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Karim Wade prisonnier de ses mauvaises habitudes


Rédigé par leral.net le Jeudi 11 Septembre 2014 à 07:34 | | 24 commentaire(s)|

Karim Wade prisonnier de ses mauvaises habitudes
Karim Wade peut choisir de se taire au tribunal, mais n'empêche son mutisme n'est que l'expression de ses pires habitudes de "fils à papa". Quelle que soit son attitude à la barre, le tribunal aura toujours de sa part une réponse valide aux questions qui lui seront posées. Au cours des audiences j'ai été particulièrement frappé par son attitude condescendante et les symptômes de trouble de narcissisme dont il souffre.

Quand Me Thiam lui cause une ire, Karim s'étouffe de condescendance

À la question judicieuse de Me Yérim Thiam : "Avant que votre papa ne soit président de la République, aviez-vous déjà reçu des cadeaux de chefs d'Etat étrangers ?", Karim, à juste titre, est sorti de ses gonds, soupçonnant là une prémisse pertinente à mener à des conclusions dangereuses pour son cas. Rompant avec le mutisme qu'il s'était juré d'observer, il lui a servi pour toute réponse, une question extravagante : "Me Yérim que faites-vous des cadeaux que mon père vous faisiez lorsque vous sortiez du palais nuitamment avec de grosses enveloppes que vous n’arriviez même pas à porter ?".

Me Yérim a pris bonne note, tout comme le tribunal, et est passé à autre chose, lui laissant croire qu'il avait frappé un bon coup. Qu'on ne s'y méprenne ! Le silence de Me Thiam, conscient d'avoir réussi la prouesse de l'amener à parler, n'est qu'une bonne stratégie pour mettre en évidence la stupidité de sa réaction. C'est un homme du métier, qu'une longue et riche expérience n'autorise pas à divertir le tribunal par son implication personnelle dans un échange d'inepties. L'exagération des propos contenus dans la question de Karim (enveloppes d'argents qui auraient nécessité des gendarmes porteurs) ont donné à celle-là un caractère si grotesque qu'aucune autre réponse que le silence, n'aurait été du sérieux.

Qu'est-ce qui donc motive chez Karim, cette vaine attitude consistant à tourner en dérision tous les actes posés par les parties adverses et le tribunal ? Probablement le fait de se croire illusoirement au dessus des lois et institutions répressives de la République. Karim nous joue là une tragicomédie de mauvais aloi, du type : "un prince déchu, dans une attitude de condescendance stérile devant un tribunal chargé de juger ses crimes".

Venant de lui, rien d'étonnant quand on sait qu'après avoir semé tant d'actes d'arrogance étant au pouvoir, l'habitude a fini par s'installer et ne plus le quitter. Cette fatuité est le propre de ceux qui ont foi à la dictature et ont eu l'heur d'exercer un moment le pouvoir.

Cependant cette tragicomédie était programmée sans compter avec la vigilance et la compétence d'un avocat comme Me Thiam. Avec une question d'une luminosité aveuglante dans cette affaire, Me Thiam est venu briser sa résolution érigée en stratégie et déjouer les subterfuges. Car en posant des conditions au tribunal le présumé qu'il est, tentait d'inverser les rôles, d'intimider le tribunal et de le confiner par la suite dans le rôle de damné, plaidant pour sa propre survie.

Me Thiam, en vrai psychologue, a su juste jouer sur le mot "Papa" pour désarçonner notre "gentleman". L'évocation de ce mot "papa" a suffit pour qu'il intentât inconsciemment un vrai parricide- "que faites-vous des cadeaux... quand vous sortiez nuitamment du palais avec de grosses enveloppes que vous n'arriviez même pas à porter ?".

L'origine de cette réaction est l'émotionnelle qu'occupe dans le psychique de l'enfant, le père, rival et modèle à la fois. L'irrationalité totale de sa réaction arrogante est le signe révélateur d'un traumatisme narcissique. De quelle vertu quelqu'un qui témoigne une telle idée de son père peut-il se prévaloir ? En tout cas pas de la légitimité de disposer en toute impunité des milliards de francs présumés acquis frauduleusement grâce à la position donnée par le père.

D'ailleurs, le peu de crédit moral que le doute autorisait à accorder à son père se trouve réduit à néant, par ses fabulations spontanées. Cependant cet aveu involontaire ne le tire pas de l'embarras où l'a plongé l'interrogation tendant à lui démontrer que le don n'est pas un argument recevable dans cette cour, pour justifier la détention de milliards de nos chers francs.

Alors il faut qu'il se le tienne pour dit une bonne fois pour toute, la reddition des comptes dans toute sa rigueur est légitime, y collaborer positivement sans se parjurer quand on est interpellé est un acte d'honnêteté et de courage civique.

Ce procès est "politique : mon éventuelle candidature en 2017 empêche Macky de dormir"

Chaque fois que quelqu'un avance cette assertion, qui ne cesse de revenir comme une antienne, je me retourne en me posant la question : "qui cherche-t-on à tromper ?

Mais ce projet de candidature n'a-t-il pas déjà un vécu, un chemin parcouru, une historique présentant un intérêt eu égard à son avenir ?

N'est-ce pas le projet qui a débuté par la mise en place d'un mouvement dénommé "Génération du concret" avec comme slogan "en route vers le sommet", que certains, bien avisés ont taxé de dévolution monarchique du pouvoir et s'y sont farouchement opposés ? Ce qui a valu des déboires politiques à nombre de partisans éminents du Parti démocratique sénégalais (PDS), qui avaient mené une longue et épuisante bataille à coté de leur leader Abdoulaye Wade dans l'opposition, sans jamais avoir vu le fils à leurs cotés.

N'est-ce pas le Karim qui au sommet de ses pouvoirs a vainement mené une campagne superbe en vue de gagner sa commune et durant laquelle la mobilisation était des plus réussies et médiatisées, rien que pour aller perdre lamentablement même dans le bureau où il avait voté.

C'est bien le même projet dont il s'agit, du même Karim diminué de sa toute puissance de "fils adulé du président", du statut de super ministre, de l'étiquette du plus intelligent de tous les Sénégalais décerné par le président, son père.

Si tel est le projet, avec ses records, comment dès lors peut-on partir de ça et oser croire qu'il empêche le Président Macky Sall, dont la stratégie politique a triomphé de toutes, de dormir ? C'est impossible pour un homme censé, il faut avoir une surestime de sa propre importance, s'attendre à être reconnu supérieur sans avoir accompli des réalisations en rapport avec ce désir, pour fantasmer de la sorte. C'est donc là rien qu'un autre symptôme de narcissisme.

Il n'y a plus de Karim candidat à quoi que ce soit au Sénégal, en tous cas pas pour 2017 ou 2019, même si par extraordinaire il était disculpé.

Même avec un clochard comme seul rival, les Sénégalais ne voteraient pas pour Karim. Je dis là ce que la majorité des gens ont la pudeur de dire haut, mais que les résultats des locales de 2009 ont exprimé éloquemment. Ce projet "Karim président de la République" a été perçu sitôt qu'il a pris forme comme une insulte pour les Sénégalais et ils l'ont challengé en votant pour le rétablissement de leur dignité en réponse aux dérives autoritaires et monarchiques de son père.

Cela démontre, si besoin est, qu'il y a des Sénégalais dignes jusque dans les rangs du PDS et la "Génération du concret" et en nombre tels que leurs soutiens retirés, il ne resterait dans ces organisations que le menu fretin qui ne peut porter personne vers les sommets. Karim n'a d'autres bases sur lesquelles compter en dehors de ces organisations et le soutien en leur sein s'est réduit comme une peau de chagrin.

Les Sénégalais n'ont jamais gobé la partialité excessive de son père en sa faveur et le fait qu'il loue publiquement ses moindres actes avec une enchère de superlatifs saugrenue, aux dépens de tous les autres compatriotes méritants.

Par ailleurs il est lui-même l'obstacle majeur de sa propre candidature. Nous Sénégalais ne pouvons accepter qu'il soit de père sénégalais, qu'il ait vécu dans ce pays depuis son enfance, sans s'être intéressé tant soit peu à parler une langue de ce pays et subitement, parce qu'on a eu à élire son père, qu'il soit gagné par une obsession de nous gouverner comme si notre État et nous-mêmes n'étaient juste qu'une part de son héritage.

Alors qui veut peut l'aimer avec passion, mais il faut comprendre que pour les Sénégalais, les Wade c'est derrière eux. C'est du passé, ça ne revient pas. A y voir clair les Sénégalais aiment hurler avec les loups mais ils ont un sens du vote très responsable et en rapport direct avec leur dignité et l'importance accordée au respect qui leur est dû. Ce n'est pas après avoir extirpé chirurgicalement une épine de notre talon après en avoir souffert des années, qu'on va l'y remettre juste pour rendre justice à l'épine.


*Nos habitudes nous suivent même là où elles ne nous servent plus à rien (Marcel Proust)

Ibe Niang Ardo