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Olivier Bercault sur l'implication d'Habré dans les exactions au Tchad: « Il y a 1 900 documents adressés directement à Hussein Habré »

L’audition d’Olivier Bercault, ancien fonctionnaire de Human Rights Watch et co-rédacteur de la « Plaine des morts » avec Reed Brody, se poursuit ce mardi, devant la Cour des Chambres africaines extraordinaires (Cae) en qualité de témoin. Il a, par ailleurs, soutenu qu’Hussein Habré effectué des visites non officielles dans les prisons pour s’enquérir de la situation des prisonniers.


Rédigé par leral.net le Mardi 22 Septembre 2015 à 14:37 | | 0 commentaire(s)|

« Près de 10 ans après le départ de Habré, on avait l’impression que la Direction de la Documentation et de la Sécurité (Dds) était toujours en place », a déclaré l’ancien fonctionnaire de Human Rights Watch, Olivier Bercault, qui explique cela par le fait que certains membres de la police politique d’Hussein Habré, ont été recyclés après sa chute en 1990. M. Bercault soutient, toutefois, que l’organisme dont il faisait partie avait dénoncé en son temps le fait que « certains d’entres ces responsables soient réintégrés dans le circuit sécuritaire du Tchad et dont certains faisaient l’objet d’une plainte ». L’ancien avocat au Barreau de Paris, devenu travailleur d’Human Rights Watch après sa rencontre avec Reed Brody, a estimé que ce sont ces personnes réintégrées dans le système qui étaient dans la chaîne de commandement. « Un recyclage dénoncé par le passé par Humain Rights Watch », soutient-il.

Pour ce qui est de la chaîne de commandement, M. Bercault explique qu’« au-delà des ordres donnés par la hiérarchie, il y a l’information qui remonte vers le président de la République Hussein Habré, comme le stipule le décret créatif de la Dds. Ce décret de structuration place la Dds sous la tutelle du ministère de l’Intérieur ». Mais, dit-il, « c’est Hussein Habré qui s’occupe directement de l’organisation de la Dds. Il y a une coordination qui se faisait entre le Directeur et le chef de l’Etat ». Il en veut pour preuve les documents qui font penser que la chaîne de commandement remonte à l'ancien Président tchadien. « Il y a 1 900 documents qui sont adressés directement à Hussein Habré. Aussi, c’est lui qui nomme Directeurs de la Dds. Cela montre l’emprise de Hussein Habré sur la Dds », révèle-t-il avant de brandir, devant la Chambre, un document de la Dds datant du 29 décembre 1989 qui a été envoyé à la Présidence par M. Saleh Younouss. Aussi, ajoute-t-il, qu'il y a des fiches qui remontent et qui descendent vers le Président.

A la question de savoir s’il a vu un document écrit sur ses allégations, l’ancien employé de Hwr rétorque : « Sur les ordres de tuer et de torturer, vous ne verrez jamais de documents signé par le Président sur ces pratiques ».

Pour ce qui est de l’application d’une procédure judiciaire après arrestation d’une personne suspectée, M. Bercault soutient qu’« aucun avocat ou magistrat n’a été saisie par la Dds. On n’a aucune idée de la réalité de la dictature. Je n'ai jamais trouvé une preuve ni un document qui montre que l’appareil judiciaire du Tchad a été saisie une fois ».

L’ancien avocat, devenu professeur de Droit aux Etats-Unis, a maintenu ses propos sur la visite du Président Habré dans les centres de détentions malgré les propos de Saleh Younouss qui soutiennent le contraire. « Il y a plusieurs personnes qui ont vu Habré à plusieurs reprises. Les témoins que j’ai interrogés ont affirmé que les visites de Hussein Habré n’étaient pas officielles. C’était juste quelques minutes dans la soirée », s’est-il défendu devant l’insistance de l’avocat de la défense Me Mbaye Sène.

Fara Mendy