Pour se rendre à la mosquée, ou assister à des cérémonies officielles, Namory s’est fait récemment tailler un costume traditionnel sur mesure. Sauf qu’il s’est autorisé quelque chose qu’il n’aurait jamais envisagé ne serait-ce qu’il y a un an : le tissu choisi est de couleur vert émeraude.
« Je n’aurais jamais porté cette couleur au cours des 22 dernières années. Les gens auraient dit "oh, il est membre du parti de Jammeh" !,explique-t-il. Mais maintenant ça devient une couleur comme une autre. Et je suis content de pouvoir à nouveau porter ma couleur préférée, j’adore cet habit ».
Le vert se dépolitise, donc, même si la couleur rappelle de trop mauvais souvenirs à certains pour la porter. Mais ça ne fait pas l’affaire des vendeurs de tissus.
« Vous voyez ce vert ? Il ne reste que du vert ! Ca ne part plus aussi vite maintenant, c’est un problème, se désole Baba, un vendeur de tissu qui écoulait des mètres et des mètres de vert à l'approche des grandes cérémonies d'Etat. Avant, du temps de Yahya Jammeh, on écoulait ça en grande quantité d’un coup, mais maintenant qu’il est parti… »
Yahya Jammeh n’avait pas choisi cette couleur pour son parti au hasard. « C’est lié, d’une part, au rapprochement opéré par Jammeh, à ses débuts, avec Mouammar Kadhafi. Certains des premiers militants de l’APRC ont été entraînés en Libye, et se sont imprégnés de la théorie du Livre Vert. D’autre part, Jammeh a longtemps essayé de rattacher cette couleur verte à l’islam », analyse l’historien Hassoum Ceesay.
Plus possible donc de repérer les supporters de Jammeh à la simple couleur de leur chemise, mais il n’y a pas de doute possible en revanche quand on croise des Gambiens qui portent toujours fièrement des tee-shirt à l’effigie de l’ancien président.
rfi.fr