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Le Roi Mohammed VI et le destin africain du Maroc (Par Lahcen Haddad)


Rédigé par leral.net le Vendredi 3 Février 2017 à 12:48 | | 0 commentaire(s)|

Le Maroc africain défie la notion du temps et de temporalité. Mais les historiens pensent les faits en relation avec le temps. Tribune de Lahcen Haddad, député et ancien ministre marocain du Tourisme.
 
Comme diraient les philosophes, le Maroc a été toujours "déjà africain". Le Maroc africain défie la notion du temps et de temporalité. Mais les historiens pensent les faits en relation avec le temps. Les faits abondent mais ceux qui sont décisifs, ces moments fondateurs de l'Histoire, une histoire d'appartenance, de complicité culturelle et spirituelle, d'échanges économiques, de mouvement des biens et des personnes, a commencé avec les débuts, au temps des royaumes Amazighs et ceux des Maures.
 
Le commerce via Sijilmassa et les tournées des Oulémas soufis et sunnis au long et au large du Soudan de l'Ouest, l'arrivée au Maroc des Almoravides à partir de l'Est de la Mauritanie et la montée de l'almohadisme triomphal en Andalousie, au Maghreb et au Sahara vont sceller à jamais ce Ribat séculier et spirituel entre Marrakech, Fez et Sijilmassa d'une part et les villes des empires de Mali, du Ghana et du Songhay d'autre part.
 
Les Saadis renforceraient ce lien via un commerce triomphal et un charfisme renouvelé surtout que les Ottomans attendaient impatiemment aux portes de Telemcen et Oran pour compléter une marche vers l'Ouest qui ne s'est jamais matérialisée. Les chérifs Alaouites capitaliseraient sur l'avantage des échanges avec l'Afrique Saharienne, un sens hagiographique de descendance, et une solidarité multi-ethnique pour redéfinir l'ancrage du Maroc dans son élément et espace, en tant que continuation du Soudan de l'Ouest, et base du Nord de ce mysticisme islamique qui se profilait dans les contrées à influence Tijanne depuis la fin du dix-huitième siècle.
 
Ce bref détour par l'histoire depuis l'Antiquité et le Moyen Age était pour faire réconcilier d'une part l'ancrage de l'espace marocain dans son africanité (une africanité qui a toujours été déjà là au sens philosophique du terme) avec, d'autre part, l'Histoire, ces faits têtus, inébranlables et irréversibles !
 
Destinée commune
 
La période coloniale visait la dispersion de cette destinée commune des peuples d'Afrique. Mais elle les a rapproché même dans l'absurdité, voire la violence arbitraire, de l'acte colonial lui même. Les soldats Saliganes au Maroc, le Roi Mohamed V et la famille royale en exil forcé à Antistabé, la visite de Mandela au camp d'entraînement des combattants de l'ANC au Maroc, le soutien marocain à la Révolution algérienne, l'accueil de Cabral et son parti de libération au Maroc, le passeport marocain de Agostino Neto qui fuyait l'oppression de Salazar au Portugal. Ces quelques exemples, parmi tant d'autres, de l'acte colonial et de la réaction africaine, renouaient avec l'histoire, avec ce destin commun scellé au fil du temps par les peuples africains.
 
Tout comme la lutte anti-coloniale, la reconstruction des Etats-nations, et l'héritage post-colonial, l'unité africaine n'as pas été une œuvre complète et achevée depuis le début. Des velléités héritées depuis la guerre froide, des malentendus géostratégiques ont poussé un Maroc fondateur d'une Afrique qui s'unifiait à quitter le siège sans pour autant tourner la face à l'histoire, à l'héritage commun, à la destinée de l'espace et de l'appartenance.
 
En attendant, des liens plus solides, plus forts, plus durables se tissaient entre un Maroc guidé par un Roi jeune, dynamique, visionnaire et "africain, trop africain" (comme dirait Nietzsche), et des états africains conduits par de nouveaux leaders, bâtisseurs, démocrates, modernes et qui œuvrent avec doigté pour que leurs pays rompent avec un passé colonial et post-colonial traumatisant !
 
Modèle africain
 
Un millier de conventions signées, des politiques d'échanges qui s'installent, des mécanismes de financement et d'investissement voient le jour, l'héritage culturel commun revisité, un roi qui redonne confiance aux africains en les incitant à être encore une fois fiers d'être africains... bref un modèle propre aux africains est en train de voir le jour, et ses principaux acteurs sont ces leaders qui renouent avec le rêve africain, le ressuscitent et veulent le voir grandir pour devenir une réalité aussi grande que l'histoire, que la terre africaine riche des ses peuples et de la diversité de ses cultures.
 
C'est pourquoi à Addis-Abeba la semaine dernière, le Roi du Maroc, avec ses frères africains et sœurs africaines, ont célébré ces retrouvailles historiques qui prouvent que l'Afrique à été toujours et sera toujours au rendez-vous. L'Histoire, selon Hegel, est la marche du Peuple et son Esprit vers un État qui met fin à l'Histoire. Les leaders africains marchent tous et maintenant, vers un destin commun qui reflète les aspirations des peuples africains pour un avenir meilleur, des Etats bien gouvernés, des générations fières de leur africanité ! C'est le rêve africain de Mohamed VI et de ses frères et sœurs de toute l'Afrique qui se voit renforcé, voire renouvelé, par la volonté d'aller de l'avant, de tourner la page et vivre l'espoir à bras ouverts.
 
 Par Lahcen Haddad, Député
et ancien ministre marocain du Tourisme