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«Nouvelles affaires africaines» - Mensonges et pillage au Gabon: Comment «Alain Bongo» a acheté son bac

Rédigé par leral.net le Lundi 17 Novembre 2014 à 10:57 | | 0 commentaire(s)|

Au delà des doutes émis sur sa nationalité, Pierre Péan explique comment «Alain», devenu «Ali» Bongo, a acheté son baccalauréat.


«Nouvelles affaires africaines» - Mensonges et pillage au Gabon: Comment «Alain Bongo» a acheté son bac
"Sur le site de la présidence gabonaise, la biographie officielle d’Ali précise qu’«en 1965, il quitte le Gabon pour poursuivre ses études primaires et secondaires en France. Après son baccalauréat, il étudie le droit à l’université de paris panthéon-Sorbonne et obtient un doctorat en droit–sujet : le domaine public.»

Tout est faux ou presque. En 1965, Alain, le futur président vivait encore au Nigéria et n’a donc pas poursuivi d’études en France à cette époque. Philippe Bernarda introduit pour Le monde quelques compléments d’information collectés à Libreville : «envoyé très jeune comme pensionnaire dans un collège protestant des Cévennes, il a poursuivi un cursus des plus classiquement huppés : études secondaires au collège Notre-Dame-de-Sainte-Croix de Neuilly-Sur- Seine, puis droit à l’université Paris 1 (Panthéon- Sorbonne).» Je me suis adressé à Laurent pasteur, président des anciens élèves du «cc», pour connaître la vérité à propos du passage d’Alain au Chambon-Sur-Lignon.

Il apparaît que des Gabonais ont effectivement fréquenté le collège protestant dans les années 1970 et 1980. Pasteur avait entendu parler d’une éventuelle scolarité d’Alain Bongo, mais ne pouvait l’attester. Ayant accepté de mener l’enquête, il a interrogé michel Fanguinovény. Celui-ci était en 4e en 1974-1975 : «Si Alain Bongo a été élève au collège Cévenol, ça n’a pu être qu’après moi, car je connaissais tous les Gabonais qui y sont passés avant moi. Mon père fut le premier, peu après la guerre de 1939-1945 ; ce fut ensuite le tour de mon cousin du même nom, vers 1965...» Laurent Pasteur s’est également adressé à Robert Lassey, ancien élève (1965-1968), ancien professeur et ex-directeur (1997- 2008). celui-ci lui a confié avoir déjà eu à rechercher des informations à ce sujet et n’avoir trouvé aucune trace d’Alain Bongo au collège. «Compte tenu de ses fonctions d’alors, nul doute qu’il avait tous les registres à sa disposition», commente Laurent Pasteur.

Ce dernier a par ailleurs consulté les Year Books des années 1970, où figuraient les listes de tous les élèves. «Aucun Bongo n’apparaît sur les listes des Year Books suivants : 1971-1972, 1974-1975, 1975- 1976, 1976-1977», souligne-t-il.
Une certitude : Alain a bien été élève au collège Notre- Dame-de-Sainte-croix de Neuilly. Ses résultats étaient si catastrophiques que décision fut prise de le faire accompagner par un précepteur, Éric Chesnel, lui aussi de Neuilly.
Néanmoins, en fin de scolarité, il devint évident qu’il n’avait aucune chance de décrocher son baccalauréat dans des conditions normales. Son père estimait qu’un échec serait catastrophique aussi bien pour lui et son image que pour son fils. Tous les chefs d’État africains étaient censés se rendre cette année là à Libreville pour le sommet de l’organisation de l’Unité africaine... Il aurait l’air de quoi ? Il décida donc qu’Alain devait coûte que coûte obtenir sa peau d’âne.

Il s’en ouvrit à plusieurs personnes, notamment à Pierre Debizet, patron du Sac, à Éric Chesnel, à Marcel Sandoungout, alors ambassadeur du Gabon à Paris, à un responsable d’un de ses services de sécurité, et probablement à d’autres encore. Inutile de préciser que Bongo était prêt à mettre La contre-ingérence, équivalent de notre DST, chercha et trouva un Antillais disposé à passer l’examen sous l’identité d’Alain. Mais cette initiative fut supplantée par une autre, lancée par le «frère» Sandoungout, lequel tapa à la porte d’un autre «frère» du cabinet de Pierre Abelin, ministre de la coopération du gouvernement Chirac.

Les relations entre Bongo et la France traversaient alors une passe difficile. Résoudre ce mince problème pouvait rendre le sourire au président gabonais. Le collaborateur d’Abelin prit alors langue avec René Journiac, conseiller pour l’Afrique de Valéry Giscard d’Estaing. L’affaire remonta à VGe. Celui-ci donna-t-il son feu vert ? Toujours est-il que Journiac fit redescendre l’info vers la coopération. Contact fut alors pris avec Michel Denieul, directeur de cabinet de René Haby, ministre de l’Éducation nationale, pas très chaud pour avaliser le trucage d’un examen. Mais il réalisa qu’il n’avait pas le choix : affaire d’État.

La solution retenue est simple : Alain doit se soumettre aux épreuves. Deux des épreuves écrites seront mystérieusement égarées. Constatation faite de cette perte, il sera décidé que, «pour ne pas pénaliser le fils Bongo, les examinateurs donneront une bonne note à ces deux épreuves»... Satisfait, Bongo demandera plus tard si la même procédure pouvait être retenue à l’université. Son vis-à-vis français lui répondit que, cette fois, c’était mission impossible...

Au souvenir de ces péripéties auxquelles Omar Bongo attachait une telle importance, un ancien membre de ses services de sécurité, qui avait eu à les gérer, commente : «Éric Chesnel était à la manœuvre et disposait d’un budget persuasif. Ensuite, Alain a pris la main et acheté lui-même ce dont il avait besoin.»

Qu’en est-il du Doctorat de droit au Panthéon-Sorbonne ? Il suffisait, au mois d’Août 2014, d’aller sur le site sudoc.abes.fr, qui répertorie toutes les thèses, pour constater qu’il n’y avait aucun résultat pour «Bongo». Et bizarrement, la même recherche effectuée sur le même site, le 24 septembre, fait apparaître une thèse de doctorat de géographie, et non de droit public, soutenue le 6 juillet 1985, par Ali Bongo, dont le titre est Le transgabonais, et qui fait 276 feuillets ! J’ai consulté cette thèse à la bibliothèque Cujas. Le fils du président a fait son exposé devant Jacques Soppelsa, président de paris 1, le professeur Thiébault Flory, de l’université de Lille, et le professeur Jean Gicquel, de paris 1. Ali Bongo est censé avoir consulté cinquante et un livres, sans compter les périodiques et articles. Si l’on enlève les annexes, les cartes et les documents à l’intérieur du texte, la thèse est réduite à 144 petits feuillets. Ce qui est très court pour une thèse... Le conseiller à la présidence qui l’a écrite ne s’est pas cassé la tête. Il a réuni les documents gabonais sur le sujet et en a fait une petite synthèse en forme d’apologie d’Omar Bongo. Ali Bongo est aujourd’hui encore très reconnaissant aux universitaires qui lui ont donnés son diplôme : il invite les deux derniers vivants aux grands raouts de l’ambassade du Gabon à Paris. Précisons qu’en 1985, Ali Bongo était représentant personnel du président et que, s’il venait souvent à paris, ce n’était pas pour user ses pantalons à la bibliothèque Cujas...»