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Guinée-Insolite: plus aucune trace d'une loi dument votée et promulguée

Rédigé par Alain Lolade le 18 Mars 2017 à 18:23

Votée et promulguée en 2010, la loi sur l'accès à l'information publique est introuvable dans les archives de la République. Pourtant, la société civile et la presse réclament son application.


Guinée-Insolite: plus aucune trace d'une loi dument votée et promulguée
La Cour constitutionnelle — qui veille sur la constitutionnalité des lois — a demandé des explications à Rabiatou Serah Diallo, l'ancienne présidente de la CNT ( Conseil National de la Transition), l'organe transitionnel qui a fait voter la loi sur l'accès à l'information publique en 2010. Et comme beaucoup d'autres acteurs de l'époque,

Serah Diallo, actuellement présidente du Conseil Economique et Social, se souvient que cette loi avait été effectivement promulguée le 24  novembre 2010 par le président de la transition d'alors, le général Sékouba Konaté. Pomulguée, mais pas encore publiée dans le Bulletin officiel, parce qu'en Guinée, contrairement à la plupart des pays s'étant inspirés du droit français, l'acte de promulgation par le chef de l'Etat est dissocié de celui de la publication effective dans le Bulletin officiel.

Mais, comme les  autres acteurs de l'époque, Diallo n'est pas en mesure de dire où se trouve exactement cette loi.

La question sur la loi sur l'accès à l'information publique a été soulevée par des acteurs de la société civile, notamment de la presse, qui se demandaient pourquoi celle-ci n'est pas applicable six ans après sa promulgation.

En réponse, Dr Sekou Koureissy Condé, secrétaire générale de la CNT à l'époque, a révélé courant cette semaine que cette loi est introuvable. "On n'arrive pas à retrouver même une copie de cette loi", a-t-il indiqué en conférence de presse. Ancien ministre de la Guinée et aujourd'hui président de l'African Crisis Group, Sekou Koureissy Condé indique que cette disparition n'est pas inédite en Guinée. "Cette situation crée du buzz parce qu'elle touche directement la presse. Sinon, il y a beaucoup de papiers officiels qu'on ne retrouve pas souvent", a dénoncé Sekou Koureissy Condé. "La question n'est pas qui a intérêt à ce qu'on ne retrouve pas cette loi. Mais, il faut savoir combien de lois ont disparu ?", a-t-il précisé.

En décembre 2016, la presse privée, mécontente de la rétention de l'information en Guinée, a voulu que les Guinéens soient au courant de l'existence d'une loi sur l'accès à l'information publique. "Nous sommes le pays où les dépositaires de la puissance publique où les élus locaux ne rendent jamais compte de leur gestion aux citoyens et aux journalistes",  dénonce Moussa Iboun Conté, président de l'Association des Editeurs de la Presse Indépendante (AGEPI).

Avec d'autres acteurs de la société civile, la presse a même formé une synergie pour vulgariser cette loi." Pourtant, cette loi vous permet d'ester en justice contre la personne qui refuse de vous donner l'information publique", explique Moussa Iboun Conté, qui est aussi Coordinateur de la Synergie de vulgarisation du texte.
 
Avec le temps, la Synergie s'est rendu compte que la loi dont elle faisait la promotion, n'était pas publiée au journal officiel de la République. Or, en Guinée, une loi n'est opposable aux tiers qu'après sa publication au journal officiel. "S'il y a des gens qui ne veulent pas que cette loi soit publiée, c'est parce qu'ils ne veulent pas rendre compte de leur gestion", s'insurge Moussa Iboun Conté.
 
Avant la Cour constitutionnelle, la Cour suprême avait été saisie sur l'application de cette loi. Des acteurs de la société civile avaient estimé que la loi avait été  "frauduleusement retirée du secrétariat général du gouvernement."

Le360Afrique