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L’éternelle pathologie « démocratique » du parti socialiste (Par Djiby MBOUP)

Rédigé par leral.net le Mardi 7 Mars 2017 à 16:01 | | 0 commentaire(s)|


 
En 1960, année de laccession du pays à la souveraineté internationale, le Sénégal opte pour un modèle politique assez proche du modèle français antérieur à 1958, avec des pouvoirs très importants donnés au Président du Conseil et un rôle limité au Président de la République. Cette répartition des pouvoirs va être au cœur dune grave crise politique.
 
Elle oppose le Président du Conseil Mamadou DIA et le Président de la république Léopold Sédar SENGHOR, les deux chefs du premier exécutif sénégalais, en réalité déjà en désaccord à la veille de l’indépendance du Sénégal. Cette dualité au sommet de l’Etat a poussé Senghor à accuser Dia d’une tentative de coup d’Etat et à le faire emprisonner des années durant.
 
Il résulte de cette crise politique une importante révision constitutionnelle en 1963 avec la suppression du poste de premier Ministre et l’instauration d’un régime présidentiel.
 
La politique au Sénégal continua son cours au sein du PS. Quelques années plus tard, Senghor changea le type de régime avec une nouvelle révision de la constitution (1970) et nomma Abdou DIOUF au poste de premier ministre. Cette nomination avait pour but de préparer le départ du Président poéte de la tête de l’Etat. Dix ans plus tard, en 1980, il démissionna et son premier ministre devint d’office président. Au moment où au parti socialiste siégeait de potentiels prétendant aussi méritants et bien plus outillés pour prétendre à ce poste, la pathologie « démocratique » qui a séparé les chemins de SENGHOR et  DIA prenait de l’ampleur.
 
Le nouvel arrivant, Président Abdou DIOUF organisa un congrès en 1984, en bon héritier de SENGHOR, avec des valeurs démocratiques qu'il comptait bien  transmettre aux générations futures. C’est ainsi qu’il fit éliminer lors de cette élection des amis chers à SENGHOR qui, à cette période  étaient plus légitimes politiquement. Avec la complicité de Jean Colin, il mettra au placard Alioune Badara Mbengue, Amadou Cissé Dia, Amadou Clédor Sall, etc. Ce qui lui permit d'asseoir tranquillement son autorité au PS.
 
 En 1996, un nouveau congrès se préparait, M.DIOUF tentait de répéter le coup de 1980. « Nitt li nga namp req nga xam» dit-on en Ouolof, « on ne sait que ce qu’on nous a transmis ». Il décida de porter M.Tanor DIENG à la tête du parti à travers un congrès sans débat. Une erreur monumentale car elle causa le départ de deux cadors du parti à savoir NIASSE et KA qui vont créer des partis politiques emportant ainsi une importante partie  de l’électorat du PS. Ce qui affaiblira considérablement la majorité d’alors et conduira à la perte du pouvoir pour le désormais ex Président Abdou DIOUF en 2000 . Hélas, les héritiers du parti n’ont rien retenu de l’histoire. Le mal persiste. Pire, il a gagné du terrain.
 
Ousmane Tanor DIENG à la tête du PS avec 12 ans d’opposition accède au pouvoir avec le président Macky SALL. Douze années très difficiles avec le départ de plusieurs cadres vers le PDS (Parti Démocratique Sénégalais). Cependant, M.DIENG qui demeurait digne se maintenu à la direction du pouvoir avec beaucoup d’abnégation en compagnie de ses lieutenants qui étaient et qui sont encore aujourd'hui plus populaires et plus légitimes que lui (Khalifa SALL, DIAZ, Bamba FALL, Aissata Tall SALL…). Ces derniers lui ont été loyaux et l’ont aidé à gérer le parti pendant toutes ces années.
 
En 2012, Le président SALL décida de partager le pouvoir avec la coalition qui lui a permis  d'accéder à la présidence. Un partage du gâteau qui a vu le PS obtenir plusieurs postes au sein du gouvernement (ministres, directeurs généraux…) et pour couronner le tout, M.DIENG est « élu » président du HCCT (Haut conseil des collectivités territoriales). Tous ces privilèges ne l’ont pas laissé intacts. Il s'acharne aujourd’hui  à freiner des personnes dont les ambitions sont légitimes au sein du parti. En bon soldat, il décidera de véhiculer cette même pathologie instaurée par Senghor et mise en œuvre par DIOUF. C’est ainsi qu’il affirma, avec des gens qui profitent des mêmes privilèges que lui, que le parti socialiste ne se présenterait à aucune  élections jusqu’en 2024 afin d'apporter au président SALL le soutien nécessaire pour rester au pouvoir.
 
 Au même moment, d’aucuns de ses frères de parti qui, à juste raison estime qu’un parti tel que le Parti Socialiste, parti le plus structuré, le plus représentatif pour ne pas dire la plus grande formation politique de l’histoire du Sénégal n’a tout simplement pas le droit de ne pas présenter un candidat à quelques joutes électorales que ce soient à fortiori aux élections législatives de 2017 et aux présidentielles de 2019 se voient traqués, poussés à la sortie. C’est dire que l'histoire se répéte ! C’est dire que cette aristocratie socialiste, avec à sa tête Ousmane Tanor DIENG est frappé d’amnésie. M.DIENG tente de répéter les coups de 1980 et de 1996. A savoir bloquer ces « ambitieux » qui ont été pourtant ses lieutenants et qui l’ont aidé lors du congrès sans débat (Bamba FALL et Khalifa SALL). Ce M.DIENG  semble avoir un problème avec la démocratie tout comme ses prédécesseurs, ayant assisté à tous les coups anti-démocratiques du parti, il ne peut que se comporter de cette manière « L’éternelle pathologie  démocratique du parti socialiste ».
 
Maintenant, se pose un problème de cohérence chez les victimes du parti: Ces lieutenants qui se sont révoltés et qui veulent que le parti se présente de manière indépendante aux élections à venir, ce sont eux même qui lors du congrès sans débat soutenait Tanor DIENG. Ces personnes peuvent t-ils aujourd’hui se plaindre d’une Absence de  démocratie au sein du PS et surtout venant de Tanor DIENG ? « Ce que j’acceptais hier, aujourd'hui je le renie». Schizophrénie?
 
Il est certes vrai que le PS n’est pas un parti démocratique comme tous les autres partis politiques au Sénégal d’ailleurs. Le flambeau de cette pathologie a été bien entretenu de SENGHOR à DIENG, en passant par DIOUF. Ousmane Tanor DIENG a été aidé dans cette tache par des lieutenants qui ont fini par se rebeller. Aujourd’hui, le patron des lieutenants « Khalifa SALL » souhaite couper le cordon ombilical et rendre le parti démocrate. Mais cette pathologie est-elle réversible ? N’a-t-il pas fréquenté un peu trop ces hommes et ce systéme pour prétendre amener un changement ?  Plus de 30 ans dans un système et ne pas s’y reconnaitre, est ce possible ? Tant de questions sombres dont les réponses seront difficiles à trouver. Qui croire au final ? Et qui pour le renouveau du parti socialiste ? Ce renouveau est-il juste possible ?
 
MBOUP Djiby
Analyste politique
Creil, France