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"Tuez" le Pr Serigne Diop, mais de grâce ne le déshonorez pas ! (2/3)


Rédigé par leral.net le Samedi 12 Mars 2016 à 22:23 | | 0 commentaire(s)|

(Pour immortaliser les enseignements de mes Maîtres à l’UCAD et rendre hommage au Ministre Thérèse Coumba DIOP)

II. VISITE GUIDEE DANS LA MANUFACTURE DU TAILLEUR

Le texte, dans sa dimension stratégique, ne saurait se réduire à un simple exercice littéraire et la transparence tant vantée peut se révéler comme une simple capture de l’œil pour faire passer un projet sous-jacent. C’est dans une telle perspective que s’inscrit cette partie de « chasse » de sens. Ainsi, il sera demandé au lecteur, vigilance, patience et endurance, pour démêler l’écheveau du fil d’Ariane qui nous orientera dans les labyrinthes du texte du Professeur FALL, tout en tentant de l’agrémenter comme une visite guidée.

1. Le modèle de la camisole de fer

Ce qui, dans le discours, s’est présenté comme doté d’une rigueur implacable, relève plus d’un formalisme structurant que d’une densité théorique. En fait, l’épine dorsale de l’argumentaire repose sur une « logique » de base en trois temps que l’on peutrendreainsi, selon les mêmes formules du texte du Pr FALL :
a) Le Président de la République peut « recueillir l’avis » du Conseil constitutionnel en vertu de l’article 51.
b) Mais « le Conseil constitutionnel du Sénégal ne rend pas d’avis mais des décisions ».
c) « Et toutes les décisions, sans qu’il y ait lieu à distinguer là où le législateur ne distingue pas, s’imposent aux pouvoirs publics en vertu de l’article 92 de la Constitution. »
On voit qu’ainsi bâtie, la force persuasive ne réside pas sur la pertinence d’éléments juridiques, mais plutôt dans la nature du type de construction qui les supporte, avec une absence d’alternative ou un défaut de « falsifiabilité » des énoncés de base. Une telle architecture a la vertu de « confectionner » pour tout « AVIS », une camisole de fer qui inscrit tragiquement sa destinée, vers une « DECISION CONTRAIGNANTE ». Et, ce protocole a fonctionné comme la marque déposée d’un procédé typique aux « boîtes noires » des magiciens: le client commande un « avis consultatif », mais il lui sera, fatalement, livré une « décision contraignante » ! Le forcing est masqué, ici, par le « trou logique » entre les propositions (a) et (b), et ce saut est « si illogique » que l’on compte le combler dans le cadre de la présente révision constitutionnelle, avec l’introduction d’un nouvel alinéa au niveau de l’article 92 : « Le Conseil constitutionnel peut être saisi par le Président de la République pour AVIS. » Voilà le chainon manquant du raisonnement et qui aura, potentiellement, la vocation de se substituer à la proposition (a)!
Mais, à l’occasion, tout le juridisme qui se déverse à flot, ne fait qu’office de garnitures pour générer des aspects esthétiques, voire cosmétiques, devant faciliter une large acceptation du nouveau produit. Et comme la nature contraignante de la réponse est connue d’avance, tout se joue au niveau de la « requête », par le biais d’une mise en scène dont l’intrigue se noue autour des capacités à « délier » une « parole donnée ».
Cette importance de la formulation de la question pour orienter le caractère « contraignant » est défendue, par l’auteur, dans la comparaison entre deux cas : la « question de procédure » en 2000, suivie de la « Décision n° 3/C/2000 du 9 novembre 2000 pour laquelle «le Président de la République peut … » et la « question de fond » posée en 2016 et portant sur la « la conformité du projet de révision à l’esprit général de la Constitution » et qui se retrouve avec la « Décision n°1/C/2016 du 12 février 2016 « enjoignant au Président Sall … ». Mais, en toute rigueur, il faut souligner, contrairement à ce que l’on veut nous faire croire ici, il y a une évidente similarité entre les deux cas, avec le fait que le Conseil constitutionnel a toujours rendu une «Décision » et s’est toujours dit « être d’avis », autant pour la « question de procédure » que pour la « question de fond »!
En fait, le ventre mou du dispositif de production de la « contrainte », réside dans les modalités de dépôt de la commande qui mettent, actuellement, en « pole position », l’article 51 et non l’article 92. Et, à défaut de pouvoir formellement jouer sur les dispositions de l’actuelle Constitution du 22 janvier 2001, toujours en vigueur, afin d’établir, de manière avérée, les compétences contraignantes « prêtées » au Conseil constitutionnel dans le cas de la sollicitation d’un Avis, il est fait recours à une comparaison d’un autre type, avec un autre organe du pouvoir judiciaire: « un avis peut, dans bien des cas, être aussi contraignant qu’un arrêt ou une décision (voir à titre d’exemple, les avis sur les questions importantes de procédure ou de jurisprudence formulées par la Cour des comptes en vertu de l’article 19 de la loi du 27 décembre 2012) ».
Mais, cela ne suffit pas pour enrayer la notion «d’avis consultatif » en faveur de celle « d’avis contraignant ». D’où, tout l’intérêt de cette touche finale du tailleur sur l’habillage, pour avoir une effigie sous l’emblème d’un Conseil constitutionnel qu’on aura fini de transfigurer, pour le présenter sous le visage d’un « bouc émissaire » et/ou d’une méchante bête ».
2. Une effigie du gendarme pour le juge constitutionnel
Après que le Conseil constitutionnel se soit saisi de la patate chaude qu’on lui a refilée, il fallait bien s’y prendre pour en faire un véhicule institutionnel à même de livrer au peuple une marchandise dont on est assuré qu’il n’est conforme ni à sa commande et encore moins à ses attentes. Et, à défaut de pouvoir formuler, sans équivoque, des arguments sur les compétences de cet organe à contraindre le Président de la République dans le cas d’une demande d’« Avis », la rigueur juridique va céder la place à du talent « esthétique ». Ainsi, on a, plutôt, eu droit à une exégèse produisant des effets littéraires qu’à des « implications juridiques », sans pour autant qu’on soit parvenu à enlever, à la notion d’Avis, sa dimension « consultative ».

a) De l’argumentaire juridique aux effets esthétiques

On joue ici sur les perceptions pour faire prospérer, au sein de l’opinion, une certaine image du Conseil constitutionnel qui soit conforme au rôle qu’on attendait de lui :
 Les effets scéniques d’un décor bien planté : pour mieux asseoir le caractère contraignant de la « Décision », on nous invite, pour ne plus parler d’ « avis consultatif », à « relever la densité et la gravité des motifs (menace sur la sécurité juridique et la stabilité des institutions) et le ton impératif, voire martial du dispositif (le verdict) en particulier avec, par exemple, l’utilisation expresse et itérative de la formule «la disposition transitoire appliquant au mandat en cours la réduction du mandat doit être retirée du texte » ou « telle disposition doit être revue. » (dixit !) Il ne manque, ici, que des effets spéciaux, mélangés à la voix des cinq sages et à la hargne du greffier, pour obtenirl’adhésion des plus sceptiques sur la détermination du Conseil Constitutionnel à imposer « son avis » !
 Les effets visuels pour virer au rouge : pour la métaphore, on nous affirme que « le Président est bien contraint parce qu’ayant devant lui un feu rouge ». Mais, ce recours au «langage courant » relève d’un montage savamment orchestré pour faire accepter la pertinence argumentative de l’image : il avait fallu, auparavant, faire passer son alter ego, « le feu vert » pour qu’il soit devenu plus facile de convoquer, par modus ponens, l’interdiction. Ainsi, on nous affirmait qu’avec la Décision n° 3/C/2000 du 9 novembre 2000, suite à sa requête en vertu l’article 46 de la Constitution de 1963 (en 2000), le Président Wade « n’était donc pas contraint et avait même bénéficié du feu vert de la juridiction ». On y disait que « le Conseil était ainsi d’avis que : « Que le Président de la République peut, sur proposition du Premier ministre et après avoir consulté les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat, soumettre au référendum le projet de Constitution ». On remarque que c’est le même « peut » qu’on l’on retrouve dans l’article 41 de la Constitution de 2001, d’où on prétend tirer le « feu rouge ». En réalité, « avec ‟peut”, point de contrainte !», que ce soit avec la constitution de 1963 ou celle de 2001 ; « avec ‟peut”, point de vert ou rouge », car le feu est toujours orange !

Derrière toutes ces opérations, il y a une tentative de minorer la dimension consultative associée à l'Avis qui se révèle, néanmoins, assez coriace, puisque chaque fois qu’on tente de l’anéantir, elle renaît de ses cendres, quitte, encore, à être l’objet de nouvelles opérations réductrices.

b) L’Avis, tel Phénix

On semble assister à une épuration conceptuelle visant à bannir le recours à la notion d’ « Avis consultatif » tant qu’il est fait référence au Conseil constitutionnel. Et l’attaque en règle contre le Pr Serigne DIOP semble relever de cette orientation, lui qui affirmait que « la décision du Conseil constitutionnel n’est qu’un avis consultatif qui ne lie pas le Président ».
Mais, il fallait également faire le nettoyage du côté du Conseil constitutionnel où le terme est d’usage. Ainsi, le Professeur va nous avouer : «je dois reconnaître que lorsqu’on lit la décision du Conseil, on remarque … aussi un et seul aspect relevant littéralement d’un avis (entendu au sens courant) : c’est l’usage de la formule « Le Conseil est d’avis que… ». Mais, là, c’est à nous de nous poser des questions : est-ce par pure coquetterie que le Conseil consultatif utilise différemment les formules « Le Conseil est d’avis que… » ou bien, « le Conseil décide … » ? Pourquoi veut-on que si le Conseil dit « est d’avis que … », on doit toujours comprendre et entendre « décide » ?
Et Le Professeur FALL, lui-même,n’avait pas échappé à l’usage du terme d’avis pour caractériser un rendu dont l’acte était dénommé par le Conseil constitutionnel de Décision » puisque, comme il le souligne lui-même, « depuis sa création en 1992, le Conseil dénomme invariablement les actes qu’il rend décisions ». Et, pourtant, lui, d’affirmer, parlant du référendum de 2001dans « La révision de la Constitution au Sénégal »: « L’argument selon lequel la procédure est valable parce qu’avalisée par le Conseil Constitutionnel à travers un avis est, à notre sens, irrecevable pour deux raisons au moins : d’abord, il s’agit juste d’un avis (avec tout ce que cela implique en droit) qui ne peut autoriser, interdire ou couvrir une irrégularité ; ensuite, le Conseil Constitutionnel aurait même donné un avis qui dépasse le champ de ses compétences. »
Et , mieux encore, dans une autre publication de référence, il est arrivé au Professeurd’apparier la notion d’ «avis » à celle de « décision » : « A signaler à cet égard l’ouvrage publié en 2009 sous ma direction intitulé « Les décisions et avis du Conseil constitutionnel » et qui aurait dû, au surplus, s’intituler : « Les décisions du Conseil constitutionnel » parce que le Conseil sénégalais (je ne parle pas du Conseil français ou de celui d’un autre pays SVP) ne rend pas formellement d’avis, mais seulement des décisions. »
Mais comme ses positions en 2016, sont tout autre, il refuse que l’on parle de « volte-face », mais plutôt d’« évolutions sémantiques et juridiques entre l’article 46 de la Constitution de 1963 et l’article 51 de la Constitution de 2001 ». Mais, comme cette raison ne saurait suffire pour qu’on puisse enfiler au Conseil constitutionnel un masque plus grave que sa mine naturelle du fait qu’autant l’article 46 de la Constitution de 1963, comme l’article 51 de la Constitution de 2001 parle de « recueillir l’avis du Conseil constitutionnel », il finit par évoquer des complexités relatives à la situation actuelle. Mais, avec quels arguments ?

c) La publicité

Quand le professeur affirmait plus haut qu’il ne parlait pas du Conseil français ou de celui d’un autre pays, il relativisait l’usage de la notion d’avis que le Conseil constitutionnel ne rend pas formellement, et nous pensions (d’emblée), en plus du souci méthodologique, à la notion d’ « avis public ». Mais, voilà qu’il convoque le défaut de publicité pour marquer la différence entre « avis » et « consultation », en termes d’autorité et d’implications juridiques : « une consultation dont le résultat PEUT même ne pas être publié n’a pas d’autorité, alors que l’autorité d’un avis PEUT toujours être envisagée puisqu’il s’agit d’un acte formalisé (surtout celui du Conseil). »
On peut, donc, en toute rigueur se demander, si c’était pour « récolter » les vertus d’autorité liée à la « publication » que la « Décision n°1/C/2016 du 12 février 2016 qui ne DEVRAIT même pas être publiée en vertu du sceau de confidentialité qui le frappe, le soit finalement, en enfreignant les normes les plus élémentaires de l’administration ? Et si c’était une décision de justice, pourquoi le Président a lui-même senti la nécessité de la commenter ? Peut-être que la « complexité » serait passée par là !

d) La complexité

La notion de la complexité a été implicitement convoquée pour constituer un facteur assez déterminant dans le processus migratoire allant de la dimension « consultative à celle « contraignante » : « Voilà, du reste, ce qui explique en partie l’évolution de mon opinion entre l’utilisation jadis de l’article 46 de la Constitution de 1963 (en 2000) et celle actuellement de l’article 51 de la Constitution de 2001 (en 2012) puisqu’il s’agit de Constitutions différentes, de questions de nature différente soumises à la juridiction et d’avis ayant des objets différents, des motivations différentes et n’ayant pas forcément la même portée »
Mais, cette cartographie des évènements ainsi présentée semble plus relever d’une recherche effrénée de l’altérité, par l’amalgame. En effet, il est difficile, voire impossible de tracer des chaînes de causalité dans cette forme descriptive et d’y dessiner des imputabilités, en terme de changements et d’évolutions. Mais, toute cette peinture diffuse n’est-elle pas savamment entretenue pour masquer un facteur important, sinon le plus décisif dans « l’évolution de l’opinion » du Professeur et qui devrait figurer dans l’énumération ? En effet, entre temps, il occupe une posture différente au sein de la bureaucratie étatique, à même de rendre plus complexe le maintien de sa rigueur scientifique d’antan qui faisait sa charmante réputation quasi unanime. Et d’ailleurs, la seule « complexité » qui devrait pouvoir affecter le Conseil constitutionnel, réside dans le fait qu’il ne soit plus saisi pour Avis sur une loi tout court, mais plutôt sur une loi constitutionnelle. Mais, le professeur n’a pas jugé utile, ici, de convoquer les brillants développements qu’il a eu à faire, auparavant, sur ce sujet.
Mais, justement, le Conseil constitutionnel, comme tout bon juge, a pris les précautions nécessaires pour circonscrire sa Décisions ou/ en donner son Avis, afin que ses propos ne soient pas dénaturés et, surtout,que son image ne soit entachée par quelle que caricature que ce soit. Il suffit,ainsi, de prendre connaissance de la partie relative à sa compétence et à l’étendue de sa saisine où il fonde sa « Matière Consultative » sur l’article 51 et sur sa Compétence et l’étendue de sa saisine. Il y opère la différence entre ses attributions pour exercer un contrôle minimum sur le projet et « sa saisie déterminée pour le surplus, par la requête » qui consiste à examiner, dans le cadre d’un contrôle préventif, la conformité du projet de révision à ‘l’esprit général de la Constitution et aux principes généraux du droit ». Et le Conseil constitutionnel a tenu compte « des termes généraux par lesquels la demande est formulée » pour se prononcer. Et ainsi son appréciation a porté sur « la régularité de la procédure de révision et sur le contenu du projet ».
Mais, le constat est que jusque-là, les développements du Professeur n’ont pas eu les effets dirimants escomptés sur la notion d’avis, surtout qu’ils évitent expressément de nourrir principalement l’argumentaire à partir de citations provenant de la Décision rendue par le Conseil constitutionnel. Et, on comprend, ainsi, le type d’argument d’autorité, alimenté par le langage courant, pour prétendre clore le débat : « A bien réfléchir sur cette question d’ailleurs, quel est, en dehors de la coquetterie juridique, l’intérêt du débat de savoir si le Conseil a rendu un avis ou une décision. » Notre réponse sera puisée dans ce même registre affectivo-sentimentaliste pour entrer en plein dans la sémiologie populaire de la vie en couple, afin de mieux nous faire comprendre par le peuple, à travers son vécu et ses valeurs. Ainsi, les limites en « sciences juridiques » ne seront plus, pour ceux qui n’ont pas le niveau académique requis, un facteur d’exclusion dans ce débat national devant déboucher sur une consultation référendaire.
En fait, la coquetterie ne sert plus à rien dans un mariage où toute demande d’avis se transforme en « contrainte » (soo dee wut jamm, nu indil la xulo ; les graines de la paix donnent des fruits de la guerre) parce que tout simplement le cœur a déjà flanché pour une invitée surprise (pour ne pas dire une botte secrète). Ainsi, si coquetterie, il y a, ce serait plutôt la complainte d’une épouse, sous la menace d’une « insécurité conjugale », avec ce coup de foudre, inattendu, opéré par l’Article 92 et qui, en vérité, constitue un coup de massue pour l’article 51.

3. Quand la fiancée supplante l’épouse bannie

Le Professeur FALL tente vaille que vaille d’établir qu’avec le recours à l’article 51 où l’on parle d’avis, il ne s’agit pas d’une « consultation », mais plutôt d‘un exercice devant fatalement déboucher sur l’autorité contraignante du Conseil constitutionnel, sans que cela ne soit mentionné expressément dans ses compétences juridictionnelles. Autrement, il faudrait faire adopter la « camisole de fer » qu’on a troquée à la « robe de mariée » destinée à l’article 51, là où l’article 113 a été écarté de force pour « incompatibilité d’humeur », à la suite d’un « diagnostic préventif ».

a) L’insécurité conjugale de l’article 51

En observant le mode de traitement et le sort réservé à l’article 51, on ne peut que se rappeler de la complainte des premières femmes dites « AAWO » quand elles font l’objet d’un déclassement par le mari, avec la mise en selle d’une nouvelle élue. En effet, il se plairait à rappeler qu’il était là au temps des vaches maigres, endurant ce que d’autres, en l’occurrence l‘article 113, la coquette qui ne se satisfait pas d’un rôle de figurante, aurait refusé, en se suffisant uniquement, à capter la demande d’Avis, telle une boîte à lettres. Mais voilà qu’au finish, le mari s’autorise à découcher pour, chemin faisant, annoncer, officiellement, des fiançailles avec l’article 92 et dont l’issue programmé est la répudiation selon la «procédure» abrogation / modification. D’ailleurs, les esprits commencent à y être préparés avec l’évocation de tares congénitales au niveau de cet article 51 que ses « géniteurs » n’auraient pas bien conçu de sorte que cela à abouti en son sein, à cette supposée confusion de rôles.
Soit, puisqu’on pourrait « encaisser » ce mauvais procès d’un article mal libellé. Mais, en tant que partie constituée de la Constitution, pourquoi n’a –t’on pas convoqué son ESPRIT GENERAL, comme formulé dans la requête et repris dans le rendu du Conseil constitutionnel ? Mais voilà que la sortie d’un spécialiste, en plus d’avoir été Médiateur de la République, a été mal accueillie, surtout pour avoir mis en exergue, le sens et les vertus dialogiquesde cet article. Autrement, le Pr DIOP avait rappelé les règles de bienséance et l’importance de la consultationau détriment de la contrainte pour régir les relations au sein du ménage. Et en filigrane, il fallait entendre à travers cet article 51, les nécessaires bonnes relations entre les Institutions de l’exécutif, du législatif et du judiciaire ; ce qui est conforme, à la perception de l’ancien Directeur de cabinet que nous sommes et qui nous a même amené à proposer une évolution vers un « Dialogue entre les Institutions » (MBOUP, décembre 2015).
En effet, toutes les fois que le Pr DIOP a été pris à parti par son collègue FALL, c’est en relation avec la notion de « consultation » :« J’ai entendu sur les ondes d’une radio le professeur Serigne Diop dire que la décision du Conseil constitutionnel n’est qu’un avis consultatif qui ne lie pas le Président. » ; « le professeur Diop a dit que le Président a consulté le Président de l’Assemblée nationale et le Conseil constitutionnel » ; « On peut donc s’étonner que le professeur Serigne Diop choisit d’écarter la dénomination retenue par le Conseil pour parler d’avis consultatif. »
Certes, on peut reprocher au Pr DIOP d’avoir péché, dans la forme, avec l’usage d’une expression relevant du « langage courant » s’il dit : « quand le Président de la République veut faire un référendum, l’article 51 lui demande de CONSULTER le président de l’Assemblée nationaleet le Conseil constitutionnel. »Mais, dans la fond, le principal tort du Pr Serigne DIOP a été de faire montre d’un délit de re-connaissance face à une situation « d’insécurité conjugale » et d’être, ainsi, perçu comme un obstacle à un plan de répudiation programmée de l’article 51. En fait, dans l’opposition « Avis et Consultation », c’est le Président de l’Assemblée national et non le Conseil constitutionnel qui a été affecté par les « évolutions ‘sémantiques et juridiques» dont, il est fait cas. Mais, contrairement à la posture de Sagesse de l’Ex Médiateur, voilà que des courtisans, au lieu de s’atteler à consoliderles liens de mariage de l’article 51 par la restauration de sa dignité d’épouse éplorée, préfèrent, plutôt, détourner l’attention et les attentions de l’époux vers une probable future co-épouse (l’article 92), quitte à le forcer à anticiper sur la consommation du mariage, selon les « dispositions transitoires » d’une union libre, à effet « prospectif » !

b) L’article 92 ou l’intrigue des courtisans

L’article 92 est apparu dans l’annonce solennelle du Chef de l’Etat, en ces termes : « j’entends me conformer à la Décision du Conseil constitutionnel. En conséquence de quoi, le mandat en cours du Président de la République connaitra son terme en 2019. Au demeurant, l’article 92 de la constitution m’y oblige. » Mais, on peut d’ores et déjà douter de la solidité d’une telle référence au vu de la « consolidation » envisagée au niveau de cet article avec « l’élargissement des compétences du Conseil constitutionnel pour donner des avis » : « Le Conseil constitutionnel peut être saisi par le Président de la République pour avis ».
En fait, la pertinence du choix de l’article 92 se pose si l’on considère les questions qui découlent des interventions qui, aujourd’hui, plus que le référendum, déchirent la Nation autour de la valeur de la parole donnée : comment renforcer la compétence consultative avec l’avis sollicité au niveau de l’article 51 ? Comment renforcer la souveraineté du peuple en matière de consultation? Comment éviter de rendre « instable » l’institution présidentielle en lui permettant d’avoir des « fenêtres juridiques » sur des questions d’importance sur lesquelles il veut instaurer une large concertation tout en évitant d’être « lié » par un Conseil constitutionnel qu’il nomme?
Paradoxalement, on a ignoré les difficultés évoquées au niveau de l’article 51, pour aller « consolider » un article 92 qui, apparemment, ne souffrait d’aucune asthénie pour avoir permis de « lier » une institution aussi puissante que celle du Président de la République jusqu’à lui servir de pièce maîtresse lors de son Adresse à la Nation.On a semblé trouver des besoins non exprimés pour un Conseil constitutionnel qui s’est, pourtant, entouré de toutes les garanties oratoires. Alors, n’est-il pas légitime de se poser certaines questions : à quelle fin répond cette consolidation en vue ? Pourquoi, ce subit besoin juridique supplémentaire de contrainte, comme si le Président n’en a pas déjà assez souffert ? Pourquoil’avis contraignant doit bénéficier d’une référence constitutionnelle à la place de l’avis consultatif ?
Pour voir très clair dans tout cela, il s’agira, simplement, de confronter les proclamations et déclarations d’intention, voire les Exposés de motif et la situation qu’on est censé améliorer. Et c’est, sous ce registre, que la consolidation qui vise l’article 92 nous révèle un fait troublant ! Qui l’a convoqué dans le débat ? Le Conseil constitutionnel ? Absolument pas ? Pourquoi régler un problème qui n’est pas censé exister du point de vue de cette Institution pour qu’en matière d’Avis pour le Président de la République, elle passe du statut passif au niveau de l’article 51 à celui de statut actif au niveau de l’article 92 ? Quelles sont les finalités stratégiques – votre politiques et théoriques- de cette grande mutation ? En fait, si on se fie sur les intentions affichées du Président, son attention ne devrait plus porter, en toute logique, sur l’Article 51qui ne lui a pas rendu un « avis consultatif », tel qu’il devrait s’y attendre.
Mais, la réalité est qu’au moment où le Président de la République le convoquait, l’article 92 n’était pas prêt pour l’emploi, à savoir répondre à une demande expresse d’AVIS formulée dans le cadre de l’article 51. Et aujourd’hui, le commentaire, sous le prisme de l’article 92, de la « Décision n°1/C/2016 du 12 février 2016 », suscite l’idée que le Conseil constitutionnel aurait emprunté la méthode des goorgoorlu du « découvert bancaire » puisqu’ayant commencé à « user » des vertus d’une disposition virtuelle parce que contenue dans une Constitution à venir. Mais, ici, il ne s’agit pas de « manque de ressources financières » pour justifier ce procédé, mais plutôt de « manque de ressources argumentatives» pour qu’un éminent Professeur nous oriente vers la notion de « découvert juridique ». Et là où on s’interdisait des « effets rétroactifs », on s’autorise d’ «effets prospectifs ». « Insécurité juridique » peut-elle être plus grande que cela ?
Et, nous sommes autorisés à croire que c’est pour se « donner bonne conscience » et procéder à une « régularisation a posteriori » d’un argumentaire déjà servi et consommé que l’on a senti l’impérieuse nécessité d’inclure, dans l’article 92, cet alinéa: « « Le Conseil constitutionnel peut être saisi par le Président de la République pour avis », là où l’on trouvait déjà dans l’article 51 que « Le Président peut, après avoir recueilli l’avis du Président de l’Assemblée nationale et du Conseil constitutionnel, soumettre tout projet de loi constitutionnelle au peuple ». Cette apparente situation conflictuelle entre les deux articles n’est-elle pas le fruit d’une vaste entreprise de mobilisation de « L’ESPRIT du droit » pour hanter de « L’ESPRIT de la Constitution » déjà présent dans l’article 51? Mais, ce qu’une discipline défait, une autre peut le défaire. Voilà pourquoi, le socio-anthropologuepeut s’autosaisir pour donner corps à un aspect non moins important de cet « esprit de la Constitution » tel qu’incarné par l’article 51.
(A suivre, Part 3/3)

Babacar MBOUP
Ancien « Directeur de Cabinet du Ministre chargé des Relations avec les Institutions dans le gouvernement du Premier Ministre Souleymane Ndéné NDIAYE »
bmboup2002@yahoo.fr