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Pape Samba Diassé : « Je n'ai aucun intérêt à aider quelqu'un que je ne connais pas »

Souvent malmené à la barre par les questions des conseils de la partie civile, du parquet et de la Cour, Alioune Samba Diassé bien que souffrant, a affiché hier la confiance devant la composition de Henri Grégoire Diop, après que la défense a hérité du témoin pour démonter l’accusation. Le co-prévenu de Karim Wade a ainsi apporté dans un discours fluide, les réponses prouvant son innocence.


Rédigé par leral.net le Mardi 23 Septembre 2014 à 13:02 | | 1 commentaire(s)|

Pape Samba Diassé : « Je n'ai aucun intérêt à aider quelqu'un que je ne connais pas »
Alioune Samba Diassé joue-t-il avec la fibre sentimentale de la composition de Henri Grégoire Diop ou estilen train de plaider son innocence dans cette affaire d’enrichissement illicite reproché à Karim Wade et qui lui a valu une comparution pour complicité du délit précité ?

Hier, lors du passage du témoin à la défense pour poser ses questions, on a vu un Diassé qui, en dépit de son état chancelant, a trouvé les ressources et les mots justes pour démonter l’accusation. « Je n’ai aucun intérêt à défendre quelqu’un que je ne connais pas », s’est confessé le co-prévenu de Karim Wade, suite à l’interpellation de son conseil Me Ousmane Sèye sur la prétendue assistance qu’il aurait apportée au principal mis en cause. Poursuivant, l’avocat l’a interpellé sur les chantages dont il a fait l’objet à l’enquête pour l’amener à témoigner contre le fils de l’ancien Président. «Des propositions m’ont été faites à l’enquête pour dire la vérité sur cette affaire. Mais je n’ai fait que dire la vérité, depuis le début. Peut-être qu’ils (les enquêteurs) s’attendaient à entendre autre chose ? », s’interroge-t-il, estimant qu’il n’a aucun intérêt à défendre une personne qu’il ne connaît pas.

Revenant sur le film de son arrestation qu’il qualifie de «douloureuse », le mis en cause d’ajouter qu’il a été traité de «menteur» par les enquêteurs. Très remonté contre ce jugement, Diassé dit s’en remettre au Tout Puissant, seul juge à ses yeux. Entre le dilemme du mensonge pour recouvrer la liberté et la vérité pour croupir en prison, soulevé par son avocat, le choix est tout tranché pour Alioune Samba Diassé. «Je préfère dire la vérité et aller en prison», relève le prévenu qui dit assumer tous les actes qu’il a posés dans cette procédure.

DIASSE : «JE NE PEUX ETRE COMPLICE DE QUELQU’UN QUE JE NE CONNAIS PAS»

En amont de ces déclarations, Me Ousmane Sèye s’est dit surpris de la démarche de la Cour, du parquet spécial et des conseils de la partie civile qui, à l’en croire, n’ont posé aucune question relative au principal mis en cause, en l’occurrence Karim Wade, pour établir la complicité. Son client de rectifier avec ironie pour soutenir que le nom de Karim Wade a été mentionné à deux reprises. La première fois, dit-il, c’était lors de la lecture de la prévention par Henri Grégoire Diop, avant que l’assesseur ne l’interpelle sur ses relations avec le fils de l‘ancien président. «Je n’ai aucune relation d’affaires ou sociales avec Karim Wade.

C’est quelqu’un que je connais comme tous les autres Sénégalais. Je ne peux être complice de quelqu’un que je ne connais pas», évacue l’ancien patron d’Abs Sa, qui révèle néanmoins avoir rencontré son co-prévenu durant leur arrestation. «Karim Wade ne me connaissait pas. C’est quand mon épouse m’a interpellé par mon nom qu’il a su qui j’étais. C’est vous Diassé ? m’avait-il demandé». Outre ces questions de la défense, l’appel d’offres lancé par l’Asecna et remporté par la société de Diassé reste jusque-là un mystère pour Me Yérim Thiam et pour le président de la cour. «Comment les Allemands qui voulaient s’installer en Afrique peuvent-ils signer avec une société qui ne connaît absolument rien en transport de passagers, qui plus est ne détient qu’un capital de 10 millions Cfa ?», s’interroge Henri Grégoire Diop qui suspecte la présence d’un tiers pour tirer les ficelles. «Il y avait une personne derrière moi, c’est Wolfgang. C’est la garantie que j’avais et qui m’a permis de décrocher ce marché», précise le mis en cause pour dissiper les suspicions autour de cette question. Visiblement pas convaincu de cette réponse, le juge de renchérir que la société Abs Sa n’avait aucune expérience. Une remarque contestée par le co-prévenu de Karim Wade qui dit avoir acquis de l’expérience en transit et en transport logistique. Non sans révéler qu’il est de son droit de postuler à un appel d’offres, même en cours de constitution. «Une société peut bien avoir un capital de mille francs et investir des milliards. Idem pour Abs qui pouvait soumissionner avec 10 millions et prétendre gagner un marché de plusieurs milliards. Estce que la loi interdit à une société nouvellement créée de soumissionner à un appel d’offres», interroge Me Sèye.

A en croire son client, Abs Sa a été créée bien avant, cependant il est d’avis que tous les documents n’étaient pas à sa disposition. « Abs était en mesure de respecter les termes de référence de l’appel d’offres », ajoute le mis en cause. Cependant, une certaine presse a révélé que l’appel d’offres a été truqué. Idem pour Mbaye Sarr, par ailleurs patron de Senecartours, qui a révélé que les bus de Cobus étaient déjà à l’aéroport avant l’appel d’offres. Archi-faux ! S’insurge le prévenu qui accuse les enquêteurs d’avoir privilégié les déclarations verbales des détracteurs au détriment de pièces justificatives dont il disposait, en l’occurrence les connaissements. « C’est faux ! Les bus n’étaient pas à l’aéroport », commente Me Sèye.

ME SEYE : «AUCUNE LOI N’INTERDIT A UNE DOMESTIQUE D’ETRE ACTIONNAIRE»

Revenant sur les actionnaires de la société Abs sa, l’avocat s’est dit surpris de la démarche du parquet spécial qui n’a pas auditionné Wolfgang, pourtant partenaire de son client. Diassé révèle que le parquet spécial n’a pas jugé utile d’entendre ce dernier alors qu’il tient ses bureaux au Sénégal. Par contre, déplore-t-il, le parquet spécial a jugé nécessaire d’entendre sa bellesoeur qui vit à Chicago. Une démarche qui relève du deux poids, deux mesures aux yeux de Me Sèye. Par ailleurs, le lièvre a été levé concernant les autres actionnaires de Diassé, notamment Véronique Manga qui serait, à en croire le président de la Cour, la domestique de la mère de Pape Mamadou Pouye et qui détiendrait 10% des actions de Abs Sa. Une personne que le prévenu présente comme « la petite amie » de Wolfgang. « Je ne connais pas la maman de Mamadou Pouye, je connais Véronique qui m’a été présentée par Wolfgang. Je ne suis pas intéressé par sa profession ou ce qu’elle représente », plaide Alioune Samba Diassé, appuyé par son avocat qui estime qu’aucune loi n’interdit à une domestique d’être actionnaire.

Concernant Fatou Babou que le prévenu présente comme sa tante, avec la même part, il reconnaît avoir sollicité les services de cette dernière, avant d’assumer sa démarche. Sur un autre registre, Me Sèye a permis à son client de tirer sur l’état financier de sa société fait par l’administrateur provisoire qui dans un premier temps avait conclu à un montant de six milliards avant de rabaisser considérablement ce montant à trois milliards. A l’en croire, l’état financier a été fait sur des bases fantaisistes, car c’est la valeur des bus qui doit faire foi dans cette opération. Pourtant, indique Me Ousmane Sèye, l’administrateur provisoire a été gracieusement rémunéré à hauteur de 5,5 millions par mois, sans compter les frais de déplacement vers l’Allemagne. Malgré tout, aucun rapport mensuel n’a été produit par l’administrateur provisoire.

« C’est un cas typique d’enrichissement illicite», raille Me Sèye, s’adressant au parquet spécial. Pour répondre à l’interpellation du Parquet Spécial qui estime que le prévenu ne maîtrise par sa société, Alioune Samba Diassé de rétorquer qu’Abs Sa est son bébé. «Abs, je l’ai créée. Je ne peux pas ne pas maîtriser une société que j’ai créée. Je la connais mieux que quiconque, si ce n’est Wolfgang qui m’a aidé et qui m’a accompagné chez le notaire», déclare Diassé.

PROCES DE KARIM WADE DEVANT LA CREI : ALIOUNE SAMBA DIASSE ET LA HANTISE D’UN PROCES

C’est un aveu d’impuissance, un récit pathétique qu’a livré hier après midi, à la barre de la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei), le présumé complice de Karim Wade. Comparaissant au quatrième jour de son interrogatoire, Alioune Samba Diassé s’est dit lassé à cause d’un procès éreintant qui l’use et fait souffrir ses proches. Hanté par un procès interminable, l’ancien directeur commercial et technique de Abs Corporate, visiblement affaibli par les nombreux allers-retours entre son domicile et le Palais de justice de Dakar, a tenu à aller jusqu’au bout malgré la «main tendue» du président Henry Grégoire Diop

«Je me trouve dans une situation inconfortable. Je ne cesse de me morfondre dans mon coin. Mes amis, mes parents mes enfants, ne cessent de pleurer. Je ne sors de chez moi que pour faire mes séances de kinésithérapie. On me tape dessus alors que je n’ai rien fait. Je ne dors pas la nuit». C’est la déclaration pathétique, un aveu d’impuissance de Alioune Samba Diassé hier, devant la barre de la Crei. Le présumé complice de Karim Wade répondait à la question de son avocat, Me Alioune Badara Cissé qui lui demandait si c’était à refaire, s’il aurait fait confiance à Bibo au point de créer la société Abs Corporate, il répond visiblement exténué : «J’ai servi mon pays. Je n’ai rien reçu en contrepartie de l’Etat du Sénégal, mais j’ai fait ce que je devais faire».

ALIOUNE SAMBA DIASSE : «JE NE PEUX PLUS SORTIR DE CHEZ MOI…»

Cependant, travail accompli ou pas, les avocats de la défense, chacun en ce qui le concerne, veulent lui tirer les vers du nez par une foultitude de questions. Secoué et affaibli par la durée de l’interrogatoire, Alioune Samba Diassé demande au président de lui permettre de prendre du sucre. «Je peux demander à mon cousin un peu de sucre», a-t-il sollicité. Le président de la Cour Henry Grégoire Diop, sensible à sa cause, le lui accorde, occasionnant du coup une suspension de l’audience de quelques minutes. Ensuite, le président de la Crei le questionne sur son état de santé. Mais Diassé fait signe en hochant la tête, qu’il peut tenir le coup. Son avocat Me Ousmane Sèye, ne croyant pas un mot de ce qu’il dit, demande à son tour à la Cour de suspendre l’audience jusqu’au lendemain. Diassé n’est pas du même avis, en dépit de l’insistance de son conseiller. «Me Sèye, ne vous en faites pas, je peux continuer. Ce n’est pas trop grave, je vais récupérer mes forces», a-t-il soutenu.

Un probable malaise évité, les questions sur ses présumées relations avec le fils de l’ancien chef de l’Etat, Karim Wade, pleuvent à nouveau. Mais Diassé n’abdique pas et reste sur la défensive en étant catégorique et ferme sur sa position. «On peut faire des réquisitions auprès de la Sonatel pour vérifier s’il y a eu des communications téléphoniques entre Karim Wade et moi», dit-il.

«LE PROCUREUR SPECIAL ALIOUNE NDAO EST UN USURPATEUR DE FONCTION»

Diassé soutient n’avoir eu de contact avec Karim Wade ni avant ni pendant qu’il exerçait ses fonctions de ministre d’Etat, ministre des Transports aériens et des infrastructures. «Je n’ai pas son numéro de téléphone ; aucun lien ni professionnel ni amical n’existe et n’a jamais existé entre nous. Je ne l’ai reconnu que le 31 juillet dernier, quand il a été appelé à la barre dans l’affaire des biens présumés mal acquis pour son identification », s’est-il défendu à la barre. Quid de l’obtention du marché exclusif de transport de passagers dans les aéroports de la sous-région et du Sénégal ?

Pape Aliou Samba Diassé qui n’est pas un enfant de choeur reste sur la défensive. «Je n’ai jamais eu de contacts avec les directeurs de l’Anam», dit-il en réponse aux questions de Me Samba Améthi, estimant qu’il a concouru à un appel d’offres qu’il a finalement remporté. Et comme si cela ne suffisait pas, on l’interroge sur ce qu’est advenue la société Abs Sa depuis sa mise sous administration spéciale, Diassé répond : «Je n’ai jamais eu de lisibilité financière depuis». Ironisant, il dépeint «le procureur spécial Alioune Ndao et son substitut comme des usurpateurs de fonction» pour avoir mis sa société Abs Sa sous administration provisoire. Car depuis l’ouverture de la traque des biens présumés mal acquis, «aucune lisibilité financière ne lui a été servie», se désole-t-il, déclarant que «jusqu’à l’extinction du soleil, personne ne peut prouver qu’il a été le manager général de Abs Corporate».

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