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L’indigénisation du secteur pétrolier: l’exemplarité du Ghana; levier de développement économique du Sénégal

Rédigé par leral.net le Lundi 29 Mai 2017 à 16:56 | | 0 commentaire(s)|

Dans le cadre de sa récente tournée sous-régionale, Son Excellence le Président de la République du Ghana, M. Nana Akufo-Addo, élu en 2016 au premier tour des élections présidentielles (avec un suffrage de 53%), a effectué une visite de travail et d’amitié du 15 au 17 Mai au Sénégal.

Lors de la conférence de presse du 16 Mais 2017 au Palais de la République, les Présidents Sall et Akufo-Addo ont fait part de leurs décisions d’accroître la coopération bilatérale entre leurs pays respectifs, mais aussi du partage d’expérience du Ghana sur les gestions des ressources naturelles telles que le pétrole et le gaz. Cette décision du Président Macky Sall est à saluer. En effet, le Ghana, récent producteur d’hydrocarbures a, dans son Code Pétrolier, élaboré des cadres juridiques qui serviront d’apport considérable dans son économie nationale. 

A travers notre modeste contribution, nous montrerons que cette décision du Président Macky Sall de vouloir un partage de savoir-faire ghanéen sur la gestion de ses ressources naturelles n’est pas fortuite, mais bel et bien fondée, et relève d’une vision d’accroître la part de participation locale dans la chaîne de valeur pétrolière au Sénégal.

Notre analyse portera en  premier lieu sur une brève comparaison géographique et démographique entre le Ghana et le Sénégal, ensuite nous définirons le concept d’indigénisation d’un secteur et plus spécifiquement, au niveau du secteur des hydrocarbures ainsi que son impact sur l’économie locale. En troisième lieu, nous analyserons deux cas pratiques d’indigénisation du secteur pétrolier ghanéen à travers le programme appelé ‘Local Content’ ou ‘Contenu Local’, et montrerons finalement, que l’indigénisation d’un secteur n’est pas un signe de fermeture sur soi-même, mais est un facteur d’attraction d’investissements directs étrangers (IDE). 

Le Ghana, pays d’environs vingt-huit millions (14.5 millions pour le Sénégal) d’habitants a une superficie de 238 533 km² (196 722 km² pour le Sénégal), et un taux de croissance de 2.42% par an (2.16% pour le Sénégal). Sur le plan économique, le Ghana a un produit intérieur brut (PIB) estimé 22 238 Milliards de Franc CFA, (8 200 Milliards pour le Sénégal). L’économie ghanéenne repose sur les produits agricoles tels que le cacao (deuxième producteur mondial), café, mais aussi minier tel que l’or (dans la région d’Ashanti, Takoradi etc.), et plus récemment le pétrole.

Au niveau du classement des activités portuaires, le Port de Téma traite chaque année environs 820 000 conteneurs, contre 400 000 pour le Port de Dakar. Néanmoins, il est à préciser que le Port de Téma sert aussi aux pays voisins du Ghana tel que le Nigeria (due aux difficultés sur le Port de Lagos), le Burkina Faso et autres pays enclavés limitrophes.

L’indigénisation est un concept par lequel on rend ‘indigène’, ou on accroît la présence ou la représentation locale dans un certain secteur. Dans le cas d’indigénisation du secteur pétrolier, on accroît la présence locale dans le secteur pétrolier. Ce concept est important dans le sens où on encourage les locaux qui n’ayant pas les capitaux pour investir ou la compétence intellectuelle, de prendre leurs parts dans cette activité.

Il est à noter que l’indigénisation est un concept graduel, car la présence étrangère est, et sera toujours nécessaire à cause de phénomène de mondialisation. En effet, cette présence étrangère n’apporte pas juste des capitaux, mais des compétences intellectuelles. Le transfert de compétences intellectuelles est donc primordial.

Ce procédé d’indigénisation accroîtra ainsi la présence de locaux dans la chaîne de valeur pétrolière, mais permettra la création d’entreprises appartenant à des Sénégalais(es) et permettra une valeur ajoutée dans l’économie locale. Une récente étude menée par le bureau d’études américain IHS Markit pour le compte du Département d’Energie (l’équivalent du Ministère de l’Energie) illustre l’importance de la chaîne de valeur des hydrocarbures et son impact: «
Les avantages économiques de l'activité pétrolière et gazière dans une vaste chaîne d'approvisionnement dépassent de loin les avantages pour l'industrie elle-même. Chaque nouvel emploi de production crée trois emplois dans la chaîne d'approvisionnement et six autres emplois dans l'économie, en général. Les contributions au Produit intérieur brut (PIB) se multiplient aussi: chaque dollar de PIB créé dans le secteur du pétrole et du gaz génère deux dollars dans la chaîne d'approvisionnement.»  

A travers ces propos, nous voyons l’impact exponentiel que peut avoir l’activité pétrolière dans une économie. Il est donc recommandé que le Sénégal ouvre l’exploration de ses champs pétroliers au plus grand nombre de candidats ayant la capacité technique et financière. 

En 2007, une certaine compagnie dénommée Kosmos Energy (à l’époque dirigée par le légendaire Jim Musselman, et dont le film-documentaire ‘Big Men’, produit par l’acteur Brad Pitt fait le récit de son aventure ghanéenne) fit la découverte d’un important gisement pétrolier, d’une réserve estimée entre 1.8 et 2 milliards de barils, et qui sera nommée le champ Jubilee  et dont la production journalière actuelle est entre 100-150 mille barils jours.

Quelques années plus tard, en 2013, l’assemblée nationale ghanéenne a voté la loi L.I 2204, intitulé ‘Petroleum (Local Content and Local Participation) Regulations, 2013’ , qui est une série de mesures ayant pour but d’accroître la présence de Ghanéens, ou les entreprises ghanéennes (dans lequel un capital minimal devrait appartenir à une personne de nationalité ghanéenne), dans les secteurs des hydrocarbures. Cette présence peut être faite à travers des entreprises de prestations de services tel que :
•    Prestations intellectuelles : Bureau d’études 
•    Entreprise de fabrication et de production
•    Entreprise d’approvisionnement, transport, logistique
•    Entreprise à vocation QHSE

Il est important de préciser qu’une chaîne de valeur pétrolière est généralement divisée en trois groupes: 
En amont: au niveau des champs pétroliers (offshore ou onshore), où on cherche l’existence de la matière, et si on en trouve, on l’extrait (donc on produit).