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Sommes-nous égaux devant la loi ? - Par Dr Serigne Dieng

Rédigé par leral.net le Jeudi 18 Février 2016 à 09:23 | | 0 commentaire(s)|

Sommes-nous égaux devant la loi ? - Par Dr Serigne Dieng
A l’annonce de la liberté provisoire de Thione Seck, j’ai ressenti, en tant que fan, un agréable soulagement. Aussitôt, je n’ai pu m’empêcher de penser à certains de mes parents, amis et compatriotes qui n’ont pas eu cette faveur. J’ai particulièrement pensé à cette importante population carcérale à qui non seulement la liberté provisoire est systématiquement refusée mais est gardée en détention préventive sans jugement depuis plusieurs années (jusqu’à 7 ans) et qui n’espère pas de réparation en cas de relaxe. Bien des exemples me fondent à dire qu’il y’a sans doute une stratification sociale de la clémence ou de la rigueur que la Justice affiche à l’endroit de nos détenus.

En effet, le cas Thione Seck est un exemple éloquent car, arrêté en possession de faux billets de banque estimés à plusieurs milliards de nos francs, il vient de bénéficier d’une liberté provisoire à la suite de « minces » rumeurs de soucis sanitaires. La première dame du Sénégal, Mariéme Faye, avait fait l’objet d’une plainte à la CREI de la part de Serigne Assane Mbacké pour corruption. Elle aurait bénéficié d’une subvention de plusieurs centaines de millions de nos francs accordés par une banque qui était inscrite dans le patrimoine « illicite » de Karim Wade. Elle n’a jamais été entendue et aucune enquête n’a été ouverte sur ce dossier. Nous avons aussi assisté avec émoi, à l’extirpation du mari de l’ex première ministre, madame Mimi Touré, des mailles de la justice, alors qu’il s’était permis de proférer des insultes à l’endroit des policiers. Quid du frère du président de la République, Aliou Sall ? Cité dans des scandales financiers (petro-tim, gaz…), la justice sénégalaise, notamment le procureur (ou la CREI) a fait la sourde oreille malgré les accusations insistantes de corruption et de blanchiment d’argent. Comme un Duc vexé, il a fait preuve d’une arrogance et d’une grossièreté inacceptable à l’endroit de Birahim Seck du forum civil. Le cas de Barthélemy Dias est plus flagrant encore. Ce monsieur qui a publiquement reconnu avoir tué une personne, a été sorti de prison et élu député de la République en total indifférence de l’éthique républicaine dont devrait faire montre le président de la République. La liste est longue et il y figure des pédophiles….

Il faut préciser que ces constats ne remettent aucunement en cause la présomption d’innocence des personnes sus citées, mais rendent compte de la honteuse réalité de traitement inéquitable des citoyens devant la loi. Notre pays traite les accusés selon la célébrité ou l’anonymat, la richesse ou la pauvreté, l’appartenance au pouvoir ou à l’opposition, la notabilité du citoyen… La belle phrase selon laquelle personne n’est au dessus de la loi n’est qu’arnaque. Des sénégalais, la majeur partie, sont bien au dessous de la loi qui les écrase sans pitié alors qu’une castre de privilégiés, minoritaires, si elle n’est pas au dessus de la loi, est assurément aux côtés de la loi. Des violeurs, des pédophiles, des délinquants, de grands criminels économiques…se pavanent librement, protégés qu’ils sont par une sorte « d’oligarchie ». Au même moment, des citoyens sont entassés comme des esclaves dans des cellules exigües et nauséabondes. Certainement, ils ont volé, ou agressé ou même tué. Ils doivent pour cela, payer, c’est indéniable, car la protection des biens et des personnes n’est efficace que si la loi sévit dans toute sa rigueur. Mais ont-ils fauté plus que les autres ? Alors, au nom de quoi, doivent-ils être les seuls à répondre de leurs forfaits ou les seuls à être privés de toute clémence de la loi ? Sont-ils considérés comme des citoyens insignifiants, qui ne méritent que dédain et châtiments ?

Nous devons revoir notre système judiciaire, le rendre plus juste et plus équitable. Il est important de reconsidérer l’accusé, de déconstruire le système inégalitaire, de rompe la chaine de corruption qui protège et favorise des délinquants. Nous devons rendre à notre justice toute sa noblesse, celle de protéger équitablement les citoyens. Cela demande, une éducation citoyenne, une conscience déontologique et une indépendance de la Justice. Le parquet doit cesser d’être sous la tutelle de l’exécutif pour être un organe élu par le peuple.

Dr Serigne Ndame Dieng,
Secrétaire administratif de la fédé PDS/France
Membre de démocrates réformateurs de France