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Kofi Annan : « Il faut aider la CPI à s’améliorer, pas la quitter »

Rédigé par leral.net le Mercredi 30 Novembre 2016 à 20:43 | | 0 commentaire(s)|

En annonçant qu’ils allaient se retirer de la Cour pénale internationale (CPI), le Burundi, la Gambie et l’Afrique du Sud ont pu donner l’impression que l’Afrique dans son ensemble était hostile à cette Cour.


Kofi Annan est un diplomate ghanéen. Il a été secrétaire général de l'ONU de 1997 à 2006
Kofi Annan est un diplomate ghanéen. Il a été secrétaire général de l'ONU de 1997 à 2006
C’est faux et il convient d’insister sur le fait que les peuples d’Afrique, et tout particulièrement les victimes de crimes de guerre, de génocides et de crimes contre l’humanité, soutiennent la CPI, tout comme la plupart des gouvernements démocratiques africains. Quant à moi, je soutiens la CPI parce que les crimes les plus odieux ne doivent pas rester impunis.

Je suis africain et c’est moi qui ai présidé à l’ouverture de la conférence de Rome en 1998, celle-là même qui a conduit à la création de la Cour, et j’étais fier que mon continent en soit le partisan le plus enthousiaste. Les souvenirs des horreurs du génocide rwandais étaient encore frais dans nos esprits. J’ajoute que le premier pays signataire du traité fut africain (le Sénégal), et que l’Afrique demeure le premier groupe régional au sein de la CPI, avec 34 États parties au Statut de Rome sur 124.

Nous sommes également ceux qui y avons eu recours le plus souvent, et ce dès ses débuts. Huit des neuf enquêtes qui concernent le continent ont été demandées par les États africains eux-mêmes. Les États africains ont également soutenu les renvois devant la Cour des cas du Darfour et de la Libye, ainsi que le demandait le Conseil de sécurité. Le cas du Kenya fut le seul à être ouvert indépendamment par la CPI, mais il jouissait du soutien enthousiaste d’une majorité de Kényans, qui voulaient que justice soit faite après la mort de 1 300 des leurs lors des violences qui ont suivi les élections de 2007.

La CPI demeure le dernier recours pour les victimes des crimes les plus odieux ?

Non, la CPI ne supplante pas les juridictions nationales : si elle s’est impliquée dans ces affaires, c’est parce que les autorités nationales n’ont pas conduit de véritables enquêtes après les crimes perpétrés. Elle n’intervient que dans les cas où les pays concernés ne peuvent pas ou ne veulent pas traduire en justice leurs propres citoyens. Les Africains aussi ont droit à la justice, même si leurs États ne la rendent pas.
Certains rétorqueront que la Cour africaine des droits de l’homme et des peuples devrait jouer ce rôle. Mais si son protocole a été adopté il y a deux ans, il demeure largement non ratifié. Pour le moment, force est de constater que la CPI demeure le dernier recours pour les victimes des crimes les plus odieux.

À ceux qui pensent que la justice internationale ne s’intéresse qu’à l’Afrique, je veux rappeler que des tribunaux criminels internationaux furent établis à la fin de la Seconde Guerre mondiale, à Nuremberg et à Tokyo, et que, après la guerre froide, d’autres tribunaux internationaux ou mixtes virent le jour pour juger les crimes commis au Liban, au Cambodge et en ex-Yougoslavie.

jeuneafrique