Leral.net - S'informer en temps réel

La sécurité alimentaire, un droit de l’homme primordial - Par Pr. Demba Sow

Rédigé par leral.net le Lundi 15 Juin 2015 à 13:15 | | 0 commentaire(s)|

La sécurité alimentaire est un thème d’actualité aussi bien dans le Nord que dans le Sud. Elle est définie par la FAO ainsi : « La sécurité alimentaire existe lorsque tous les êtres humains ont, à tout moment, un accès physique et économique à une nourriture suffisante, saine et nutritive leur permettant de satisfaire leurs besoins énergétiques et leurs préférences alimentaires pour mener une vie saine et active ».


La sécurité alimentaire, un droit de l’homme primordial - Par Pr. Demba Sow
Cette définition montre que, pour bien vivre, s’épanouir, produire et se reproduire, l’homme a besoin de manger à sa faim de produits sains, nutritifs et qu’il préfère. L’accès à la nourriture saine en quantité et à volonté est un préalable à tout développement et bien être humain. Selon Maslow qui a hiérarchisé les besoins de l’homme dans sa célèbre Pyramide, s’oxygéner, boire et manger sont les premiers besoins de l’homme dont la satisfaction prime et conditionne celle des autres. Réaliser la sécurité alimentaire devrait être un impératif pour tout pouvoir soucieux du bien être de son peuple.

Dans beaucoup de pays, malgré la volonté plusieurs fois réaffirmée des chefs d’Etat et de gouvernement, la sécurité alimentaire est loin d’être réalisée. Actuellement, plus de 800 millions de personnes dans le monde et plus particulièrement dans les pays en développement n’ont pas une nourriture suffisante pour satisfaire leurs besoins essentiels. C’est une situation inacceptable en ce 21ème siècle où les disponibilités alimentaires ont considérablement augmenté et sont suffisantes pour nourrir toute l’humanité. Les statistiques de 2015 indiquent toutefois une amélioration significative dans l’accès à la nourriture des populations au niveau mondial. On s’en félicite mais beaucoup de communautés sont toujours en insécurité alimentaire aussi bien dans le Nord que dans le Sud.

Selon Oxfam Sénégal, 1,5 million de Sénégalais sont en situation d'insécurité alimentaire et dans la sous-région ouest africaine, 5,8 millions d'enfants sont sous la menace de malnutrition aiguë alors que 4,3 millions de personnes sont en situation d'insécurité alimentaire dans sept pays du Sahel (Sénégal, Gambie, Mali, Niger, Mauritanie, Tchad et Burkina Faso). Toujours selon Oxfam Sénégal, avec l'augmentation de la fréquence et de l'intensité des catastrophes naturelles résultant du changement climatique, les difficultés que rencontrent les communautés en situation d'insécurité alimentaire pourraient s'accroître davantage.

Les décideurs doivent se rappeler que chaque être humain a le droit d’avoir accès à une nourriture saine et nutritive, en quantité, à tout moment et en tout lieu. C’est un droit de l’homme fondamental et primordial.

La sécurité alimentaire est une tâche complexe et multidimensionnelle dont l’atteinte suppose la réalisation au moins de 4 objectifs clefs :

- Une augmentation des productions dans tout pays touché par l’insécurité alimentaire ;

- Une garantie des approvisionnements en produits alimentaires ;

- Une lutte féroce contre la pauvreté pour doter les ménages de moyens financiers suffisants pour accéder à la nourriture ;

- Garantir aux consommateurs que les produits alimentaires sont sains et nutritifs.

Pour l’atteinte de ces objectifs, les pays en insécurité alimentaire ont l’obligation et le devoir de mettre en place une stratégie de produire plus de produits alimentaires, de disposer d’infrastructure de stockage, de transformation et de commercialisation des produits agricoles ; d’augmenter le pouvoir d’achat des citoyens par la production de richesse ; de soutenir les plus démunis dans le cadre d’une politique de solidarité nationale institutionnalisée et de mettre en place un système de contrôle des produits alimentaires locaux ou importés et d’analyse des risques liés à l’insalubrité des aliments

Produire plus de produits agricoles

On ne produit pas plus de produits agricoles avec une baguette magique. Pour produire plus de produits agricoles, il faut de l’eau, des terres, un cheptel, des semences, du matériel agricole, des intrants, de la main d’œuvre et un encadrement efficace des producteurs. Au Sénégal, nous réunissons les conditions minimales pour produire l’essentiel de ce que nous consommons (riz, sucre, mil, huile, tomate, lait). Pourquoi alors la sécurité alimentaire reste-t-elle toujours chez nous un objectif plus ou moins lointain ? Les raisons pourraient être les suivantes :

- Les pouvoirs publics qui se sont succédé à la tête de l’Etat après le Président Senghor n’ont pas élaboré une politique agricole nationale fondée sur une ambition d’atteindre des objectifs de production à cours et à long termes. Les politiques agricoles mises en place jusque là ont toujours été sectorielles et souvent destinées à régler une crise conjoncturelle. La politique agricole du Sénégal est déclinée sous forme de projets de développement à travers le pays sans liants entre eux et sans coordination. Il est temps d’inverser cette vision qui a montré son inefficacité. Il faut territorialiser la politique agricole dans le cadre d’une vision nationale de développement du secteur. Le regroupement des ministères dédiés au monde rural en un seul ministère avec des ministères délégués permettrait une meilleure coordination de la politique agricole du Sénégal dans le cadre d’une vision global du développement rural;

- L’autre faiblesse de la politique agricole du Sénégal est notre retard dans l’amélioration génétique des variétés cultivées et des espèces animales élevées. On ne bénéficie pas assez des avancés des sciences agronomiques et zootechniques. Rien n’a changé ou très peu depuis 1960 dans ce domaine. La faible productivité de notre agriculture et de notre élevage est essentiellement due aux mauvaises semences et à la faible performance de notre cheptel en termes de production de lait et de viande. Là aussi il est temps d’inverser et c’est possible avec nos vétérinaires et ingénieurs agronomes hautement qualifiés mais insuffisamment sollicitées. La réhabilitation de l’ISRA et de l’ITA avec une feuille de route objectivée est une nécessité, le développement agricole ne pouvant pas se passer de la recherche ;

- Pour la maîtrise de l’eau, des progrès ont été certes obtenus mais il reste beaucoup à faire. Les efforts semblent concentrés sur les eaux des fleuves Sénégal et Gambie mais peu de choses sont faites pour valoriser les milliards de m3 qui se déversent dans les cours d’eau ou s’infiltrent dans le sol. La retenue de ces eaux pourrait booster l’agriculture sénégalaise. La majorité des agriculteurs (2/3 de la population) sénégalais restent inactifs et donc sans revenus pendant les 6 à 7 mois de la saison sèche par manque d’eau. Les éleveurs rencontrent toujours des difficultés assez inimaginables au Sénégal après nos 55 années d’indépendance. Il y a des zones au Sénégal où des hommes et des animaux meurent de soif en 2015. L’eau est la clef du développement du Sénégal vu sous tous les angles. La construction de bassins de rétention d’eau doit être poursuivie et intensifiée à l’échelle nationale. Pour l’instant c’est le meilleur moyen de valorisation des eaux de ruissellement mais c’est également un moyen efficace de lutte contre la pauvreté et la malnutrition ;

- Les producteurs agricoles sénégalais sont très professionnels mais beaucoup sont analphabètes. Ils ne maitrisent pas souvent l’utilisation des intrants et ils ont du mal à appliquer les bonnes pratiques de production agricole. Plus de 30% de la production agricole nationale sont perdus à cause de la non maitrise du système post-récolte. Dans ces conditions, un service d’encadrement est une nécessité pour augmenter la productivité, la production et la qualité des produits. Après le Président Senghor, l’encadrement du monde rural a été démantelé sous de faux prétextes. Ce recul a installé la pauvreté dans le bassin arachidier et a arrêté la modernisation de notre agriculture lancée par Léopold Sédar Senghor ;

- Le monde rural est sous équipé en matériel agricole. Depuis le Président Senghor, l’Etat n’a pas mis en place une politique continue d’équipement des exploitants agricoles. En conséquence, le déficit est si élevé aujourd’hui que plusieurs années sont nécessaires pour le combler. Comment peut-on moderniser une agriculture sans matériel agricole ? L’arrêt de l’équipement des paysans en matériel agricole est aussi une cause de la faible performance de notre agriculture. L’équipement du monde rural doit être continu à l’échelle nationale, chaque terroir selon ses besoins. Le matériel agricole peut être subventionné ou non mais il doit toujours être disponible pour tout acheteur. Il serait intéressant et utile de revisiter la stratégie du Président Senghor pour l’équipement du monde rural en matériel agricole des années 60 à 70 ;

- Le Sénégal a suffisamment de terres et de cheptel pour nourrir tous les citoyens. Cependant, sans intrants en quantité et en qualité, la production de ces terres et du cheptel sera toujours insuffisante pour l’atteinte de la sécurité alimentaire. Les intrants constituent un paramètre déterminant pour produire plus de produits agricoles. Une politique de vente permanente d’intrants subventionnés ou non est une condition incontournable pour atteindre la sécurité alimentaire. Riche en phosphore, le Sénégal importe quand même son engrais (Phosphates de Thiès, de Taïba, de Matam). Cela est inexplicable et même inacceptable si nous voulons développer notre pays ;

- Le Sénégal est un pays à vocation agricole à cause de ses vastes terres arables. Avec de bonnes semences, des intrants disponibles, des paysans bien encadrés et bien équipés, notre agriculture peut se hisser assez rapidement au niveau de celles des pays émergents en termes de productivité et de qualité des produits. La loi sur le domaine national n’est pas un facteur limitant de l’agriculture familiale. Cependant, elle ne favorise pas l’accès des femmes aux terres et pour cette raison elle doit être réformée. Le sous secteur de l’élevage est aussi défavorisé par cette loi. Les terres utilisées pour le pastoralisme sont considérées comme des terres non valorisées. C’est cette vision qui fait que l’agriculture est en train de s’emparer des terres jadis dédiées à l’élevage. Ainsi, le pastoralisme qui est le système d’élevage pratiqué dans la zone Sahélienne (Tchad, Niger, Mauritanie, Burkina Faso, Mali, Sénégal) est en difficulté au Sénégal : rétrécissement des zones de pâturage, marigots et lacs inaccessibles,…

Le projet de réforme du foncier rural en cours devrait prendre en compte la nécessité de faire cohabiter l’agriculture familiale, l’agrobusiness et l’élevage dans le respect des besoins de développement de chaque sous secteurs ;

- Pour une augmentation durable de la production agricole, en aval, il doit exister un tissu d’industries agroalimentaires dynamiques et compétitives pour la transformation des produits agricoles en produits manufacturés variés pour satisfaire la demande des consommateurs. Une bonne politique agricole devra allier production et transformation, les 2 devant aller toujours ensemble. Au Sénégal, très peu d’industries utilisent les matières premières locales. Exceptées la CSS, La Laiterie du Berger, les huileries, les Industries de conservation et de transformation des produits de la pêche, les Industries Alimentaires Sénégalaises fonctionnement avec des matières premières importées. Un pays peut-il se développer dans ces conditions ? Le PSE doit inverser cette réalité du moment. La filière arachidière est menacée avec la Suneor qui semble prendre le chemin de la faillite. Depuis 2009, nous alertons les pouvoirs publics sans résultats sur la mauvaise politique de cette huilerie. Il nous semble urgent d’organiser les assises des industries alimentaires qui doivent tirer l’agriculture et l’agriculture tirer à son tour l’économie nationale ;

- Les pays en insécurité alimentaire ont tendance à négliger la commercialisation des produits agricoles. C’est une grosse erreur, souvent une des causes des échecs des politiques agricoles. Sans un système de commercialisation fiable, juste, les producteurs sont mal rémunérés. Ils se découragent alors et la pauvreté s’installe dans le monde rural. La commercialisation est un maillon de la chaîne de valeur qui booste la production agricole si elle est fondée sur des textes clairs, justes et opérationnels. Un mauvais système de commercialisation plombe toute la chaîne de production et appauvrit les acteurs (producteurs, transporteurs, stockeurs). Le Sénégal a beaucoup de progrès à faire dans ce domaine notamment pour la commercialisation de l’arachide et du riz. Le Ministère du Commerce devrait prendre en charge la totalité de la commercialisation de tous les produits agricoles sans exception, le Ministère de l’Agriculture gardant la production seulement.

Approvisionnement en produits alimentaires

Pour garantir aux populations des approvisionnements sécurisés en produits alimentaires, les Etats doivent mettre en place des infrastructures de stockage de capacité suffisante pour recueillir la production agricole. Ce dispositif va permettre une commercialisation des produits garantissant leur disponibilité pour les consommateurs avec des prix rémunérateurs pour les producteurs. Le Sénégal, pays en insécurité alimentaire, se caractérise par une production non seulement insuffisante pour les principaux produits alimentaires mais également ne dispose pas suffisamment d’infrastructures de conservation adaptées.

Une politique visant l’augmentation de la production agricole doit donc, en aval, investir dans la construction d’infrastructures de stockage et de conservation à la hauteur.de la production nationale. Pour un bon usage des infrastructures, il est également indispensable de construire un réseau de pistes de production suffisamment dense pour l’acheminement des produits vers les lieux de conservation et de transformation.

Au Sénégal, le manque d’infrastructures de conservation et de stockage de certains produits importants est un handicap pour leur autosuffisance à cours terme. Il s’agit du riz, du lait, de l’oignon et de la tomate. Beaucoup d’efforts sont consentis pour la production de ces produits notamment le riz mais leur autosuffisance ne sera atteinte que si un effort important est également consenti pour la construction de magasins adaptés pour leur conservation dans les meilleures conditions.

Sécurité sanitaire des aliments

Il ne suffit pas de mettre à la disposition des populations des aliments en quantité suffisante à tout moment mais il faut que ces aliments soient salubres, autrement dit, la consommation de cette nourriture ne doit pas provoquer une maladie chez le consommateur.

Les aliments insalubres sont à l’origine, selon les estimations, de 2 millions de décès par an dont de nombreux enfants. Ils sont responsables de plus de 200 maladies, allant de la diarrhée aux cancers.

La sécurité sanitaire des aliments est une mission régalienne des Etats. Elle englobe toutes les mesures destinées à proposer des aliments aussi sûrs que possible. La protection des consommateurs nécessite la mise en place d’une politique de gestion préventive et corrective de l’innocuité des aliments s’étalant du râteau au bol. Les politiques et les mesures appliquées en la matière doivent porter sur toute la chaîne alimentaire: production, transport, conservation, transformation, commercialisation, préparation.

Pour garantir aux consommateurs que les produits mis à leur disposition sont sains et sûrs, une politique de formation et de sensibilisation des acteurs aux bonnes pratiques s’impose. Cette politique doit être encadrée par des normes et textes juridiques pour contrôler le respect du système et sanctionner éventuellement les brebis galeuses.

Quelque soit la performance de la politique préventive sur la salubrité des aliments, manger est toujours un risque pour le consommateur. C’est pourquoi, les Etats doivent mettre en place des moyens de contrôles des aliments produits localement ou importés mais aussi disposer d’un système d’analyse des risques sanitaire des aliments.

Le Sénégal est en train de mettre en place des structures et des équipes d’experts pour assurer aux consommateurs que les aliments mis à leur disposition sont salubres. C’est ainsi que la cellule Codex Alimentarius a été réhabilitée et transformée en Comité National du Codex Alimentarius (CNCA). Un Conseil Interministériel a été organisé pour camper les grandes orientations de la politique nationale sur la sécurité sanitaire des aliments.

Le CNCA et les partenaires du Sénégal (FAO, UE) en collaboration avec les laboratoires spécialisés en sécurité sanitaire des aliments (ITA, IP, CERES LOCUSTOX, LAE, LDCI), des Universités et Ecoles (UCAD, UGB, ESP, EISMV), des services techniques compétents de l’Etat (CAP, DPI, DPM, DCI, ASN, DPV, Direction de l’Elevage), des associations de consommateurs (ASCOSEN, UNCS, SOS Consommateurs) et des experts nationaux en sécurité sanitaire des aliments sont en train de mettre en place la stratégie nationale de prise en charge de la sécurité sanitaire des aliments.

Plusieurs séminaires de capacitation ont été organisés à l’intention des acteurs impliqués dans l’analyse des risques et de la gestion de la sécurité sanitaire des aliments. Le Sénégal a actuellement les moyens de procéder à l’analyse et à la gestion des risques liés aux aliments à la moindre alerte.

Sécurité nutritionnelle des aliments

Ce volet de la sécurité sanitaire des aliments est très important. Les aliments mis à la disposition des consommateurs doivent être suffisants mais également nutritifs. Le consommateur doit trouver dans l’aliment consommé les éléments indispensables pour satisfaire ses besoins de maintien et de production. Le manque de nourriture et/ou la carence des aliments en nutriments, vitamines, minéraux et autres entraine la mal nutrition avec ses conséquences désastreuses sur la santé des populations. La politique visant la sécurité alimentaire doit tenir compte de la nécessité de veiller à la diversité des produits pour une alimentation équilibrée des populations.

L’assurance d’une bonne nutrition passe nécessairement par une alimentation équilibrée. Les politiques d’autosuffisance en ceci ou en cela doivent tenir compte de la nécessité de mettre à la disposition des consommateurs une alimentation diversifiée. Historiquement, l’homme a toujours cherché à manger diversifié donc équilibré. Le modernisme, l’urbanisation et la pauvreté sont en train de faire changer le mode d’alimentation des populations. Une sensibilisation motivée des consommateurs peut aider à lutter contre la malnutrition qui est très répandue au Sénégal notamment en milieu rural en cette période de saison sèche.

L’objectif d’atteindre l’autosuffisance en riz est louable et doit être encouragé et soutenu. Cependant, les autres céréales ne doivent pas être négligées. La consommation massive et unique de riz au Sénégal n’est pas souhaitable. Un grand effort doit être fait pour réhabiliter les autres céréales traditionnelles, qui, associées au riz, contribueraient à garantir aux consommateurs une alimentation équilibrée.

L’Etat du Sénégal est conscient que la malnutrition a des conséquences très graves sur la santé des populations et en conséquence sur le développement du pays. C’est pourquoi une Cellule de Lutte Contre la Malnutrition a été créée et a pris en charge la malnutrition au niveau national. C’est sous son autorité que certains aliments sont fortifiés en différents éléments et vitamines et des campagnes de supplémentations organisées à travers le pays.

On a souvent tendance à confondre la sécurité alimentaire à l’autosuffisance alimentaire et même à la souveraineté alimentaire. Ces expressions sont différentes même si elles ont des choses en commun.

L’autosuffisance alimentaire

L’autosuffisance alimentaire est la capacité de satisfaire tous les besoins alimentaires d’une population par la seule production nationale. Elle peut se révéler en pratique dangereuse pour un pays dans la mesure où elle le met à la merci du moindre aléa climatique qui grèverait ses récoltes.

La sécurité alimentaire est un concept plus vaste que l’autosuffisance alimentaire dans la mesure où elle inclut la possibilité de jouer sur les capacités d’importation d’un pays et non pas seulement sur la production nationale.

L’unique objectif de la sécurité alimentaire est de satisfaire, dans les meilleures conditions de production possibles, à l’ensemble des besoins alimentaires de la population alors l’autosuffisance alimentaire vise l’indépendance du pays par rapport à l’extérieur pour l’alimentation que des populations. A notre avis, aucun pays, dans ce contexte de mondialisation des productions et du commerce, ne peut atteindre l’autosuffisance alimentaire.

La souveraineté alimentaire

La souveraineté alimentaire est un concept développé et présenté pour la première fois lors du Sommet de l’alimentation organisé par la FAO à Rome en 1996.

Il est présenté comme un droit des populations, de leurs Etats ou Unions, à définir leur politique agricole et alimentaire, sans dumping vis-à-vis des pays tiers

A l’inverse de la sécurité alimentaire, la souveraineté alimentaire a donc une orientation beaucoup plus politique dans la mesure où elle se traduit par le droit pour un pays de mettre en place les politiques agricoles les mieux adaptées à leurs populations pour atteindre la sécurité alimentaire, en garantissant des approvisionnements via la production locale et des mécanismes de protection (droits de douane…). La souveraineté alimentaire a également des objectifs sociopolitiques tels que l’accès à la terre pour les paysans pauvres.

Les objectifs du PSE et les bourses familiales sont des outils de lutte contre l’insécurité alimentaire. Bien menés, les projets d’autosuffisance en riz, de relance de la filière arachidière et de la culture du mil mais également de l’augmentation de la production laitière devraient permettre de baisser très significativement le nombre de personnes en insécurité alimentaire au Sénégal. Dans cette dynamique du PSE, une mise en place d’une politique nationale agricole, respectant la spécificité des terroirs, devrait constituer un liant entre tous les projets de développement agricole lancés à travers le pays.

Pr. Demba SOW
Docteur Centralien Paris
Ecole Supérieure Polytechnique de l’UCAD