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Le Joola :13 ans après ?


Rédigé par leral.net le Mercredi 30 Septembre 2015 à 00:06 | | 0 commentaire(s)|

Le Joola :13 ans après ?
Treize ans après le triste naufrage, ce que je peux retenir de cet évènement ? Ce qui revient constamment à mon esprit lorsqu’on évoque le Joola : injustice et laxisme.
Beaucoup d’encre a été utilisé pour expliquer le comment et le pourquoi de cette tragédie. Je n’y reviendrais pas. Mais ce que je retiens, en mettant de côté les responsabilités concernant l’état du bateau, que ceux qui étaient informés n’ont pas agi, en mettant aussi de côté le fait qu’il était chargé à plus de 3 fois sa capacité, est que les victimes n’ont été secourues par personne ! Sachant que jusqu’au petit matin, et même beaucoup plus tard, puisqu’un enfant a réussi à sortir du bateau seul vers 11 heures, beaucoup de victimes auraient pu être sauvées. Cela m’attriste, mais surtout me révolte !‘’Beaucoup de victimes auraient pu être sauvées. Mais elles n’ont été secourues par personne ‘’
En 2002, le Sénégal a connu une grande tragédie avec le naufrage du bateau «Le Joola». 11 ans déjà que ce drame a eu lieu, les Sénégalais n’ont toujours pas fait une introspection, afin de tirer les leçons de ce drame, de manière à pouvoir éviter les erreurs initiales. D’où la recrudescence d’accidents mortels, pendant ces dernières années.
Le navire qui assurait la liaison entre la capitale sénégalaise et la région naturelle de Casamance, nommé le MS «Le Joola» avait sombré dans la nuit du 26 au 27 septembre 2002, en provoquant la mort de près de 2 000 personnes. Cette tragédie, la pire de l'histoire du Sénégal, et aussi un des naufrages les plus tragiques du monde. Alors qu'il était conçu pour transporter 550 passagers, «Le Joola», ce jour-là, avait à son bord plus du triple de ce qui était prévu. Ce qui fait que, surchargé, l’embarcation s’est retournée au large des côtes gambiennes, à la suite d’une violente tempête.
Aujourd’hui, les Sénégalais semblent oublier cette tragédie vécue, il y a de cela 11 ans seulement. Les transports en commun et les camions qui transportent les marchandises ne respectent toujours pas les règles éléments du Code de la route. Mettant ainsi la sécurité de leurs passagers en danger. Le mauvais comportement des conducteurs et surtout celui des transporteurs en commun, doublé d’une indiscipline notoire, sont en grande partie la cause de plusieurs accidents de la circulation avec des pertes en vie humaine.
À côté de cela, il faut aussi déplorer les effondrements d’immeubles récurrents dans l’ensemble du territoire sénégalais. En effet, depuis quelque temps, il a été constaté l’effondrement des immeubles, soit en construction, soit en état de délabrement avancé. Mais, dans les deux cas, des pertes en vie humaine sont enregistrées. Le dernier en date est l’effondrement, au mois de juillet dernier, d’un immeuble sis à l’unité 26 des Parcelles assainies où une dame a été grièvement blessée. Auparavant, en mars 2013, un immeuble à Ouakam s’est effondré et a fait trois morts. Toutes ces catastrophes enregistrées, ces derniers mois, montrent que les Sénégalais n’ont pas encore tiré de leçons de ce qui s’est passée avec «Le Joola».
Survenu aux larges des côtes gambiennes, dans la nuit du 26 septembre 2002, le naufrage du ferry le Joola a fait plus de 1800 morts. Plus grande catastrophe de l’histoire maritime de l’humanité. Douze ans après, jour pour jour, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts entre les parents des victimes, rescapés et l’Etat qui à leurs yeux tarde encore à respecter certains de ses engagements. Ces derniers dénoncent les lenteurs et le manque de soutien de l’Etat à l’endroit des orphelins et des rescapés.
« Comme un cri » : exorciser le naufrage du Joola
Comme un cri, on revient sur le drame du Joola et pointe une nouvelle fois la responsabilité des autorités sénégalaises. Rejouer l’inclinaison lente, fatale, de ce navire surchargé qui se retourna le 26 septembre 2002 à 40 km au large, causant la mort de près de 2 000 passagers.
Si la tragédie est particulièrement éprouvante, c’est qu’elle s’appuie sur le témoignage douloureux de l’un des 64 rescapés de cet accident tragique. Cet homme est un Français vivant au Sénégal qui s’appelle Patrice Auvray, d’autant plus meurtri qu’il a perdu sa compagne dans le naufrage. De son propre aveu, il rejoue inlassablement le drame, tente de se remémorer ses moindres détails pour faire en sorte qu’il ne tombe pas dans l’oubli. Il a ainsi publié dix ans après la tragédie
Témoignages terribles, troublants, que les autorités sénégalaises ont pendant longtemps tenté d’étouffer.
Black-out
"Tout a été fait dans le pays pour conclure à un non-lieu, accuse Patrice Auvray. Le capitaine du bateau est censé avoir disparu dans le drame… Opportunément, on lui a mis toutes les responsabilités sur le dos. Aucune enquête sérieuse n’a été menée. Quant à nos témoignages de survivants, les médias en ont diffusé le moins possible, il y a eu un black-out total de l’information." Le rescapé a eu le plus grand mal à trouver un éditeur. Et depuis que son livre existe, il n’a jamais pu le présenter à l’Institut français de Dakar. La pièce non plus ne devrait pas être jouée dans l’établissement, pour ne pas froisser l’État sénégalais. Qu’est ce qui est à l’origine de cette absence de secours ?
Les victimes n’ont été secourues par personne ! Secourues par personne ! Ni par ceux que nous payons pour assurer notre protection, ni par la France qui en avait les moyens matériels… Par personne ! Et tous les prétextes avancés pour justifier cette non action sont déplacés, hypocrites, inhumains. Chaque fois que j’exprime cette révolte, des amis me disent « Rien ne sert de pleurer sur le lait renversé… » .Il est difficile de revenir en arrière, mais les sénégalais ont –ils tirés les leçons de cette tragédie pour l’avenir ?
Les sénégalais se sont dits après le Joola ‘’ Plus jamais ça’’. Malheureusement ce slogan est resté slogan et ne s’est jamais traduit dans leurs conduites. Peut-être le temps d’enterrer les victimes. Nous citoyens sénégalais, nous n’avons rien tiré comme leçon de ce triste épisode car l’incivisme demeure dans notre comportement au quotidien, l’irrespect des codes de sécurité est flagrant à tous les niveaux. En simples exemples :
• Sur la route, les chauffeurs font fi de toutes les règles élémentaires de sécurité : respect des feux, utilisation des clignotants, respect des priorités et tout cela au vu et au su des autorités compétentes qui sont pourtant là !! Tenez, ces jours-ci, j’ai vu les cars de Dakar Dem Dik, géré par un Etat sensé nous protéger dans une situation de délabrement inquiétant. Comment passent-ils les visites techniques ? Devons-nous soulever un autre problème, celui des passe-droits et arrangements qui conduisent également à des évènements tragiques ?
• Combien de fois avons-nous vu des personnes traverser sur l’autoroute en sautant par-dessus le parapet plutôt que d’emprunter le pont destiné à cet effet qui est juste au-dessus !
• Sans compter les autorisations de construction délivrées pour des habitations qui ne sont pas aux normes et, ou dans des zones inhabitables….
Aujourd’hui, 13 ans après le naufrage du Joola, nous en sommes au même point en termes de respect des normes de sécurités !‘’Nous n’avons rien tiré comme leçon de ce triste épisode car l’incivisme demeure’’
Il faut dire que le livre comme la pièce pointent directement du doigt les autorités politiques de l’époque. Et posent d’importantes questions. Comment a-t-on pu faire monter 2 000 personnes sur ce bateau, alors qu’il était conçu pour en transporter quatre fois moins ? Pourquoi les secours français ont reçu l’ordre d’attendre avant d’intervenir, condamnant à mort les centaines de personnes se trouvant sous la coque du navire retourné ? Comment expliquer que les pirogues et les chalutiers, pourtant à quelques kilomètres du Joola lors du drame, n’ont pas non plus porté secours aux victimes plus rapidement ? Les sénégalais ont-ils oublié le Joola ?
Chaque fois qu’un évènement tragique survient (crash de scooter, incendie de véhicule de tourisme, accident de cars rapides – dire que cars rapides et ndiaga ndiaye sont hors d’âge est un truisme !!!! – effondrement d’immeubles…), nous nous souvenons et évoquons le Joola, mais nous ne faisons rien de plus. Nous, nos enfants, parents, amis, victimes du Joola ou pas, méritons mieux !
Le tableau que vous dressez est noir : Que faire ?
Nous devons impérativement bousculer nos habitudes laxistes, tout d’abord par une campagne de communication agressive initiée par les autorités, médias et organismes compétents, ensuite par une réelle présence dissuasive des forces de l’ordre, et même si pour cela la sanction doit être de mise !
‘’Arrêtons de rejeter le tort sur l’autre, de dire l’enfer c’est les autres et de dire « Il a décidé ». Devenons adultes et responsables’’
Qu’est-ce-qui explique ce laxisme ?
Le paraître est la première chose qui prime au Sénégal pourtant toutes et tous savons qu’aucune civilisation ne s’est construite grâce à l’apparat et au clinquant ! Certains de nos voisins nous l’ont prouvé et pourtant… ils étaient très loin de notre potentiel de développement. Arrêtons de rejeter le tort sur l’autre, de dire l’enfer c’est les autres et de penser « Il a décidé, Yalla mo ko déf ». Devenons adultes et responsables ! Nous le devons aux victimes emportées par la chaine de négligences et de dilettantisme ayant conduit au naufrage du Joola !
Selon Patrice Auvray, le gouvernement sénégalais de l’époque et l’ex-président Wade portent une lourde responsabilité. "L’arrivée au pouvoir de Macky Sall a délié les langues, certains rescapés osent aujourd’hui témoigner", note l’auteur. Mais le naufrage du Joola reste un drame tabou. Aucun procès sérieux n’a permis de rendre justice. Seul un monument commémoratif, à Ziguinchor, aujourd’hui à l’état d’abandon, rappelle la date anniversaire de l’événement. Et Patrice Auvray, qui, de livre en pièce, tente d’exorciser la catastrophe, de faire remonter à la surface les tragiques événements de 2002.
A mon avis, on n’a pas encore tiré toutes les leçons de cette tragédie sinon comment comprendre la récurrence de certains actes comme les effondrements de bâtiments dans l’ensemble du territoire national, le laxisme des chauffeurs avec le lot d’accidents mortels sur les routes relatés quotidiennement par les médias. Si les leçons ont été prises, les normes sécuritaires seront de rigueur partout, le désenclavement de la Casamance serait le seul axe prioritaire de l’Etat en multipliant les infrastructures déjà réceptionnés ; créer des liaisons aériennes Dakar-Ziguinchor en plus de ce qui existe déjà en réduisant les tarifs qui demeurent élevés pour la quasi-totalité des populations ; l’avion ne doit plus être un luxe mais un moyen de transport comme les autres.

Dr. Daouda BADJI

Cf : Comme un cri, de Patrice Auvray, au théâtre Les déchargeurs, à Paris, jusqu’au 21 mars. www.lesdechargeurs.fr