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Scandale en Angleterre : Un médecin célèbre cachait un Nigérian, réduit en esclavage, depuis 24 ans

Rédigé par leral.net le Vendredi 8 Mai 2015 à 12:46 | | 0 commentaire(s)|

Un Nigérian de 39 ans a témoigné devant la cour de ses 24 années d'esclavage passées auprès des Edet, un couple de Londoniens. L'obstétricien et gynécologue renommé qui le tenait enfermé chez lui avait confisqué son passeport et l'homme n'osait pas avouer sa clandestinité à la police. Chargé d'entretenir la maison et de garder les enfants, il était traité comme un animal et n'était pas payé.


Scandale en Angleterre : Un médecin célèbre cachait un Nigérian, réduit en esclavage, depuis 24 ans
Emmanel Edet, célèbre gynécologue britannique, et son épouse Antan, elle aussi dans le domaine médical, sont actuellement poursuivis dans une affaire d'une extrême gravité. Le couple de sexagénaires est aujoiurd'hui accusé d'avoir fait entrer illégalement en Angleterre un adolescent nigérian alors que celui-ci n'était encore qu'un adolescent.

Ofonime Sunday Inuk avait été emmené de son pays natal par les Edet en 1989. Il n'avait alors que 14 ans. Il avait accompagné le couple en Israël d'abord avant de rejoindre la Grande-Bretagne ensuite. Il avait dû suivre les déménagements successifs de la famille selon les occupations professionnelles du médecin, s'occupant du ménage et endossant le rôle de concierge et de nounou pour les enfants du couple.

L'acte d'accusation établit une pression et une manipulation psychologiques graves: Inuk était devenu tellement dépendant de ses "maîtres" qu'il avait l'impression qu'il était inimaginable de les quitter, alors qu'il n'était jamais enfermé.

Afin de s'assurer sa loyauté, le médecin avait prévenu le Nigérian: sortir de la maison revenait à courir le risque d'être repéré et arrêté par la police. Quant à confier à la police qu'il était l'esclave du couple, cela revenait à avouer qu'il était un illégal et risquer d'être renvoyé au Nigeria.

Le couple de Perivale (au nord-ouest de Londres) dément cependant formellement ces accusations d'esclavagisme et a plaidé non coupable sur toute la ligne, y compris les charges d'immigration illégale et d'actes de cruauté envers un mineur de moins de 16 ans.

Pourtant, la cour ne peut que constater le réel désarroi de la victime aujourd'hui âgée de 39 ans. Mardi, à l'audience, Inuk a reçu à la barre une copie de son passeport. Il n'a pu contenir son émotion devant le document d'identité qu'il n'avait plus pu toucher depuis 2001. Devant la surprise du ministère public, il a expliqué que le Docteur Edet emportait toujours son passeport avec lui et que celui-ci lui avait dit que "le passeport était périmé et que je devais retourner au Nigeria pour en obtenir un nouveau". Le médecin lui avait promis de lui procurer un billet d'avion spécial via son ambassade, mais que cela ne s'était finalement jamais produit.

Malgré le harcèlement dont il faisait l'objet, Inuk avait décidé que ses conditions de vie étaient inhumaines et il avait tenté de parler de son cas à un ami de la famille, un généraliste à qui il avait confié se sentir "abattu" après que la police lui avait dit ne pouvoir l'aider. Cette conversation remontait à 2005 et ni la police contactée ni le membre du parlement n'avaient agi pour le sortir de cette situation inadmissible. Là encore, les preuves des accusations sont présentes au dossier: le procureur dispose de la déposition faite au commissariat de Greenford il y a dix ans. Accompagné par un ami qui avait pris la parole pour lui "car il n'était habitué à avoir un interlocuteur", il avait vu sa plainte classée comme une "perte de passeport". Le procureur a également signalé l'erreur de l'agent de police qui avait erronément estimé ne pas pouvoir l'aider.

Inuk a par ailleurs raconté son calvaire et le fait qu'il se sentait "malade de devoir toujours rester à l'intérieur de la maison". Dans une autre tentative d'échapper à ses tortionnaires, il avait appelé l'armée. Mais le secrétariat avait rejeté ses appels à l'aide en lui signalant qu'il lui fallait nécessairement un passeport pour s'identifier. Il avait donc continué à endurer sa vie de misère, dormant à même le sol, s'occupant du ménage et de garder les enfants au moins 17 heures par jour.

Quant à la famille d'Inuk, elle avait également tenté d'entrer avec la femme du couple après une lettre du jeune homme datée de 2004. La famille nigériane s'inquiétait de sa manière de décrire la manière dont il était traité. Il s'est souvenu de la colère d'Antan Edet lorsque son cousin nigérian était venu s'assurer qu'il allait bien. Devant lui, elle avait affirmé avoir transféré de l'argent au Nigeria sur un compte en banque qui devait lui permettre d'obtenir des papiers en règle. Mais jamais Inuk n'a vu de trace de ces versements.

Le généraliste qu'il avait contacté lui avait malgré tout proposé de contacter pour lui l'ambassade et de tenter d'obtenir le passeport dont il avait besoin. Mais Inuk n'avait pas osé accepter son aide, par peur et par manque d'argent pour payer ses papiers d'identité. Il avait alors trop peur également de la crainte des Edet s'il leur demandait la somme nécessaire.

L'esclave avait également demandé à ses amis et proches de ne plus lui écrire car les Edet ouvraient et lisaient son courrier, tout comme ils contrôlaient ses effets personnels, et il craignait plus que tout leurs représailles. C'est finalement en 2014, alors que les Edet étaient partis en vacances au Nigeria, que la victime a entendu à la radio qu'un cas similaire au sien avait été déclaré et qu'une enquête était en cours. C'est grâce à cela qu'il a trouvé le courage de contacter Scotland Yard.

Dans le voisinage, c'est le choc depuis que le scandale a été révélé par Scotland Yard. Le couple était extrêmement respecté et Inuk ne faisait que de rares apparitions au cours desquelles il n'avait jamais rien osé dire aux voisins des Edet. "Je lui disais régulièrement bonjour, il ne m'a jamais dit être en captivité". Certains voisins croyaient même que le jeune homme était le fils du couple, et qu'il sortait simplement peu de chez lui. Un adolescent trop discret, en somme.

Le procureur a employé des termes très dur envers les accusés: "Ils ont mis Inuk sous leur coupe. Ils lui ont pris sa jeunesse, l'ont privé d'éducation et de toute vie de famille", a-t-il clamé pour résumé les 24 ans d'esclavage imposés au jeune homme. Terrifié par le couple, qu'il n'avait plus vu depuis sa libération, Inuk a témoigné au procès derrière un écran afin de ne pas être confronté à ses bourreaux et d'oser livrer son histoire devant la cour.

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