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Mously Diakhaté, députée : « La famine est si tragique dans le monde rural que certaines familles en sont réduites à vivre de ‘’rakkal’’ et d’eau pour survivre »

L’OBS- Après son appel à la solidarité à l’endroit du monde rural menacé par la famine à cause d’une pluviométrie déficiente, la députée Mously Diakhaté revient dans cet entretien sur les motivations profondes de son action.


Rédigé par leral.net le Dimanche 10 Août 2014 à 22:36 | | 5 commentaire(s)|

Mously Diakhaté, députée : « La famine est si tragique dans le monde rural que certaines familles en sont réduites à vivre de ‘’rakkal’’ et d’eau pour survivre »
Qu’est-ce qui a motivé votre appel à la solidarité à l’endroit du monde rural rendu public hier ?

Le monde rural vit aujourd’hui une situation dramatique due au retard des pluies. Un état de fait qui est indépendant de notre volonté. En plus, j’ai effectué récemment une tournée à l’intérieur du pays. Ce qui s’y passe ne doit pas être ignoré des populations. Et si rien n’est fait, cela peut provoquer une famine terrible dans le monde rural qui risque de s’étaler sur plusieurs années. En tant qu’élue du peuple et parlementaire, il me paraît inconcevable de rester les bras croisés face à une telle situation. C’est ce qui a motivé cet appel à la solidarité que j’ai diffusée hier (vendredi) dans les médias.

Sur quelle période avez-vous effectué cette tournée à l’intérieur du pays?

Je l’ai entamé bien avant la campagne électorale pour les Locales. En réalité, le but de ma tournée était d’aller en renfort à mon mouvement politique («And Jappo Jeff ci Jam ou Alliance nationale pour la paix et le développement (A3J) qui ambitionnait d’aller à la chasse aux voix pour les élections locales. Mais, une fois sur le terrain, la situation que j’ai trouvée sur place m’a tellement choquée que j’en ai oublié mes motivations politiques. Sur le coup, je me suis dit que je ne pouvais rester indifférente et c’est ainsi que m’est venue l’idée de faire appel à mes collègues parlementaires pour un grand élan de solidarité en faveur du monde rural. Je leur ai proposé de procéder à une cession volontaire de leurs salaires et émoluments car nous sommes les représentants du peuple et nous nous devons de ne pas rester insensibles devant pareille situation.

Dans quelles contrées vous a menée votre tournée ?

Je suis allée à Keur Massamba Fatim dans un village de Pire (département de Tivaoune), à Dinguiraye derrière Touba Toul et à Darou Saloum. J’ai sillonné plusieurs villages du Sénégal parce que je connais très bien le pays.

Qu’est-ce qui vous a alertée lors cette tournée pour que vous lanciez cet appel ?

La situation dramatique que vivent ces populations. Habituellement, à cette période de l’année, l’hivernage battait son plein. Le haricot (niébé) commençait à mûrir et les paysans parvenaient à avoir de quoi faire bouillir la marmite. Aujourd’hui, les greniers sont vides et les cultivateurs sont oisifs. Ils vivent dans une précarité extrême. J’ai l’habitude de mener des investigations avant de lancer des alertes. Un de mes amis m’a dit que dans un village du Saloum dont je tairais le nom par respect pour les habitants du village, les populations se nourrissaient de «rakkal (aliment de bétail)» et d’eau. Ils sont si démunis qu’ils font tomber les toitures de leurs cases pour nourrir leur bétail. C’est dramatique !

Pouvez-vous nous donner le nom de ce village ?

Par respect et pour préserver la dignité de ces gens, je préfère ne pas citer de nom. Ils sont certes pauvres, mais ils sont très dignes. Ce village n’est qu’un exemple parmi tant d’autres. La famine touche presque toutes les contrées du Sénégal. L’Etat en tête et toutes les institutions de la République ainsi que le peuple sénégalais dans sa globalité et sa diversité ont, le devoir, à travers une action de solidarité nationale de soutenir le monde rural. La responsabilité de l’Etat et des parlementaires est engagée. Il faut soigner le mal à la racine.

Donc la famine sévit réellement dans le monde rural ?

Evidemment ! Les réserves sont vides et le monde rural vit dans un dénuement total.

Comment vos collègues parlementaires ont-ils accueilli votre appel ?

Je leur ai transmis l’appel au même titre qu’à l’ensemble du peuple sénégalais et je reste à l’écoute. Le député Samba Bathily m’a personnellement appelée et a salué mon initiative. Il m’a même dit qu’il était prêt à donner la moitié de son salaire. Pour ma part, en tant qu’initiatrice, je ne dirais pas ici ce que je me suis engagée à faire car cela ressemblerait à de la fanfaronnade. Tous les citoyens sénégalais sont interpellés. L’Etat doit saisir cette opportunité ainsi que les bonnes volontés pour venir en aide au monde rural. J’espère que je trouverai un écho favorable auprès des autorités de ce pays.

NDEYE FATOU SECK obs

( Les News )