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« NGALAKH » DE FIN DU TEMPS CARÊME : Les Chrétiens en communion avec les Musulmans

Les fêtes de Pâques comme la Tabaski constituent un moment de communion, mais aussi de renforcement de la cohésion entre musulmans et chrétiens au Sénégal. Cette année, la fin du carême coïncide avec une conjoncture économique difficile. Pour respecter la tradition, des chrétiens préparent le « ngalakh », (un plat à base de bouillie de patte d’arachide, de pain de singe, du mil et du sucre) en priorité pour leurs frères et cousins musulmans.


Rédigé par leral.net le Vendredi 2 Avril 2010 à 12:09 | | 0 commentaire(s)|

« NGALAKH » DE FIN DU TEMPS CARÊME : Les Chrétiens en communion avec les Musulmans
C’est devenu une tradition. Mais aujourd’hui, une difficile conjoncture oblige certains chrétiens à revoir à la baisse la quantité de « ngalakh » servie à la fin du temps de carême. « Nous voulons respecter la tradition. Comme tous les chrétiens préparent du Ngalakh, nous avons décidé de réduire nos dépenses pour accorder la priorité à nos frères musulmans », confie Caroline Dasylva. L’air désolé, cette mère de famille, habitante de Dieuppeul, quartier de Dakar, pointe du doigt les difficultés des ménages. « Il est difficile d’augmenter la quantité que nous servons, malgré la forte demande. La conjoncture nous oblige à revoir à la baisse nos prétentions. A la place du « ngalakh », des bonbons et des gâteaux seront servis à certains voisins », insiste-t-elle, la mine un peu renfrognée en cette matinée du jeudi 1er avril, 48 heures avant la dégustation du « Ngalakh » servi à l’occasion de la fin du temps de carême. Les efforts consentis pour préparer ce mets sont guidés en partie par le souci de raffermir les liens avec les voisins musulmans. « Pendant la tabaski, nous recevons de la viande de mouton. Cela nous va directement au cœur. Comme Jésus nous a inculqué le sens du partage et de la solidarité, nous sommes déterminés à respecter la vieille tradition », souligne Mme Dasylva. L’envie de bien faire Au Sénégal, les fêtes constituent un moment de prières de communion avec toutes les communautés. La solidarité est le maitre-mot. « Je suis la maman des jeunes du quartier. Je suis obligée de les servir », dit-elle. L’envie de bien faire est souvent freinée par l’absence de moyens. « Nous n’avons pas assez de soutien. La communauté catholique de Dieuppeul a reçu 900 000 Fcfa de la mairie. Chaque famille se contentera de 3000F. Cette somme est infime pour assurer la dépense, même si l’année dernière, nous n’avons rien reçu à cause des élections locales » explique la dame. Cette assistance est généralement destinée aux démunis, mais aujourd’hui, tout le monde est dans le besoin. Beaucoup ne vont pas préparer le ngalakh cette année, selon Mme Dasylva. Caroline Da Sylva invoque également une pénurie de sucre. « Nous ne parvenons pas à nous approvisionner », se désole-t-elle. L’habitante de Dieuppeul partage cette déception avec ses autres voisins chrétiens. Assise sur le perron de la devanture de sa maison, Emilie Diatta est déjà dans l’effervescence du « Ngalakh ». « Nous allons préparer. J’ai déjà acheté la bouillie ainsi que dix kilogrammes de pattes d’arachide », fait-elle savoir. Seule fausse note, Mme Diatta peine à trouver du sucre. « J’ai déjà fait la commande chez le boutiquier. J’attends. Peut-être, je ne vais pas tarder à être servie », explique-t-elle. En tout cas, ses jeunes voisins musulmans lui prêtent une oreille attentive. « Depuis hier, mes amis me réclament leurs parts. Je vais répondre favorablement à leur demande. C’est la téranga sénégalaise qui est en marche », confie Mme Diatta, le sourire aux lèvres. Au même moment, Ndella Fall, une fille musulmane, amie à Emilie Diatta, se pointe. Elle se dit prête à prêter mains fortes à ses « cousins chrétiens ». « C’est une fête qui concerne tout le monde. Je me prépare à ça. J’apporte mon soutien dans la mesure du possible », fait-elle remarquer. Son assistance va vite se manifester. Une jeune fille sort de la maison avec une bassine contenant du mil. Jetant un regard dans le contenu de la bassine, Ndella demande à la jeune fille de bien remuer le mil avec de l’eau pour extraire les grains de sable. « Nous vivons dans cet environnement. C’est la solidarité et l’entraide qui guident nos rapports. Mon objectif est de servir tous mes voisins, malgré les difficultés liées à la conjoncture économique », affirme Emilie Diatta. Marius Diompy, une jeune qui assiste aux échanges, opte pour la même démarche que sa voisine. « J’habite Sébi Ponty, mais j’ai loué une chambre à Dieuppeul. Nous avons débloqué 60 000Fcfa pour préparer le Ngalakh. Nous voulons tout faire pour servir nos frères musulmans », raconte-t-il. Mais M. Diompy a du pain sur la planche. Ses amis lui demandent de convoyer les mets de Sébikotane à Dieuppeul. Une tache difficile qu’il s’évertue à réaliser. « La cohabitation entre musulmans et chrétiens en vaut l’expérience. Personne ne peut nous diviser. Ces moments de communion contribuent à nous rapprocher. Chacun doit faire un effort pour respecter la tradition et la religion de l’autre. Ce que nous ont légué nos parents », plaide-t-il.


Babacar DIONE et Eugène KALY
Source Le Soeil

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