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Lettre ouverte à Monsieur le Ministre de la Justice, Me Sidiki Kaba


Rédigé par leral.net le Vendredi 22 Janvier 2016 à 11:01 | | 0 commentaire(s)|

« Le vrai politique, c'est celui qui sait garder son idéal tout en perdant ses illusions. » John F. Kennedy

Monsieur le Ministre,

Je me permets de m’adresser à vous de cette manière la plus ouverte parce que j’ai tous les droits de le faire. Oui Monsieur le Ministre : vous êtes un agent du pouvoir gouvernemental, conséquemment un représentant du peuple. Puisque je suis de ce peuple, vous êtes mon représentant au sein du gouvernement de la République du Sénégal car c’est la logique démocratique qui en a voulu ainsi. Donc je le fais.

Monsieur le Ministre,

Je vous écrits pour vous faire part de ma grande surprise de voir que vous ou votre entourage proche entremêlez votre vie militante et personnelle avec celle de la bonne gestion qu’un « bon » Ministre devrait faire pour les destinées de notre organisation judiciaire.

En effet, le 19 janvier 2016, alors que je menais une recherche documentaire sur les réformes de notre organisation judiciaire, je tombe sur la présentation que le site justice.gouv.sn fait de l’évolution de la carte judiciaire dont la réforme a conduit à la (re) définition d’une nouvelle carte avec la loi n°2014-26 du 3 novembre 2014 portant réforme de l'organisation judiciaire. Jusque là tout est bon. Chapeau !

Hélas ! J’étais ébahi de voir qu’au lieu de rapprocher le justiciable de l’information judiciaire, ce site semble viser plutôt à le rapprocher d’avec l’étroite liaison entre votre parcours professionnel et militant. Pour s’en convaincre, tout lecteur peut consulter ce lien, mis en bas de la note de présentation, qui était sensé nous rediriger vers le fichier PDF de la dite loi mais qui nous mène bon port et de manière propagandiste vers votre Curriculum Vitae.
(Cf : http://www.justice.gouv.sn/sites/default/files/cv_sk_0.pdf)

Monsieur le Ministre,

Je reconnais que vos parcours militant et professionnel peuvent avoir les mérites de l’applaudimètre. Soit. Mais, il serait certes d’une répétition osée que de vous rappeler que la première règle de gestion des biens communs exige, dans son b-a ba, de séparer ses biens d’avec tout autre bien personnel, familial ou militant. Faire le distinguo entre votre vie militante et obligations professionnels, c’est donc ce à quoi les justiciables attendent de vous dans la perspective de mener à bien votre mission de Ministre. D’ailleurs, vous devriez être le mieux informé sur le fait que la bonne gouvernance de toute organisation est un indicateur de performance. Sauf, si votre gouvernance « sobre et vertueuse » veut relever d’une spéciale spécialité digne de la CREI.

Si tel est le cas, Monsieur le Ministre,

Nous vous rappelons, avec Emmanuel KANT, que « Plus l’homme a d’habitudes, moins il est libre et indépendant ». En même temps, nous demanderons qu’est-ce qui de votre indépendance nous permet de concevoir que vous Maître, avocat à l’époque de M. BOURGI dans les accusations portées par la CREI contre votre ex client sur les biens supposés mal acquis devenez du jour au lendemain l’actuel ministre de la justice et accusateur de ce même M. BOURGI. Certainement que le génie de « Laa-Moubarack LO » viendra vous murmurer une réponse. Heureusement que le ridicule ne tue pas car si tel était le cas, on t'aurait certainement perdu de la circulation.

Monsieur le Ministre,

Sachez que si vous êtes détenteur d’un Pouvoir, celui-ci reste rationnel et légal. Et, comme nous l’apprend fort justement Max WEBER, la légitimité de ce type de pouvoir que vous êtes sensé détenir ne peut s’appuyer que sur des lois et des règles qui sont impersonnelles (et donc indépendant de votre personnalité de militant). A cet effet, dans la gestion de ce site-bien-commun, votre pouvoir ne devrait découler que de votre seule fonction de Ministre, représentant de l’autorité légale et non pas de votre personnalité ou engagement militant (légitimité charismatique).

Ainsi, Monsieur le Ministre,

Avec tout le respect citoyen que vous et moi devons à notre République, à sa gouvernance « sobre et vertueuse » tant vantée, je vous prie de bien vouloir retirer votre intrus de Curriculum Vitae ou CV dans les colonnes de www.justice.gouv.sn, notre site-bien-commun, et ne penser y mettre que des éléments pouvant rapprocher la justice du justiciable.

Oumar Samba NIANG
Sociologue, Intervenant social
Oumar-Samba.Niang@univ-lyon2.fr