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Karim n’est pas condamné, c’est la Conscience des politiciens qui l’est


Rédigé par leral.net le Mercredi 25 Mars 2015 à 08:00 | | 5 commentaire(s)|

Karim n’est pas condamné, c’est la Conscience des politiciens qui l’est
Le verdict de ce monstre juridique qu’on appelle CREI est tombé, mais la lecture et l’interprétation qu’on en fait risquent de ne pas être bonnes. Les rares défenseurs de la CREI croient avoir remporté une victoire, mais sont-ils affranchis de tout remords ? On peut tromper les hommes et les institutions humaines, mais toute supercherie achoppe sur deux absolus : Dieu et la conscience. Au-delà de la rhétorique sur l’injustice flagrante qui frappe la personne de Karim ou la nécessité de rendre justice au peuple, il nous semble que le juge, quoiqu’on puisse lui reprocher, a rendu au moins service au bon sens et à la cohérence.

Le délibéré et le verdict « condamnent » la quasi-totalité de tous ceux qui ont eu à occuper des postes de responsabilité dans ce pays de 1960 à nos jours. Ils peuvent parader, prendre les grands airs dans les studios de télévision, dissimuler leur richesse choquante dans le sophisme, mais le soir quand leur conscience se dédoublera et fera face à leur ignominie, ils auront du mal à dormir. « Agis de telle sorte que tu puisses vouloir que la maxime de ton action devienne une loi universelle » : telle est selon Kant la première règle de l’impératif catégorique que nul ne peut prétendre ignorer. La conscience humaine ne se trompe jamais, elle est le correspondant permanent de Dieu sur terre et ce n’est pas un hasard si elle ne dort ni ne somnole.

Le Sénégalais serait bien heureux si tous les protagonistes dans cette affaire pouvaient conjuguer cette maxime kantienne à la première personne de tous les temps. Hélas il semble que le folklore, la politique vindicative, la théâtralisation et la consommation extérieure soient les principaux leviers qui font marcher ce monstre. Nous sommes tous embarqués dans une gigantesque mise en scène d’hommes politiques qui ont les mêmes tares, les mêmes crimes à leur actif et les mêmes méthodes de dissimulation. Karim a été condamné à six ans de prison mais il y a de fortes chances qu’il ait mieux dormis que certains de ces bourreaux !

Karim est condamné mais, à part ceux qui lui en voulaient personnellement, tous ceux qui le critiquaient objectivement et exigeaient la lumière sur son patrimoine sont soit dans le doute, soit dans une déception immense ! Karim est condamné et personne ne sait qu’est ce qui justifie que sont sort soit différent de celui de ceux qui nous gouvernement présentement ! Karim est condamné et on voit de nouveaux riches parader sous nos yeux ! Si j’étais Karim je refuserai toute grâce présidentielle et je ne tirerai aucun bénéfice d’une loi d’amnistie et ce, que je sois coupable ou pas. Ce service qu’il nous aurait rendu, permettrait à coup sûr de nous laisser, autant que nous sommes, face au tribunal de notre conscience.

Que chaque Sénégalais porte dans sa conscience le fardeau du supplice du fils de Wade pour que dans ses actes quotidiens qu’il sente au fond de lui-même que ce n’est pas, en dernière instance, Karim qui est condamné, mais le Sénégalais en général, et le politicien en particulier. Ainsi nous comprendrons que le cannibalisme intellectuel et moral est la chose la mieux partagée dans ce pays que la vérité et la vertu ont déserté. Ne serait-ce que pour ces considérations, nous devons dire MERCI à la CREI et ce n’est ni de l’ironie ni du sarcasme.

Alassane K. KITANE, professeur au Lycée Serigne Ahmadou Ndack Seck de Thiès