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Le missile de croisière naval, nouvelle arme stratégique pour le chef de l’Etat français

Rédigé par leral.net le Samedi 14 Avril 2018 à 14:29 | | 0 commentaire(s)|

La France a riposté à l’attaque chimique de Douma en tirant, pour la première fois, des missiles de croisière navals. Une arme très politique, destinée à frapper un objectif fortement défendu.


Le missile de croisière naval, nouvelle arme stratégique pour le chef de l’Etat français
Le président Emmanuel Macron a ordonné, dans la nuit de vendredi 13 à samedi 14 avril, le tout premier tir opérationnel d’un missile de croisière naval, contre les installations chimiques du régime de Bachar Al-Assad, en Syrie. Pour la marine nationale, cette nouvelle arme constitue « une rupture ».
 
Complémentaire du missile Scalp (système de croisière conventionnel autonome à longue portée) des forces aériennes, le missile de croisière naval (MDCN) est considéré comme « une arme stratégique », très politique, qui permet, de la mer, des « frappes dans la profondeur » à terre, soit à très longue distance et avec une grande précision.
 
Jusqu’à présent, les Etats-Unis et le Royaume-Uni avec les missiles Tomahawk, la Russie avec les Kalibr, étaient les principaux pays maîtrisant cette capacité militaire. Les Tomahawk avaient ainsi « ouvert » au début de 2011, le théâtre libyen, après une première passe des avions de chasse français, pour supprimer les défenses antiaériennes du régime de Mouammar Kadhafi – 124 missiles lancés de sous-marins américains et britanniques. Les Kalibr ont, eux, permis à Moscou de faire une entrée tonitruante, à la fin de 2015, dans le conflit syrien : une salve de 26 missiles avait été tirée de destroyers en mer Caspienne.
 
Une démonstration politique
 
En France, l’emploi du MDCN et les cibles choisies sont, comme pour le nucléaire, étudiés au plus haut niveau : celui du chef de l’Etat. Après avoir rappelé à plusieurs reprises les « lignes rouges » de l’emploi de l’arme chimique en Syrie, Emmanuel Macron fait ainsi une démonstration politique sur le théâtre syrien.
 
La marine avait jugé que de tels missiles lui manquaient lors de la guerre du Kosovo, en 1999. Un de ses sous-marins d’attaque avait bien été placé devant les bouches de Kotor pour bloquer la marine serbe, mais les frappes à terre revenaient aux alliés, américain et britannique. La décision de lancer un programme a été prise en 2001. Les essais ont commencé en 2012, et l’arme a été validée en 2015. Les MDCN équipent les nouvelles frégates multimissions (Fremm), qui peuvent en emporter seize. Trois Fremm, dont l’Aquitaine, ont été engagées au large de la Syrie. C’est elle qui a tiré le 14 avril.


« C’est une arme qui a une valeur politique importante, employée contre un objectif qui a lui-même une valeur politique et qui est donc fortement défendu », explique-t-on à l’état-major de la marine. Le missile a des capacités redoutables. Il peut partir horizontalement sous l’eau, avant de suivre une trajectoire verticale en l’air, puis de tracer une courbe à très longue distance, de l’ordre de 1 000 kilomètres – soit un vol de plus d’une heure.
 
Un missile d’une « précision métrique »

Le MDCN peut voler à très basse altitude en suivant les reliefs du terrain et éviter ainsi les défenses antiaériennes braquées vers le ciel. Selon la marine, il a « une précision métrique ». Et il est « possible de doser ses effets, en charge comme en capacité de pénétration ». Il est conçu pour frapper un immeuble à chaque étage, puis pénétrer dans son sous-sol. En Syrie, l’enjeu était d’accumuler le renseignement suffisant, pour calculer la trajectoire du missile : il fallait connaître précisément le relief, les lignes électriques jalonnant le parcours, les installations chimiques elles-mêmes, l’emplacement des défenses aériennes.
 
Dans la doctrine française, le missile, arme rare et chère, n’est pas conçu comme un outil de frappes massives. « Pour les Américains, le but est de détruire les capacités de commandement et de défense aérienne d’un pays, il faut de l’ordre de 100 missiles par bateau pour cela. Pour la France, l’objectif est de produire une brèche dans une crise, de créer un point de bascule », explique-t-on à l’état-major de la marine.
 
L’armée devait en recevoir 90 exemplaires entre 2014 et 2019, puis 60 autres entre 2020 et 2025, le programme total portant sur 250 armes, pour 2,5 milliards d’euros. L’acquisition a été réduite à 150 exemplaires d’ici à 2020. En 2019, les MDCN seront également testés par les nouveaux sous-marins nucléaires d’attaque Barracuda, qui emporteront 22 armes à bord.
 
 


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