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Lettre ouverte aux parlementaires du Sénégal

Rédigé par leral.net le Vendredi 5 Décembre 2014 à 16:04 | | 0 commentaire(s)|

Lettre ouverte aux parlementaires du Sénégal
Honorables Députés du peuple !

A l’occasion de la session parlementaire en cours portant sur l’examen et l’adoption de la loi de finances pour l’année 2015, le Syndicat Unitaire et Démocratique des Enseignants du Sénégal (SUDES) porte à votre connaissance, individuellement et collectivement, ses vives inquiétudes quant aux graves conséquences qui découleraient de l’adoption tel quel du projet de budget des ministères en charge de l’éducation.

Honorables Députés du peuple !

En effet, dans le projet portant loi de finances pour l’année 2015, si la santé et la sécurité a juste raison on été servies pour de nouveaux quotas de recrutement, par contre, il n’est paradoxalement, pas prévu de recrutement d’enseignants. De même, des coupes sombres sont opérées sur les crédits de fonctionnement des établissements scolaires et universitaires. Last but not least, il est aussi question de gel des salaires, des indemnités des agents de la Fonction publique et des bourses d’étudiants.

En somme, une véritable politique d’austérité, par définition anti -sociale, rappelant l’époque sombre des politiques d’ajustement structurel pour les travailleurs et les couches populaires du pays.

Cet arsenal de mesures, assurément pénibles à supporter, trouverait sa justification dans la mobilisation des ressources internes pour le financement du P.S.E.

Honorables Députés du peuple !

Il importe tout d’abord, de souligner que le SUDES est en phase avec le P.S.E. qui ambitionne de sortir notre pays du marasme et de la stagnation économiques, de la misère sociale et culturelle dans lesquels il est enlisé depuis des décennies. Cette réforme économique fondamentale doit réussir !

Cependant, à l’expérience des politiques d’ajustement structurel, vécues vingt ans durant, force n’est il pas de reconnaître que les résultats attendus d’une réforme économique en profondeur dépendent, dans une large mesure, de la gestion au mieux des dimensions sociales de la réforme ?

Aussi, le SUDES s’interroge t-il sur les chances de succès du P.S.E. s’il doit porter gravement atteinte au fonctionnement efficace du système d’éducation et de formation, son pourvoyeur naturel en ressources humaines de qualité dont il a nécessairement besoin. De même, s’il lui faut siphonner les acquis des services publics et des agents qui constituent les leviers de sa mise en œuvre, le P.S.E. démarrerait-il sous de bons auspices ?

Nous doutons sérieusement que dans la posture du « serpent qui se mord la queue », le Sénégal puisse connaître des
avancées significatives, dans la durée.

Au demeurant, en organisant avec succès une conférence sociale aux résultats inespérés avec entre autres, la signature d’un pacte social de stabilité pour l’émergence économique (PSSEE) d’une part, les Assises de l’Education et de la formation et la Concertation Nationale pour l’Avenir de l’Enseignement Supérieur (CNAES) d’autre part, beaucoup ont pensé à juste raison, que dans l’esprit du dialogue social, proclamé urbi et orbi, par les plus hautes autorités de la République, toutes les étapes décisives et difficiles du P.S.E. allaient faire l’objet de consultation et de concertation avec les partenaires sociaux au lieu de l’habituel et paralysant passage en force. Hélas ! C’est l’approche technocratique qui a été, cette fois-ci encore, privilégiée !

Honorables Députés du peuple !

Le vote des budgets de Ministères en charge de l’Education dans leur présente mouture signifierait pour le SUDES et les enseignants en général :

 Le déni manifeste de déficit d’enseignants dans le système éducatif, alors que les grèves d’élèves se multiplient dans le pays pour réclamer des professeurs, que les effectifs pléthoriques par classes explosent, suite aux campagnes en faveur du droit à l’éducation pour tous au cours de la décennie écoulée, que de nombreux enseignants voient leur santé abîmer par la surcharge de travail, etc.

 Le retard inacceptable dans la mise en œuvre des protocoles d’accord que le gouvernement a librement signés avec les organisations syndicales, notamment d’enseignants

 Le doute quant à la volonté politique forte du gouvernement de mettre en œuvre à court terme, les pertinentes recommandations des Assises de l’Education et la CNAES, sous le prétexte du manque de ressources. Alors qu’il importe d’œuvrer au plus vite à sortir notre système éducatif de l’ornière dans laquelle il est englué depuis des décennies,

En définitive, les orientations et mesures budgétaires proposées par le gouvernement constituent des facteurs de crises et de conflits sociaux, susceptibles d’affecter durablement l’Ecole et l’Université publiques, déjà fortement fragilisées.

Les luttes sociales, dans une telle perspective, seraient d’autant plus légitimes et justes qu’il existe un sentiment largement partagé dans l’opinion nationale, à savoir que les sacrifices à consentir dans la mobilisation des ressources internes pour le P.S.E. ne sont guère équitablement répartis. C’est l’austérité pour la masse des travailleurs alors que le train de vie de l’Etat, au sommet, ne cesse de devenir dispendieux avec des budgets revus à la hausse et des augmentations substantielles, parfois à coups de millions, pour certains (Ministres, DG d’agence, conseillers du CESE, retour annoncé du SENAT etc.).

Honorables Députés du peuple !

L’heure est grave ! Il convient d’en prendre toute la mesure pour apporter les inflexions nécessaires au projet du gouvernement, dans une perspective de sauvegarde de la paix sociale indispensable au succès du P.S.E. et au bon fonctionnement de l’Ecole et de l’Université publiques.

Le SUDES compte sur votre profonde compréhension des enjeux pour répondre à son invite avant le vote.
Veuillez croire honorables députés, à l’expression de nos sentiments les plus patriotiques et à l’assurance de notre considération la plus parfaite.

Le Secrétaire Exécutif National Unitaire du SUDES