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Je ne suis pas « Charlie », mais « un Musulman de confession, et un Républicain, Démocrate Communiste d’obédience » !


Rédigé par leral.net le Lundi 12 Janvier 2015 à 22:10 | | 4 commentaire(s)|

Je ne suis pas « Charlie », mais « un Musulman de confession, et un Républicain, Démocrate Communiste d’obédience » !
La France, ce dimanche 11 janvier 2015, toutes confessions religieuses et toutes obédiences politiques confondues, avec une participation historique d’une cinquantaine de pays représentés au plus haut niveau, s’est puissamment mobilisées pour exprimer son indignation face aux tueries à « Charlie Hebdo » et à Montrouge, dont des journalistes, leurs invités, des policiers et des juifs ont été victimes.

La condamnation de ces tueries par le Hamas, et la participation du Président de l’Autorité Palestinienne et du Premier Ministre d’Israël, ont contribué à donner à cette manifestation du peuple de France, son caractère universel de rejet de la violence comme modalité de règlement des différents entre les pays et entre les communautés. Comment un Président de République du Sénégal aurait – il pu manquer à une telle marche ?

Cette marche internationale était d’autant plus nécessaire, que les auteurs de ces tueries ont motivé et assumé publiquement leurs actes, par leur volonté, au prix de leurs propres vies, de punir Charlie Hebdo à cause de ses « caricatures du Prophète Mohammed » (psl), et l’Etat Français, pour avoir assimilé cette « irrévérence » à un « Droit d’expression » qui immunise ses auteurs.

Marcher pour rejeter cette volonté tragique de se faire justice soi même, invite en même temps l’Etat républicain, au respect strict et sans discrimination des valeurs qui le fondent.

Quel est le musulman, dans le monde, qui ne s’est pas senti profondément agressé dans ses convictions religieuses par les « caricatures » de Charlie Hebdo, et outré par l’attitude du Gouvernement Français, d’avoir mis la « liberté d’expression » au dessus de la « liberté de conscience », et d’avoir accordé ainsi l’impunité à ceux qui ont outragé des citoyens Français de confession de la deuxième religion du pays, dont le degré de marginalisation et de frustration est traduit par les 60% de la population carcérale qu’ils représentent en France ?

Les musulmans de France et d’ailleurs ne peuvent pas comprendre, qu’en France, quand on s’attaque aux « homosexuels », c’est « l’homophobie », pour les autorités Françaises, à « Israël », c’est de l’antisémitisme », mais « au Prophète Mohammed (psl) et à l’Islam », c’est la « liberté d’expression » !

Pis encore, quand un dirigeant du Front National caricature la Ministre de la Justice Française, Tabura, en l’assimilant à un « singe » ,il est considéré, par les autorités Françaises, comme un délit puni par la Loi, et par l’opinion publique dominante, comme des « propos anti républicains » au point d’organiser une vaste manifestation pour « défendre les valeurs de la République et de la citoyenneté ». Mais, lorsque Charlie Hebdo caricature le Prophète Mohammed (PSL), ce n’est plus un délit pour ces mêmes autorités, mais un « Droit à la liberté d’expression !

Les adeptes de la deuxième religion de France, sont ainsi jetés dans la « radicalité » par la marginalisation et l’injustice dont ils sont victimes, de la même manière que les Noirs Américains, deuxième composante de la population des USA, et la première composante de la population carcérale dans les années 60, ont été poussés dans la « radicalité », avec la naissance des mouvements comme les « Blak Panthers » et les « Black Muslims », pour l’« émancipation des noirs ».

La grande manifestation du 11 janvier 2015 à Paris, rappelle celle de Martin L. King à Washington, qui, avec son discours historique « I have a dream », a permis de « dé-radicaliser » la lutte pour « l’émancipation des noirs » par une « lutte pour les Droits civiques », qui a créé, aujourd’hui, les conditions d’acceptabilité d’un Noir comme Président de la République des Etats-Unis.

La manifestation du 11 janvier 2015 n’a pas enregistré un discours pareil, mais un geste symbolique et historique du Président François Hollande, qui appelé le ressortissant du Mali, Bathily, pour le féliciter et le remercier, au nom de la France, pour son courage et son sens élevé de solidarité humaine, d’avoir, au risque de sa vie, pris l’initiative de sauver des otages dont l’essentiel est de confession juive.

Le Président Hollande a rehaussé ce symbole de la « reconnaissance » de la France, lors de la marche, en plaçant à ses côtés, le Président la République du Mali, et la Chancelière de la République d’Allemagne.

Malheureusement, ces symboles forts émis par le Président Hollande, ont été occultés par tous les organes de France qui ont couvert la marche, et par tous ceux qui l’ont commentée.

Cette attitude est le résultat du fait que les autorités Françaises n’ont jamais dûment témoigné de la reconnaissance de la France, du rôle joué par les noirs d’Afrique Francophone pour sa libération, la République et la Démocratie.

C’est ce « passif historique » dans les rapports entre la France et les peuples noirs de ses anciennes colonies, que le Président Hollande a publiquement soldé ce 11 janvier 2015, mais dont les préjugés racistes et anti-islamiques de l’opinion hégémonique de France, ont empêché la valorisation par la presse Française lors de la couverture de marche, et dans les débats qui ont suivi.

Ce sont ces préjugés qui risquent de faire rater, à la France, l’occasion de tirer de cette marche historique, comme le firent les USA après celle de Martin L. King, les leçons qui devraient lui permettre de donner des réponses positives à l’exigence d’émancipation de ses citoyens adeptes de la deuxième religion de France, et de souveraineté nationale pleine et entière des peuples de ses anciennes colonies d’Afrique.

Son attachement aux valeurs républicaines, démocratiques et de solidarité qui découlent de ses valeurs fondatrices de « République, Liberté, Fraternité », lui donnent le devoir de rejeter les « solutions sécuritaires de répression policière et carcérale », que les débats encours cherchent à inculquer dans l’opinion publique en France.

De même, les médiats français devraient éviter de « jeter de l’huile sur le feu », en reproduisant, par solidarité étroitement corporatiste, les caricatures de Charlie Hebdo qui choquent les musulmans du monde entier, et créent le lit de la « radicalité » parmi eux.

Si les Etats-Unis ont trouvé, dans la promotion des droits civiques, un remède au processus de radicalisation du mouvement d’émancipation des noirs, et dans l’émigration latine, notamment mexicaine, une réponse à leur « hantise » d’une population noire majoritaire, la France devrait trouver, dans la promotion, sans équivoque, de ses valeurs fondatrices sus évoquées, les réponses aux exigences d’émancipation de sa communauté musulmane, et de souveraineté pleine et entière des peuples de ses anciennes colonies d’Afrique et du Moyen Orient, comme moyens de dé-radicalisation de ses citoyens d’obédience musulmane, et de sa « hantise » d’un Islam hégémonique dans une terre historiquement chrétienne qui a dû recourir à la « croisade » pour l’éviter.

Les partisans, en France, de « solutions sécuritaires et carcérales » à la « radicalité » des exigences d’émancipation de la composante de la société Française, ont favorisé l’agression contre la Libye et l’instrumentalisation du Mouvement Toureg au Nord Mali, le « Mouvement de Libération Nationale de l’AZAWAD » (MNLA), pour déstabiliser ce pays par des exactions et des actions terroristes, afin de mieux sécuriser l’exploitation de l’Uranium au Niger par AREVA qui assure à 40% les besoins l’électricité de la France.

Aujourd’hui, malgré une puissante intervention militaire (Opération Serval), et une forte présence militaire active au Sahel (Opération Barkhane), les accointances entre le MNLA et les « jihadistes » continuent de maintenir l’insécurité dans le Nord du Mali et des menaces sur les intérêts Français dans la région.

Ils sont aussi à la base de la guerre que mène la France contre la Syrie, qu’ils considèrent comme une menace sur ses intérêts stratégiques au Moyen Orient à partir du Liban, en instrumentalisant les forces opposées au régime Syrien, tout en fermant les yeux sur les volontaires Français désireux de les rejoindre, à défaut de son engagement militaire direct.

Comme les Etats Unis qui avaient instrumentalisé Al Qaida, pour lutter contre l’Union Soviétique en Afghanistan, et qui s’était retourné, par la suite, contre eux le 11 Septembre 2001, en s’attaquant aux « Twins Tours », la France vient de subir « un retour de manivelle », à Charlie Hebdo et Montrouge, de la part de ses citoyens musulmans, en provenance de Syrie où ils ont été formés par des « jihadistes ».

La France, plus que les Etats Unis, est aujourd’hui confrontée à un « jihadisme » national à forte potentialité de développement, qu’il est illusoire de vaincre par les « méthodes de répression policière et carcérale », comme les Etats n’ont pas pu vaincre le « radicalisme noir » par ces mêmes méthodes.

La France est à la croisée des chemins. Et les Socialistes au pouvoir sont fortement interpellés à ne pas répondre aux sirènes de la Droite et l’Extrême Droite, pour éviter, à la France, de tomber dans une « psychose sécurité » qui va baliser le terrain au « Totalitarisme ».

L’ampleur mondiale de la marche du 11 janvier 2015, et les symboles posés par le Président Hollande lui indiquent le chemin.

Ibrahima SENE PIT/SENEGAL
Fait à Dakar le 12 janvier 2015