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Trump prend l’air à l’étranger, ses ennuis continuent aux Etats-Unis

Rédigé par leral.net le Samedi 27 Mai 2017 à 20:21 | | 0 commentaire(s)|

Donald Trump faisait cette semaine ses premiers pas sur la scène diplomatique mondiale. Une tournée plutôt réussie pour le président américain, qui va toutefois vite être rattrapée par la dure réalité de Washington.


Samedi 20 mai - Et c’est parti

Jamais aussi heureux que lorsqu’il se sent adulé, Donald Trump ne pouvait guère rêver d'un meilleur début  pour sa première tournée diplomatique. A Ryad, le président américain a été accueilli par le roi Salmane à sa sortie d’Air Force One, un honneur que le souverain saoudien n’avait pas réservé à Barack Obama.

Drapeaux américains et portraits géants de Trump dans les rues de Ryad : les Saoudiens, désireux de relancer la relation bilatérale avec Washington, ont bien compris qu’avec Trump, la flatterie est la meilleure des armes. Le milliardaire le leur rend bien. Non seulement il leur a fait l’honneur de son premier déplacement à l’étranger, mais entre l’Iran et l’Arabie Saoudite, les deux rivaux du Proche-Orient, Trump a clairement choisi son camp.

Soigneusement préparée depuis des mois, notamment par le gendre du président, Jared Kushner, cette étape saoudienne a débouché, dès samedi, sur la signature de juteux accords commerciaux, immédiats ou à venir. Montant global : 380 milliards de dollars (339 milliards d’euros) dont 110 milliards de contrats d’armements. «C’était une journée formidable», s’est réjoui le président américain. «Des centaines de milliards de dollars d’investissements aux Etats-Unis et des emplois, des emplois, des emplois». Son leitmotiv.

Dimanche 21 mai - Sur l’islam, un grand écart

Docteur Donald et Mister Trump. Après une campagne ouvertement islamophobe, le président américain a prononcé en Arabie Saoudite un discours étonnamment modéré. Où était donc le théoricien du Muslim ban, qui voulait bannir tous les musulmans des Etats-Unis et déclarait l’été dernier : «L'islam nous déteste» ? Devant une cinquantaine de dirigeants arabo-musulmans, Trump a salué «l’hospitalité» des Saoudiens et la «grandeur» de la civilisation musulmane. Avant d’appeler à combattre le terrorisme. Sans amalgame : «Ce n’est pas une bataille entre différentes religions ou différentes civilisations. C’est une bataille entre des criminels barbares qui essaient d’anéantir la vie humaine et des gens bien de toutes religions qui cherchent à la protéger. C’est une bataille entre le bien et le mal.»

Alors, qui est (et que pense) le vrai Donald Trump ? Son ton modéré va-t-il perdurer ? «Les opinions du président continuent d’évoluer», estime son secrétaire d’Etat, Rex Tillerson. «Il n’y a rien de mieux pour apprendre et comprendre les gens que de venir chez eux, où ils vivent, de les rencontrer et de voir leurs familles, leurs communautés, et de découvrir que nous voulons tous la même chose pour nous-mêmes et nos familles : la paix et la prospérité». Amen.

Lundi 22 mai - «So amazing !»

La mémoire de la Shoah peut-elle être «so amazing» ? Oui, en a décidé Donald Trump, qui a laissé quelques mots enjoués - et en majuscules - dans le livre d’or du mémorial de Yad Vashem, à Jérusalem. «C’est un grand honneur d’être ici avec tous mes amis. Tellement incroyable - je n’oublierai jamais!», a précisément écrit le président américain, pas réputé il est vrai pour la profondeur de son champ lexical.

Mi-atterré, mi-moqueur, Internet s’est en tout cas empressé de comparer le message de Donald Trump avec celui laissé au même endroit par Barack Obama. A l’été 2008, celui qui était alors sénateur de l’Illinois, avait qualifié le mémorial de «rappel puissant de la capacité des hommes à commettre le mal, mais aussi de la capacité à se relever des tragédies et à reconstruire le monde». Sur Twitter, le montage montrant côte à côte les messages des deux présidents a été retweeté des centaines de milliers de fois. «Cela me rend triste», a sobrement commenté Ian Bremmer, l’un des grands spécialistes américains de la politique étrangère.

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Trump, Obama notes left at Yad Vashem, Israel's memorial for the Holocaust. 

This makes me sad.

Mardi 23 mai - Un budget cruel

Les pauvres, les femmes, les enfants, l’environnement, l’Onu, la recherche scientifique : voilà quelques-unes des victimes du premier budget de l’ère Trump. On en connaissait déjà les grandes lignes. Les détails en ont été dévoilés mardi. Et ils donnent froid dans le dos. Outre une augmentation colossale du budget de la Défense (environ 10%) et 2,6 milliards de dollars supplémentaires pour la protection des frontières, tous les ministères et agences voient leurs crédits réduits. Pour ne pas dire amputés : moins 31,5% pour la diplomatie et l’aide internationale, idem pour l’Agence de protection de l’environnement (EPA), réduction de près de 13% pour l’éducation. «Les chiffres présentés rendraient impossible pour l’ONU de poursuivre l’ensemble de ses missions essentielles», a prévenu le porte-parole des Nations- unies.

En dix ans, l’Exécutif américain veut économiser 1700 milliards de dollars dans les programmes sociaux en réduisant notamment de 800 milliards le budget de l’assurance-santé pour les plus modestes (Medicaid) et de près de 200 milliards celui des coupons alimentaires. En outre, ce projet de budget s’appuie une prévision de croissance de 3%, jugée irréaliste par la quasi-totalité des économistes. «Ce budget éviscère l’aide pour les pauvres et prévoit une croissance imaginaire. En d’autres termes, c’est une cruauté enveloppée dans un mensonge», résume sur Twitter Dana Milbank, chroniqueur au Washington Post. Seul motif d’espoir : ce projet de budget présenté par la Maison-Blanche n’a quasiment aucune chance d’être adopté en l’état par le Congrès, qui a jusqu’au 30 septembre, pour voter un texte.

Mercredi 24 mai - Douloureuse réforme

Si elle devrait permettre d’économiser une dizaine de milliards de dollars par an, la réforme de la santé des républicains pourrait coûter très cher à des millions d’Américains. Mercredi, le Bureau du budget du Congrès  (CBO) a chiffré les conséquences du texte de loi adopté début mai par la Chambre  des Représentants . Résultat : 23 millions d’Américains privés de couverture santé dans les dix ans, dont 14 millions dès la première année. L’intégralité des gains effectués sous l’Obamacare, bête noire des républicains, serait ainsi balayée. La faute à une loi républicaine qui réduit drastiquement les aides financières pour souscrire une assurance ainsi que le budget fédéral pour Medicaid, l’assurance gratuite réservée aux Américains les plus modestes.

Baptisée Trumpcare par ses détracteurs, cette loi est une question «de vie ou de mort pour beaucoup d’Américains», a dénoncé le représentant démocrate du Kentucky, John Yarmuth. Après le vote précipité - et de justesse - à la Chambre, le texte doit maintenant être adopté par le Sénat, où la majorité républicaine ne tient qu’à deux sièges (52 contre 48). Les sénateurs conservateurs ont entamé une réécriture complète du texte, qui n’a aucune chance d’être adopté en l’état. Et le chiffrage du CBO n’arrange pas les affaires républicaines. «Je ne sais pas comment nous pouvons arriver à 50 votes pour le moment», a reconnu le leader républicain du Sénat, Mitch McConnell, «mais c’est notre but».

Jeudi 25 mai - Fraîche ambiance à l’Otan

Dans une tournée diplomatique dans l’ensemble plutôt réussie, la journée de jeudi restera comme la plus délicate pour Donald Trump. A Bruxelles pour le sommet de l’Otan, le président américain a bousculé ses partenaires. Au sens propre comme figuré. D’un geste brutal de la main droite, il a ainsi écarté le Premier ministre du Monténégro pour s’imposer au premier rang de la traditionnelle photo de famille. Et au cours de son bref discours, sous les regards interloqués voire amusés de ses homologues, il s'est mué en donneur de leçons .

Reprochant à la quasi-totalité des membres de l’organisation de ne pas payer leur dû en matière de défense et d’avoir «des dettes» envers «les contribuables américains». Obnubilé par la lutte antiterroriste et le «partage du fardeau» budgétaire, Donald Trump n’a quasiment rien dit sur la menace russe. Il n’a pas non plus réaffirmé l’engagement des Etats-Unis envers l’article 5, qui prévoit la solidarité des membres de l’Otan en cas d’attaque contre l’un d’entre eux. Du jamais vu pour un président américain depuis la création de l’Otan, il y a près de 70 ans. Et une «erreur majeure», selon l’ancien ambassadeur américain à l’Otan, Nicholas Burns.