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Lutte contre la corruption : peut-on faire confiance à l’ARMP ?

Le Sénégal est un pays de paradoxes. Nous avons des institutions pour contrôler l’utilisation de nos ressources publiques mais, nous trouvons le moyen de créer d’autres structures budgétivores pour faire, moins bien, ce qui est déjà fait par la cour des comptes et les inspections générales d’état ou des finances.


Rédigé par leral.net le Mardi 22 Juin 2010 à 05:17 | | 2 commentaire(s)|

Lutte contre la corruption : peut-on faire confiance à l’ARMP ?
Mon propos, ici, n’est pas de jeter l’opprobre sur l’audit qui est une nécessité pour tous les décideurs mais, il s’agit, pour moi, de m’interroger, avec vous, sur la pertinence de nos attentes vis-à-vis de certains instruments et de l’efficacité des moyens utilisés pour ce faire.
L’audit est une technique qui est conduite par des personnes extérieures, jugées indépendantes et objectives dans leurs démarches afin d’évaluer la conformité des actes des dirigeants d’une organisation avec des normes universelles. En termes plus simples, il s’agit de savoir si les règles, fixées pour les personnes auditées, sont respectées, par elles, dans la conduite de leurs affaires. L’audit, de ce point de vue, est un instrument ordinaire qui est utile aux décideurs pour corriger les écarts de conduite ou consacrer les succès de leurs « exécutifs managers ». L’audit n’est donc pas, en soi, une entreprise de recherche, systématique, de fautes pour débusquer les mauvais gestionnaires ou pour « salir » la réputation de personnes honorables. Car, paradoxalement, tous les écarts de conduite ne sont pas, loin s’en faut, des fautes à punir mais très souvent des enseignements entre ce que l’on désire et ce que l’on peut réellement faire.
Mais, alors, qu’est-ce qui fait d’une opération aussi banale et sans gravité particulière un événement national majeur dans notre pays ? Et peut-on espérer, avec le développement des structures d’audit comme l’ARMP (l’Agence de Régulation des Marchés Publics), une saine gestion des affaires publiques ?
Je constate, tout d’abord, que le grand public ignore, trop souvent, les motivations du donneur d’ordre c’est-à-dire de celui qui commande l’audit. Ainsi, lorsqu’une agence publique, comme l’ARMP, produit un rapport d’audit, elle rend compte, forcément, à la primature, qui est son autorité supérieure. L’ARMP ne peut divulguer que des informations qui arrangent le gouvernement. De ce point de vue, croire que c’est parce que les bailleurs de fonds financent l’ARMP que celle-ci peut faire ce qu’elle veut de ses résultats d’audit, c’est assurément se nourrir d’illusions ou ne pas savoir ce que c’est qu’un état. Les bailleurs de fonds, eux le savent bien, mais ils doivent répondre à des préoccupations saisonnières de leur opinion publique ou donner le sentiment que leurs « largesses » sont fondées sur des bases « morales ». Mais, toutes les personnes averties savent bien que les bailleurs de fonds n’ont aucun souci de « bonne gestion ». Leur préoccupation reste et demeure de contrôler nos dirigeants et de leurs faire valider des choix politiques et économiques qui ne servent que les intérêts de leurs propres pays. Tout le bruit fait autour des « audits » n’est que de la poudre aux yeux de l’opinion publique pour la détourner de vrais problèmes dont la résolution aurait menacé des intérêts plus grands.
Ensuite, il est évident qu’un rapport d’audit est, entre autre, un des outils pour juger de l’efficacité d’un dirigeant. Mais l’efficacité c’est quoi ? Est-ce s’occuper de servir le plus grand nombre ? Ou servir le parti ou le Président et sa cour ? Si, par exemple, un Directeur d’une société nationale a « offert », sur sa demande, au Président de la République, qui l’a nommé, par décret, une forte somme d’argent et que par la suite, il maquille, grossièrement, une telle opération. Pensez-vous, sérieusement, que ce Directeur là sera puni, si celui-là même qui doit sévir est le responsable des fautes de gestion « constatées » ? Par ailleurs, un rapport d’audit, à lui seul, ne suffit nullement à juger des vrais compétences d’un dirigeant. Il faut, également, voir les résultats obtenus, en comparaison, des moyens investis et des attentes préalablement définies par les donneurs d’ordre. On peut parfaitement constater qu’un dirigeant puise, illicitement, dans la caisse, sans pour autant le démettre de ses fonctions, si, on se rend compte qu’un autre dirigeant plus intègre risque de ne pas obtenir les résultats qu’il obtient, malgré son manque de respect des règles comptables. C’est un principe, non formel, de réalité en matière de management.
Et enfin, les auditeurs sont et restent des êtres humains, c'est-à-dire susceptibles de se tromper et, pour cette raison, on ne doit pas prendre, toujours, pour de l’argent comptant ce qu’ils disent ou écrivent. Ils élaborent des théories, non des certitudes.
Au total, je pense que les rapports d’audit doivent être, toujours, relativisés, tenus secrets au seul profit des décideurs qui les commanditent. Car, non seulement ils ne sont que des hypothèses mais ils ne peuvent servir que le donneur d’ordre et jamais les bénéficiaires directs des projets ou établissement audités. C’est pour cela que je pense que le désir de transparence, légitime, des citoyens ne saurait être satisfait pas une agence comme « l’ARMP », ni par des structures privées. Ces institutions ne peuvent servir que les donneurs d’ordre et eux seulement. Et on vient de le voir ceux-là n’ont pas, toujours, une volonté de transparence et de service public
Mais s’il faut soustraire les résultats des audits du domaine public, n’y a-t-il pas de risques que les gouvernants s’en donnent, alors, à cœur joie avec l’argent public?
Certainement, et c’est pourquoi, je suggère le renforcement des moyens et des pouvoirs de la cour des comptes dont c’est la mission, naturelle, de contrôler l’utilisation des deniers publics. En la renforçant dans ses missions, le peuple se donne plus de pouvoir sur ses gouvernants. A l’inverse, en continuant de donner plus de moyens et de crédits, dans le contrôle de l’action publique, aux auditeurs privés ou à l’ARMP qui sont aux ordres des bailleurs de fonds ou de gouvernants corrompus nous continuons de nous enfoncer, chaque jour un peu plus, dans la perte de souveraineté et nous renforçons les ennemis de notre peuple. Pensons-y. Toujours

Tamba Danfakha
Email : talantamba@yahoo.fr

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1.Posté par lisa le 22/06/2010 14:41 | Alerter
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pas mal comme analyse.
Chapeau

2.Posté par Bécaye le 22/06/2010 19:02 | Alerter
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L'ARMP fait son travail,certes,mais la corruption est d'un autre sens!

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