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Sénégal : Notre pays face à son destin

Rédigé par leral.net le Vendredi 27 Mars 2015 à 09:52 | | 0 commentaire(s)|

Sénégal : Notre pays face à son destin
Le procès de KARIM WADE a vécu. Le Président de cette juridiction d’exception qu’est la CREI a dit le droit, tel que cela lui était possible, au vu des conditions dans lesquelles s’est tenu ce fameux procès, entre mélodrames réels ou feints, invectives, gestes obscènes et polémiques futiles.

Une page de notre histoire vient de se fermer. Il s’agit pour nous d’en écrire désormais de nouvelles.
Sous le sceau de la continuité, selon le pouvoir en place, qui compte réformer la CREI et la maintenir dans notre arsenal juridique, en concurrence avec la Haute cour de Justice qui lui dispute le privilège de juger les hauts fonctionnaires et autres ministres.

Quoi qu’il en soit, prêtons à Henri Grégoire DIOP le crédit d’avoir rempli sa mission. A la société sénégalaise au nom de qui la justice a été rendue de se saisir de ce verdict et de mesurer à l’aune de sa satisfaction, si l’objectif que le gouvernement poursuivait en son nom a été atteint.

Ce qui est évident, c’est qu’il y aura désormais un avant procès Karim WADE et un après procès KARIM WADE.
Pourrions-nous échapper aux conséquences de cette situation ? N’aura-t-elle pas des ramifications jusque dans les méandres de notre avenir proche ? Le gouvernement de MACKY, acteur de ce procès, n’en subira t-il pas les conséquences. ?

Toutes ces questions méritent d’être posées, dans un contexte où on a obséquieusement élevé la reddition des comptes au rang de demande sociale, en présentant le fils de Me WADE comme la victime expiatoire qu’il faudra sanctionner en premier, pour marquer les esprits et mettre une épée de Damoclès sur la tête de tous les caciques du PDS, car, après KARIM, qui parmi eux oserait se croire intouchable ?

« Le monde est vieux, mais l’avenir sort du passé », a dit un sage africain ; MACKY issu des flancs du PDS, apparatchik de ce parti pendant les huit ans qui ont précédé sa brouille avec son père Me WADE, pourra t-il lui-même dans un futur proche échapper au couperet de cette juridiction d’exception ?

Riche de plusieurs milliards, propriétaire de villas et de plusieurs terrains, et d’un patrimoine de véhicules au nombre absolument scandaleux, qu’adviendra t-il de lui, quand il ne sera plus protégé par sa fonction actuelle ? Que dire de son épouse, propriétaire de deux villas d’une valeur de 150 millions alors que l’ensemble des sénégalais ne lui connait ni emploi ni fortune familiale ?

MACKY décidément à l’aise dans le rôle de bras armé d’abord de Me WADE contre IDY et maintenant de plusieurs cercles d’influence politiques et économiques contre le clan des WADE est en train de se faire un nombre incalculable d’ennemis, en réussissant à cristalliser en même temps le ressentiment d’une grande partie des sénégalais qui ne lui toujours pas pardonné le peu de respect qu’il a envers leurs guides religieux, dont ’il ravale chaque jour encore plus l’autorité morale, en faisant fi de leurs suppliques.

Ce qui me fait le plus mal pour mon pays, c’est cette tendance à considérer les tenants du pouvoir du moment comme des êtres parfaits, probes, dotés de compétences et de valeurs qu’ils auraient acquis subitement dès que le pouvoir a basculé dans leurs mains. Et de considérer les opposants comme des gens faux, malhonnêtes, ignares et fourbes !

Cette vision manichéenne qui exacerbe les tensions empêche le dialogue franc, et la prise en compte de part et d’autres de l’intérêt supérieur de notre pays. Cette situation regrettable ne favorise de grands consensus sur les questions essentielles dont l’avenir de la nation dépend. Le dialogue politique fécond qui doit déboucher sur de larges compromis dynamiques n’est jamais établi.

On se toise, on se regarde avec dédain, on s’invective. Les plateaux télé sont ainsi devenus des rings où son absentes les préoccupations du peuple sénégalais.

Cette fuite en avant a une destination où finira inexorablement par arriver notre pays. Ce jour-là, ne soyons pas surpris de voir tous ensemble où on aura réussi à conduire notre nation éplorée.

« L’enfer est pavé de bonnes intentions, » dit un adage dont j’ai oublié la source.

Nous n’en aurons jamais assez de poser la nécessité d’un dialogue qui doit être permanent. Parce que le problème fondamental est que les tenants du pouvoir actuel qui ne mesurent peut être pas combien le temps au pouvoir est fugace au point de se permettre certains abus vont devoir bientôt remettre leur mandats en jeu, par le truchement d’élections dont ils ne maîtrisent pas du tout l’issue. De même, les opposants virulents au régime dont les écarts de langages raisonnent encore dans nos oreilles nous disaient il y a peu d’années encore que l’art était difficile, mais que la critique était facile. S’en souviennent–ils seulement ?

Si aujourd’hui les adultes et autres personnes considérées comme responsables ont perdu la raison, c’est à nous autres jeunes de la retrouver, et d’en faire bon usage. Birago DIOP a dit quelque part que « Le Jeune qui a fait cent villages est l’égal du Vieux qui a vécu cent ans ». Un adage bien de chez nous ajoute que le bon sens n’a pas d’âge…

Nous sommes près de soixante pour cent de la population. Ce sont les jeunes qui produisent près de 97 % de la richesse nationale.

Mais, quand il s’agit de décider, notre pays est entre les mains de vieillards cacochymes ou de vieux adultes plus préoccupés d’extirper leurs sorts du jeu des aléas démocratiques que de prendre en compte les véritables préoccupations de nos familles, de notre société tout court. Nous ne pouvons continuer à accepter cet état de fait.

Il est inutile de brûler le pays ou de casser les biens acquis par l’Etat avec nos impôts. Mais la mobilisation citoyenne des jeunes en général et leur engagement politique en particulier doivent contraindre pouvoir et opposition à poser de manière consensuelle les conditions d’un dialogue apaisé.

Nous oublions quelquefois que nous faisons partie du peloton de queue des pays les plus pauvres au monde. Nous ne pouvons vouloir rattraper notre retard et nous offrir le luxe de disputes interminables dont la finalité est la prise en otage des attentes véritables d’une population flouée continuellement par une classe politique qui n’a pas changé depuis 30 ans, et qui a contribué à nous maintenir dans la pauvreté généralisée dans laquelle nous baignons jusqu’à nos jours.

Il est grand temps qu’une véritable alternance générationnelle survienne au sein des chapelles politiques d’abord, pour un véritable changement qualitatif à la tête de nos institutions, et de notre pays enfin, si les populations jugent que MACKY n’est pas l’homme de la situation !

Cissé Kane NDAO
Président de l’A.DE.R