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Pourquoi le Sénégal a rappelé son ambassadeur au Qatar : Soupçons de versement d’un million de dollars à un groupe proche d’al-Qaïda


Rédigé par leral.net le Jeudi 8 Juin 2017 à 08:08 | | 0 commentaire(s)|

Le Sénégal s’est rangé du côté de l’Arabie Saoudite en rappelant à Dakar son ambassadeur au Qatar. Malgré les dénégations, il est aujourd'hui sûr que Doha a versé au moins un million de dollars à des groupes affiliés Al-Qaïda.
 
«Le gouvernement du Sénégal suit avec une vive préoccupation la situation en cours dans la région du Golfe. Le Sénégal exprime sa solidarité agissante à l’Arabie Saoudite, aux Émirats Arabes unis, au Bahreïn et à l’Égypte. Le Sénégal décide, à compter de ce jour mercredi 07 juin 2017, de rappeler en consultation son ambassadeur du Qatar. »
 
 Tel est le contenu du communiqué laconique publié par le ministère sénégalais des Affaires étrangères hier. Le Sénégal, bien qu’étroitement lié au Qatar qui abrite même le « prisonnier » Karim Wade dont on s’interroge maintenant sur le sort, a pris ses responsabilités pour apporter son soutien à l’Arabie Saoudite et autres pays qui accuse Doha de financer le terrorisme.
 
Des accusations qui sont aujourd’hui prouvées et pour cause. Le quotidien financier britannique The Financial Times (FT) a révélé que les autorités du Qatar avaient versé environ un milliard de dollars aux responsables de la sécurité iraniens et à des groupes djihadistes affilés à Al-Qaïda en Syrie pour assurer la libération de 26 membres de la famille royale, dont de nombreux cousins de l’émir du Qatar.
 
 Ces derniers avaient été enlevés, alors qu’ils chassaient le faucon en décembre 2015 dans le sud de l’Irak, par le groupe islamiste chiite irakien Kata’ib Hezbollah, soutenu par l’Iran et qui les a remis au gouvernement irakien en avril dernier.
 
Le Financial Times s’est entretenu avec les personnes impliquées dans l’opération d'échange d’otages, des deux côtés, à savoir: deux responsables gouvernement aux irakiens dans la région, trois dirigeants de la milice chiite irakienne Kata’ib Hezbollah et deux membres de l’opposition syrienne.
 
 Selon les informations obtenues par le FT, les membres de la famille royale qatarie ont été enlevés afin de constituer une monnaie d’échange pour la libé- ration de membres de Kata’ib Hezbollah qui avaient été, eux, enlevés par des militants djihadistes du groupe Tahrir al-Sham, une antenne d’Al-Qaïda en Syrie.
 
 Le fait que le Qatar ait décidé de payer une rançon à la fois aux responsables de la sécurité iraniens et aux djihadistes pour libérer les otages, a provoqué un tollé dans les capitales du Golfe. L’émirat est de fait accusé de financer le terrorisme par le biais de ce genre de rançons.
 
Selon certaines estimations, Doha aurait versé jusqu’à 140 millions de dollars au groupe Tahrir al- Sham et environ 80 millions de dollars au groupe Ahrar al-Sham, autre allié d’Al-Qaïda. Un responsable arabe a cependant déclaré au FT que le montant total de la rançon versée aux groupes islamistes s’élevait probablement à 300 millions de dollars. « Si vous ajoutez cette somme aux autres 700 millions de dollars qu’ils [les autorités de Doha] ont payés à l’Iran, cela signifie que le Qatar a en tout dépensé environ un milliard de dollars dans cette affaire», a ajouté la même source.
 
Une rançon pour libérer des membres de la famille royale pris en otage « Si vous voulez savoir comment le Qatar finance les djihadistes, vous n’avez qu’à regarder cet accord pour la libération des otages », a déclaré au FT un membre de l’opposition syrienne qui a travaillé avec un médiateur d’Al-Qaïda sur les échanges d’otages en Syrie.
 
Selon cette source, ce n’est pas la première fois que ce genre d’accord est passé depuis le début de la guerre en Irak et en Syrie. Une autre source du gouvernement qatari a confirmé au FT que la rançon avait bien été versée. Doha n’a pour le moment pas confirmé les faits officiellement.
 
 
Cheikh Mbacké Guissé (Libération)