec toutes vos armes au premier rang desquelles vos diplômes.
 
Il est vrai qu’en faisant l’effort de venir écouter nos encouragements vous manifestez aussi votre motivation.
 
La première fois que j’ai posée les pieds à l’amphithéâtre de droit de l’université Cheikh Anta DIOP, j’étais à la fois découragée et totalement démotivée, nous étions des milliers d’étudiants. C’était impressionnant !
 
Je voyais devant moi mon échec universitaire donc mon échec professionnel.
 
J’ai eu des moments de doute. Et quelqu’un m’a dit à ce moment que « celui qui a vaincu le doute et la crainte a vaincu l’insuccès »
 
Ça m’a boostée et je ne l’en remercierais jamais assez.
 
 Et j’ai vécu une scène que je n’ai bizarrement jamais oubliée.
 
J’avais rencontré au volant de sa voiture, dans l’enceinte de l’université, une grande sœur aujourd’hui décédée, elle terminait ses études de pharmacie.
 
« Mais que fais-tu ici m’a-t-elle demandé » ? « Je suis inscrite à la faculté de droit lui répondis-je bien fièrement ».
 
Mais tu es folle, sors rapidement d’ici, essaies de t’inscrire à l’étranger si tu veux réussir. Mes parents ne voudront jamais lui rétorquais-je.
Alors t’es foutu ma pauvre avait-elle conclu !
 
Bien malgré elle, elle venait de me donner le courage de vaincre !
 
Je ne serais pas honnête si je ne vous disais pas que la crainte des foudres du père ne m’a jamais quittée.
 
Il avait été très clair, l’échec ne m’était pas permis.
 
Je me souviendrais toujours du jour où je suis arrivée à son bureau en courant, j’avais réussi à mon examen, mais surtout j’avais obtenu la mention !!
 
Quelle mention m’avait-il demandé sévèrement par-dessus ses lunettes ?
 
Assez-bien Papa !
 
Là, tu me déçois avait-il rétorqué, se replongeant aussitôt dans ses dossiers.
 
J’avais pleuré toutes les larmes de mon corps en présence de ma maman désespérée.
 
Celle là, je n’ai jamais passé un examen sans qu’elle n’étale sa natte devant le centre d’examen attendant la fin des épreuves ! Elle me l’a fait jusqu’à l’année maitrise. Quelle honte devant mes camarades !
 
Mais face à mes bouderies elle avait invariablement toujours eu cette réponse qui fait sourire. Seulement maintenant l’espace est très grand pour accueillir toutes les mamans, qu’elles viennent encourager leur enfant comme je le fais.
 
La remercierais-je jamais assez celle là ?
 
Cette attitude de mon père m’avait au moins fait comprendre que je ne pouvais plus faire moins que cette mention « assez bien » tout le long de mon cursus universitaire.
 
L’autre phénomène que j’avais aussi remarqué pendant ces années d’université, c’est qu’un groupe de travail s’était auto constitué. Nous révisions ensemble et débattions toujours ensemble.
 
C’est ce même groupe qui s’est détaché du lot tout le long du processus universitaire et avec le recul, je me rends compte aujourd’hui que tout ceux qui ont voulu s’en sortir se sont mis ensemble spontanément, naturellement, et nous avions créé une saine émulation entre nous et avions surmonté ensemble toutes les barrières universitaires.
 
J’éprouve un immense plaisir de me trouver dans cette salle avec d’imminents membres de groupe de travail, Monsieur Makhtar CISSE, Directeur Général des Douanes du Sénégal et l’une des plus réputées notaire de ce pays, Maître Tamaro SEYDI
 
La maîtrise en poche (toujours avec cette petite mention assez-bien), je me suis rendue compte que n’avais fait que la moitié du chemin, mon père refusait toujours de me laisser aller perfectionner mes connaissances à l’étranger et cela me frustrait car j’avais une très grande soif d’apprendre.
 
Cependant je n’avais aucunement l’intention de me laisser refroidir.
 
Mais que m’offrait le Sénégal ?
 
Etre notaire ou magistrat ?? Je n’aimais pas l’idée d’avoir une tutelle.
 
 Avocat, ça correspondait avec l’idée que j’avais de la liberté.
 
Tout le monde a été catégorique lorsque j’ai parlé de mon projet, faut même pas essayer ce concours, il y a trop de candidats et bien peu d’élus me disait-on.
 
J’ai alors mis en œuvre un plan, me cacher de mon père  (de plus en plus exigeant sur mes résultats) et aller tenter ma chance à l’insu de ma famille.
 
Si j’échoue, il n’aura même su que j’avais tenté et si je réussis, ce sera  enfin une belle surprise pour lui et moi, et comme ça tout le monde est content.
 
Quelqu’un lui avait d’ailleurs vendu la mèche (vous savez comment ça se passe au Sénégal !!) mais j’ai persisté en niant avec force !!
 
J’ai fait toutes les épreuves en douce.
 
Et ce qui devait arriver, arriva et cette foi-là, je lui avais carrément cloué la bouche. J’avais non seulement réussi, mais j’étais major de toute la promotion.
 
Et c’est la première fois que je recevais de franches félicitations de sa part !!... Enfin !
 
Si je vous ai autant parlé de mon père (même s’il est vrai que je l’affectionne de manière démesurée), c’est pour vous dire et vous faire comprendre que j’ai eu un gendarme tout au long de mon cursus mais surtout je tiens à ajouter pour ce qui n’ont plus de père, de mère  ou qui n’ont pas d’encadreurs, j’ai eu un plus féroce soldat qui est celui dont je vous avais parlé plus haut : LA VOLONTE D’Y ARRIVER
 

C’est cette expérience que j’ai voulu partager avec vous, en vous demandant de compter  sur vous-même et pas seulement sur la chance… La chance, ce joli mot pour décrire la main que la vie vous tend de temps en temps.
 
Je vous remercie de votre attention.