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QUI POUR ARRÊTER LES DERIVES DE LA FAMILLE WADE ?

Robert Badinter, parlant de Nicolas Sarkozy, exprimait ses craintes sur les dérives autocratiques du président français. L’ancien Garde des Sceaux lui reproche notamment de tenir le gouvernement, de nommer et de révoquer le premier ministre et les ministres, de tenir aussi le parlement (législatif), en tant que le chef de la majorité présidentielle. Que dire du président Wade et de sa mainmise étouffante sur les institutions de la République ?


Rédigé par leral.net le Mardi 3 Février 2009 à 05:40 | | 0 commentaire(s)|

b[Lorsque le singe joue avec des allumettes, c’est la forêt qui risque de s’embraser…

Au Sénégal, l’une des tâches principales auxquelles devraient s’atteler les candidats à la présidentielle de 2012 sera de rétablir l’équilibre des pouvoirs. Il sera aussi question pour les juristes et constitutionalistes de remettre en cause les « super pouvoirs » que la Constitution actuelle attribue au président de la République. Tout ce que les citoyens reprochaient à Abdou Diouf, ils sont en train de vivre le pire sous Abdoulaye Wade. A l’image de Dieu Tout-Puissant, le président (et chef de parti) s’arroge le droit de vie et de mort sur ses collaborateurs, sans mentionner le citoyen lambda qui du jour au lendemain peut se retrouver dans une cellule de la prison de Rebeus, sur un simple coup de téléphone. Les journalistes et les opposants au régime connaissent la chanson par cœur. Une police judiciaire au garde à vous, une justice très instrumentalisée et prête à assouvir les moindres « pulsions » d’un régime autocratique. Les « super pouvoirs » dont dispose le président de la République ont eu le mérite d’avoir transformé le héros de l’alternance en un véritable autocrate. Voilà pourquoi il n’hésite pas à chambouler le calendrier électoral pour des prétextes aussi bidon et fallacieux que les inondations, malgré les piètres mérites du plan Jakhaay. L’occasion faisant le larron, Abdoulaye Wade ne se fait pas prier pour exploiter la misère des populations de la banlieue dakaroise (pour reporter les consultations électorales), à chaque fois que les opinions lui sont défavorables. Ce président est incapable d’organiser des élections et les perdre. On comprend pourquoi sa ruse l’a amené à imaginer la création de nouvelles entités administratives comme les régions de Kédougou, Sédhiou et Kaffrine, dans le seul but de se soustraire à la sanction populaire en reportant les élections locales de mai 2008.

Si le pouvoir rend fou, l’excès de pouvoir rend débile

Etant donné qu’aucun contre-pouvoir ne l’arrête ou ne lui demande des comptes, Wade n’hésite pas à dissoudre les collectivités locales dirigées par ses adversaires. Ses décisions arbitraires inquiètent la République à tous les niveaux, et traduisent le mépris dont le pouvoir fait montre à l’endroit des citoyens appelés à exprimer leurs suffrages sur les élus locaux que le président de la République peut congédier à tout moment, comme il en fait avec ses ministres. A quoi bon dépenser des millions pour élire des personnes qui en fin de compte, se retrouvent sur des sièges éjectables ? Si la démocratie est un jeu, le président Wade est tout sauf fair-play. Evidemment, cela traduit les limites de notre démocratie pathogène qui ne sert plus de modèle depuis l’avènement de l’alternance. Elle est devenue une copie pâle et imparfaite de la monarchie. Abdoulaye Wade a instauré au Sénégal un système autocratique, « caractérisé par le pouvoir d’un seul : il tient d’une main gauche le gouvernement, et d’une main droite, la majorité présidentielle », ce que Robert Badinter reprochait exactement à Nicolas Sarkozy. Les deux présidents se ressemblent dans leur pratique de la politique à tel point que nous sommes tentés d’affirmer qu’ils consultent les mêmes conseillers…

L’assemblée nationale, ou le « bétail parlementaire »

Une « hécatombe » institutionnelle

L’euphorie suscitée par l’alternance du 19 mars 2000 a aveuglé le citoyen, au point de commettre l’erreur consistant à approuver majoritairement le projet de Constitution proposé par le président Wade. Depuis lors, bonjour dérive ! Tous les pouvoirs se retrouvent concentrés entre les mains d’une seule personne. L’excès est toujours nuisible. L’excès de pouvoir est le soubassement et à l’origine de toute dérive totalitaire. La Constitution du 22 janvier 2001, même si elle fait l’objet d’un consensus national, lui confère beaucoup trop de pouvoir. L’arme de la « dissolution » brandie par les partisans du président de la République pose un problème à la démocratie sénégalaise dont elle révèle les tares, à l’image de la justice très partisane et qui constitue le maillon faible du système. Après la prolongation illégale et injustifiée du mandat des députés, sans mentionner le report multiple d’élections (locales et législatives), domaine de prédilection du président Wade, voilà qu’un décret est signé, afin de satisfaire les caprices du président qui souhaite ne rencontrer aucune opposition à son pouvoir autocratique. L’assemblée nationale-pardon-le « bétail parlementaire » du président s’est activé pour examiner et adopter les textes législatifs et règlementaires portant projet de décret de dissolution des Conseils Municipaux de Thiès, de Mbour, de Kédougou, de Kayar, de Ndiayène Sirakh ; des communes d'arrondissement des HLM, de Golf sud, et des conseils ruraux de Sangalkam, Sindia et Malicounda., tous donc favorables à l'opposition. La mairie de Fatick dirigée par le désormais opposant Macky Sall n’a pas échappé à l’hécatombe qui a imposé à chacune des collectivités locales ci-citées, une délégation spéciale composée en partie par des proches du fils du président de la République. Ceci n’est rien d’autre qu’un coup d’Etat institutionnel, après la résurrection du Sénat dont 65 pour cent sont nommés par le président de la République qui, dans ses dérives vient de supplanter son Sénat illégitime sur l’assemblée nationale dont les composants sont élus au suffrage universel direct. L’hécatombe institutionnelle nous a aussi coûté la révision du mandat du président de l’assemblée nationale, de cinq à un an, une loi rétractive, une loi très personnelle en vue de liquider politiquement Macky Sall. Le député libéral Abdou Fall a révélé la supercherie en confirmant sur les ondes de la RFM que « l’assemblée pouvait revenir au mandat de cinq ans, étant donné que M. Sall a été poussé dans le « Maquis », et qu’il ne constituait plus une menace », ce qui balise la voie au fils du président qui se retrouve seul à combattre dans l’arène.

Jamais sans mon fils

Ses bras de fer répétés avec ses anciens collaborateurs Idy et Macky, et dernièrement la presse privée, dénotent à quel point le président a du mal à cohabiter avec des personnes aux points de vue différents du sien. Le 19 juillet 2008, Abdoulaye Wade déclare sans ambages : « Je détiens aujourd’hui tous les leviers du pouvoir et j’en donne à qui je veux ». Voilà l’une des raisons pour lesquelles il préfère concentrer tous ses efforts à mettre son fils en avant, au détriment des Sénégalais dignes qui se sont battus bec et ongles pour le porter au pouvoir. Abdoulaye Wade semble avoir trouvé en son fils, sa fontaine de jouvence, à même d’expier ses péchés et de perpétuer sa « bénédiction » et son règne « éternel » sur ses sujets que nous sommes. Voilà aussi pourquoi des députés de son parti n’hésitent pas à renvoyer d’autres députés qui osent dire non aux dérives totalitaires et autocratiques du président. L’autoritarisme et l’insolence de Doudou Wade, neveu d’Abdoulaye Wade et président du groupe parlementaire libéral et « démocratique » pose un sérieux problème au parlement. Le Sénégal serait-il devenu une oligarchie où règne la famille Wade en toute puissance et en toute impunité ?

A force de trop fréquenter les monarchies du Golf,]b

On finit toujours par prendre la République pour une cour…

En tout état de cause, il y a de quoi être inquiet pour l’avenir de notre République qui désormais se conjugue au passé. Nous sommes en train de sortir de l’histoire par la petite porte, pour entrer « triomphalement » dans l’ère de l’autocratie, de la monarchie et de l’oligarchie. Le Sénégal sous Wade semble avoir opté pour ces trois systèmes politiques, bien qu’ils soient très peu conciliables. Toutefois, les Sénégalais ont toujours su prendre leurs responsabilités à temps. Nous nous donnerons les moyens démocratiques nécessaires afin d’extirper la famille Wade des entrailles de la République. Au pire des cas, la communauté internationale pourrait intervenir d’urgence afin d’éviter le syndrome de l’ « ivoirité » qui guette le Sénégal, le jour où le fils du président prend officiellement le pouvoir. Eût-il employé des moyens démocratiques pour succéder à son père (ce qui est très improbable), l’ascension forcée du fils du président prendra fin, le jour où la vaillante « jeunesse malsaine » dont parlait Abdou Diouf, décide de lui faire face. Tout porte à croire qu’Abdoulaye Wade est pris en otage par son fils Karim et son entourage qui ont commencé à défier ouvertement le président. Il faut sauver le « soldat » Abdoulaye Wade, en l’aidant à quitter le pouvoir de façon pacifique, avec sa famille « dans ses bagages », avant que l’irréparable ne se produise. Force est de noter que le président ne contrôle plus grand-chose au Sénégal, et ne tire pas profit des super pouvoirs dont il dispose, si ce n’est d’obéir au dictat et aux caprices du fils biologique. Ce dernier, avec les moyens de l’Etat mis à sa disposition, contrôle le gouvernement, les représentations diplomatiques, l’assemblée nationale et s’apprête à mettre la main sur les collectivités locales, avant de parachever son coup d’Etat institutionnel par une intronisation au palais de la République. Karim Wade fait semblant d’ignorer que le dernier mot revient aux citoyens qui jusqu’à l’extinction du soleil, n’accepteront jamais, un « président imaginaire » qu’on leur aura imposé.

Karim Wade, ou le président imaginaire

Le processus de monarchisation enclenchée par la famille Wade frôle même le ridicule ; il ne repose que sur du vent, malgré tout le tapage médiatique autour de Wade Junior dont le seul mérite est d’être le fils du président. En ce moment, une bonne partie du clergé musulman préfère se bâillonner, pour ne pas frustrer le pouvoir politique ; beaucoup de ces religieux s’autocensurent, et avouent leur impuissance ou leur complicité devant les dérives de la famille Wade dont les conséquences ne seront salutaires pour personne. De grâce, que ces guides religieux ne jouent pas aux sapeurs pompiers, le jour où le pays sombre dans l’anomie, suite à l’intronisation forcée du « président imaginaire » au palais de la République. Eût-il employé des moyens démocratiques pour s’imposer à nous, eût-il disposé de l’armée et de tous les pouvoirs possibles et imaginables comme Faure Gnassingbé, nous serons toujours prêts à sacrifier nos vies, afin d’empêcher la transition monarchique du pouvoir et la Togo-i-sation du Sénégal. L’imposture ne saurait durer. Dans la quête permanente de la liberté, de l’égalité et de la promotion des valeurs démocratiques et républicaines, seule une justice impartiale, une vraie, puisse guérir la République de l’excès de pouvoir dont font montre Wade père et fils. Nous ne voulons pas d’un « président imaginaire », encore moins d’un imposteur qui utilise les moyens de l’Etat pour s’offrir le beau rôle avant de s’imposer à nous. A bas la République, et vive la monarchie !

Momar Mbaye

mbayemomar@yahoo.fr

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