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Les Sénégalais malades de la gestion chaotique de leur système de santé

« La façon dont les systèmes de santé sont conçus, gérés et financés influent sur la vie des gens et sur leurs moyens de subsistance. La différence entre un système de santé efficace et un système défaillant se mesure aux décès, aux incapacités, à l'appauvrissement, à l'humiliation et au désespoir qui en résultent ». Cette assertion du Dr Gro Harlem Brundtland, ancien Directeur Général de l’OMS doit être profondément méditée par nos dirigeants actuels. Cette réflexion prononcée au moment où le Sénégal venait d’entamer l’exécution de son Plan National de Développement Sanitaire pour une durée de dix ans (1998/2007, programme qui prévoyait des réformes profondes du secteur de la santé pouvant permettre une amélioration de la santé des populations sénégalaises.


Rédigé par leral.net le Mercredi 6 Janvier 2010 à 23:49 | | 1 commentaire(s)|

Les Sénégalais malades de la gestion chaotique de leur système de santé
Au terme de ce programme décennal qui coïncide avec l’anniversaire des 10 ans de l’alternance, le constat est amer pour les populations qui n’ont jamais autant souffert, au plan social et au plan économique. Les Sénégalais sont de plus en plus malades et ont du mal à faire face aux coûts des soins de santé. Les causes de cette situation peuvent être analysées sous différents aspects :

Une instabilité institutionnelle caractérisée

Dix changements de ministres en 10 ans (un ministre par an ! De tous ces ministres nommés un seul avait commencé à réussir sa mission, il s’agit du Professeur Awa Marie Coll Seck. Elle a été remerciée pour sa neutralité politique et sa forte personnalité, au profit de politiciens dont la plus part n’ont aucune connaissance du système de santé. Le Ministère chargé de la Santé est le ministère le plus instable de la République, au plan institutionnel.

Des soins et médicaments inaccessibles aux plus démunis

L’inaccessibilité des soins est d’ordre géographique.et financier Au niveau rural, les structures de santé publiques sont très éloignées. Les médicaments sont inaccessibles aux Sénégalais. Les personnes démunies hésitent souvent, avant d’aller voir le médecin pour faire diagnostiquer le mal qui le ronge, de peur de découvrir leur maladie et de ne pouvoir payer les médicaments qui leur seront prescrits. Selon les pharmaciens interrogés, des patients payent souvent une partie des médicaments prescrits en promettant de revenir. Les soins, au niveau des structures hospitaliers, sont trop élevés. Un long séjour à l’hôpital ou un long et couteux traitement peuvent faire basculer facilement un ménage dans la pauvreté.

Des insuffisances dans la planification des ressources humaines et leur distribution

Les structures de santé publiques ont un déficit criard en ressources humaines de qualité et un personnel non qualifié pléthorique. Le personnel existant est mal réparti car certaines catégories de personnels refusent systématiquement d’aller travailler en zone rurale. On trouvera rarement une sage femme dans une localité éloignée. Dans les zones rurales et semi-urbaines se faire consulter par un spécialiste est une gageure car, de spécialistes, il n’y en a point dans la plupart des structures publiques.

La recrudescence des maladies transmissibles et le développement et des maladies chroniques

Depuis quelques années l’on assiste, au Sénégal, à la recrudescence de certaines maladies transmissibles que sont le choléra et la tuberculose qui sont devenues endémiques. Les populations sont aussi de plus en plus confrontées aux maladies chroniques à soins coûteux que sont le cancer, l’insuffisance rénale et le diabète. Les maladies cardiovasculaires sont de plus en plus fréquentes.

La persistance de la forte mortalité maternelle et infanto-juvénile

Le lot quotidien de la femme sénégalaise est de perdre la vie en donnant la vie ou de perdre son enfant dès les premiers jours ou dans la première année de sa naissance. Que d’espoirs brisés par la faute d’un système de santé défectueux : éloignement de la structure de santé, absence d’ambulance, accouchement par une matrone aux compétences très limitées, accouchements de nuit à la lumière d’une bougie etc. La mortalité néonatale est encore très élevée, plus de la moitié des décès survenus avant l’âge d’1 an, interviennent avant le 28ème jour. L’insuffisance de prise en charge des soins post natals participe à l’aggravation de ce phénomène.

La mauvaise organisation du système de santé

Le système de santé tire son dysfonctionnement d’abord de son organisation administrative. Pour exemple, le décret 2004-1404 du 04 novembre 2004, le dernier qui organise le ministère de la santé, n’a, à ce jour, pas été suivi d’arrêtés d’application ! Les missions des directions, divisions et services régionaux ne sont pas toujours définies par l’autorité, ce qui engendre des conflits de compétences entre certaines directions et certains services. Le dysfonctionnement noté dans l’organisation du système de santé est exacerbé par l’incapacité des responsables du Ministère à régler la question des ressources humaines surtout le déficit en personnel, l’échec de la réforme hospitalière (dette de l’Etat, mauvaise gestion des structures, grèves du personnel soignant, le blocage de la construction des hôpitaux de Ziguinchor et de Fatick depuis 2005, l’absence d’hôpitaux dans les nouvelles régions de Kaffrine, Sédhiou et Kédougou), la faible performance des structures du niveau opérationnel (Centres de santé et Postes de santé), le défaut de maintenance des infrastructures et des équipements, l’absence de considération de l’usager du service public de la santé comme « client » de la structure de santé publique etc.
Une gestion inefficiente des ressources financières

Au terme du PNDS 1998-2007, le secteur de la santé a reçu globalement un financement de 933,2 milliards de F.CFA en provenance de l’Etat 51,00%, les partenaires extérieurs 26,74%, les populations 19,30%) et les Collectivités locales 2,96%). Près de 50% des ressources ont été allouées aux hôpitaux sensés avoir une autonomie de gestion contre 38% aux centres de santé et 3% aux postes de santé et maternités rurales. Les Collectivités locales n’ont joué pas le rôle qui leur est dévolu par la loi sur la décentralisation

Toutes ces lacunes plombent la bonne prise en charge de la santé des populations sénégalaises. Tant qu’on cherchera à les régler avec des politiciens, on n’y arrivera jamais. Un système de santé se gère avec des outils de gestion efficaces que sont la planification des ressources humaines de qualité et des ressources matérielles et financières suffisantes, le suivi et l’évaluation des activités programmées. L’évaluation du personnel doit se faire avec des critères de performance et de résultats bien précis. Les autorités doivent arrêter de faire croire aux populations qu’elles leur accordent des privilèges en prenant certaines décisions. La santé est un droit fondamental reconnu par la Constitution Sénégalaise en son article 8. L’article 17 de ladite Constitution dispose en outre que «…l’Etat et les Collectivités publiques ont le devoir de veiller à la santé physique et morale de la famille et, en particulier, des personnes handicapées et des personnes âgées. L’Etat garantit aux familles en général et à celles vivant en milieu rural, en particulier, l’accès aux services de santé et au bien être… ». L’Etat doit veiller à assurer un système de santé efficace avec comme objectif principal l’amélioration de la santé de la population desservie, en leur permettant d’atteindre le meilleur niveau de santé possible. Le système de santé doit être apte à répondre adéquatement aux attentes des populations et réduire au minimum les écarts entre les individus et entre les groupes, c’est-à-dire assurer à chacun une qualité de soins, sans discrimination (équité). Les Collectivités locales doivent y apporter leur contribution et non se réfugier derrière les fonds de dotation à la décentralisation (FDD) qui proviennent de l’Etat. La santé des gens étant une priorité nationale, il urge de:

Assurer une bonne administration générale du secteur de la santé par sa régulation et son pilotage

Les organisations, institutions et ressources consacrées à la production d’actions doivent viser principalement à améliorer, maintenir ou restaurer la santé. C’est au gouvernement qu’incombe la responsabilité de la performance d’ensemble du système de santé du pays. Le Gouvernement doit assurer le bien-être des populations en prenant des mesures hardies pour renforcer le système de santé et le rendre plus efficace et plus équitable. Une réorganisation du cadre institutionnel s’impose, conformément aux recommandations faites dans le nouveau Plan National de Développement Sanitaire, avec la mise en place d’une structure chargée de la planification, du suivi-évaluation, des études et de la recherche, d’une Direction générale de la santé. Tous les secteurs de la société doivent être impliqués et les questions liées à la l’hygiène, à l’assainissement, à l’approvisionnement en eau potable, aux transports, aux infrastructures et à l’énergie, réglées. Le niveau communautaire doit être renforcé par l’offre des services promotionnels, préventifs et curatifs. Les soins essentiels au niveau communautaire et familial, le partenariat public/privé, la médecine traditionnelle, le système d’information sanitaire et la recherche en santé doivent aussi être renforcés. Il s’agira d’adopter une démarche systémique qui englobe non seulement des interventions visant à renforcer les services de soins de santé, mais également des mesures tout aussi importantes destinées à prévenir les maladies, à promouvoir des modes de vie sains et à influencer positivement les déterminants de la santé.

Produire des ressources humaines et matérielles

La production de ressources humaines en quantité et en qualité est une nécessité si l’on veut développer un système de santé performant. Il est important d’élaborer et de mettre en œuvre un plan de développement des ressources humaines avec l’identification des besoins en personnels (toutes catégories socioprofessionnelles », de renforcer les écoles publiques de formation existantes et d’ouvrir d’autres centres de formation en santé dans les autres régions du pays qui n’en disposent pas, d’établir une concertation permanente avec les Facultés de Médecine et les écoles privées de formation en santé, d’assurer le paiement régulier des salaires des personnels contractuels. Il urge aussi d’instaurer un climat de paix sociale par la concertation permanente avec les représentants des travailleurs et le respect des engagements pris. Des mesures incitatives doivent être prises pour fixer le personnel dans les zones difficiles et reculées. La réflexion sur la possibilité de former les hommes au métier des sages femmes (maïeuticien, parturologue ou accoucheur) doit aussi être faite, de même que sur la possibilité de recruter le personnel médical et paramédical par le Ministère chargé de la Santé, à l’instar du Ministère de l’Education.

S’agissant des ressources matérielles, le matériel et les équipements devront faire l’objet d’une meilleure gestion informatisée. De bons choix doivent être faits en matière de technologie biomédicale. La question de la maintenance doit être réglée par la formation et la contractualisation.



Assurer des prestations de services de qualité

Les services individuels et collectifs doivent être accessibles et efficaces pour satisfaire l’usager et répondre à ses attentes. Il faudra notamment : garantir une couverture maximale de la population en termes d’interventions sanitaires, atteindre les plus pauvres et les personnes socialement vulnérables, mettre en place des mesures visant à améliorer la qualité des soins et l’efficacité de la prestation de services, améliorer et contrôler la qualité, la sécurité et la réactivité des services, promouvoir la gestion adéquate des services axés sur l’usager du service de santé et renforcer l’infrastructure de prestation des services par une facilité d’accès sur le plan physique, culturel et financier.

Assurer le financement adéquat et efficace du secteur

Le financement de la santé doit permettre la mobilisation des ressources nécessaires à la mise en place de mesures de prévention et de prise en charge médicale répondant aux besoins des populations. Le budget du Ministère chargé de la santé doit être porté au moins à 15% du budget national, conformément aux engagements pris par les Chefs d’Etat Africains, lors du Sommet d’Abuja de 2001.

Les autorités doivent veiller à assurer la rigueur et la transparence, en exigeant le respect des procédures de passation des marchés. Les ressources allouées au niveau du district sanitaire doivent être revues à la hausse afin de permettre le relèvement de leur plateau technique et la mise à disposition d’un personnel technique et de gestion qualifié. Chaque région devrait disposer d’un hôpital de niveau 3 et chaque district d’un hôpital de niveau 2. Les coûts des soins et des médicaments doivent être revus à la baisse pour permettre leur accessibilité aux patients. L’accès de tous à la santé doit être un objectif à moyen terme pour le Gouvernement. En attendant, l’atteinte de cet objectif, certaines initiatives doivent être encouragées. Parmi celles-ci, on peut citer le développement de la microassurance santé par le renforcement des mutuelles de santé existantes et le développement de nouvelles mutuelles organisées, suivant des règles de gestion efficaces. Les Institutions de Microfinance devraient toutes proposer des garanties Microassurance Santé à leur clientèle afin de leur éviter d’utiliser toutes ressources financières en cas de maladie. Les assureurs devraient aussi s’impliquer dans l’offre de produits de Microassurance Santé. L’Etat et les Collectivités locales doivent, bien entendu, assurer la prise en charge des plus pauvres, des personnes âgées, des handicapés suivant des critères bien définis. La gratuité de la césarienne devrait être étendue aux femmes pauvres de la région de Dakar.
Des tâches énormes attendent nos autorités mais en sont-elles conscientes si l’on observe la légèreté avec laquelle on désigne et relève les ministres de la santé de leur poste. Les urgences sont difficilement assurées dans les hôpitaux, les femmes meurent en couche, les bébés meurent à la naissance, les enfants et orphelins du Sida rencontrent d’énormes difficultés pour leur survie et leur insertion dans la vie, les personnes âgées voient leurs vies abrégées faute de prise en charge adéquate, les maladies chroniques continuent de tuer et les ménages sont appauvris davantage par les coûts de prestation des soins et des médicaments.

Le Président de la République, lui, construit son monument à coût de milliards ! Notre bien-être, Il n’en a cure !

Mme Penda Ndiaye Cissé

Présidente Commission Santé

ANCP/AFP

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1.Posté par filou le 07/01/2010 10:45 | Alerter
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Je souhaite voir des présidents, ministres, députés et autres sénateurs et leur famille venir se faire soigner dans les hôpitaux de Ziguinchor, Kaolack, Tambacounda.......au lieu d'aller livrer leur corps à l'etranger.

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