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Au-delà de la clameur actuelle, la Crei n’a pas échoué - Par Par Mamadou Ndione

Rédigé par leral.net le Mardi 14 Juin 2016 à 11:26 | | 0 commentaire(s)|

Dans le contexte actuel de décrispation et d’amalgames il est important de rappeler que la Cour de Répression de l’Enrichissement Illicite (CREI) avait dans son verdict du 23 mars 2015 condamné huit personnes et en avait relaxés deux. Pierre Goudjo Agboba et Mbaye Ndiaye avaient été relaxés. Les fuyards Karim Abdoukhalil, Mamadou Aidara dit Vieux, Evelyne Riout Delatre et Mballo Thiam avaient eu chacun des peines de dix ans et 138 milliards d’amendes. Mamadou Pouye et Alioune Samba Diassé dit Pape ont eu cinq ans d’emprisonnement et soixante-neuf milliards d’amendes. Les sieurs Ibrahima Abdoukhalil, dit Bibo Bourgi écopait de cinq ans et 138 milliards tandis que Karim Meïssa Wade pour la même amende de 138 milliards écopait de six ans d’emprisonnement. La mémoire doit retenir qu’il y a eu des peines et des amendes et les plus durs concernaient les quatre fuyards.
Pour dire simplement qu’il y a eu procès, emprisonnement et amendes et surtout confiscation de tous les biens et actions des sociétés dont les fautifs sont bénéficiaires économiques. Auparavant, il y avait des mesures conservatoires de saisie de biens dans le cadre de la commission d’instruction de la CREI. Le jugement final avait validé ces mesures conservatoires. En clair toutes ces sociétés et tous comptes bloqués au départ et découverts par la suite sont passés entre les mains de l’Etat.
Il serait intéressant que le ministère de la justice donne le détail de toutes les sociétés aujourd’hui passées entre les mains de l’Etat ainsi que des comptes bloqués et autres recouvrements effectués. Il y a eu beaucoup contrairement à ce qu’une certaine opinion veut faire croire. Nous pouvons citer les sociétés AHS SA, AHS Sénégal, ABS, AN MEDIA, HARDSTAND , BLACK PEARL FINANCE.
Autres sociétés en cause, ISTAR, ISTAR IMMOBILIER, ISTAR CAPITAL, DAHLIA SA, DAHLIA CORPORATE créée aux îles vierges britanniques, TERRA VISION, ATLANTIC HOLDING, SENEGAL DISRIBUTION, MENZIES MIDLE ESAT AFRICA dont la CREI dit qu’elle a été « créé dans des paradis fiscaux pour, sans avoir fourni aucune prestation aux différents AHS, se faire virer de l’argent par celles-ci dans des comptes domiciliés à Monaco ».
La CREI dans son jugement final a « Ordonné la confiscation de tous les biens présents des condamnés, de quelque nature qu’ils soient, meubles ou immeubles, divis ou indivis, corporels ou incorporels, notamment les actions des sociétés dont ils sont bénéficiaires économiques » et a « validé les mesures conservatoires prises par la Commission d’Instruction de la CREI »
C’est pourquoi ceux qui sous le couvert de la décrispation, veulent faire croire qu’il n y a pas eu de fautes sanctionnées se trompent et veulent semer le doute sur ce qui a été fait. Le Président Macky Sall n’a jamais prôné l’amnésie. Sa démarche humaniste n’a rien d’une abdication face au souci de transparence. Et puis, les amendes sont en cours de retour dans l’escarcelle de l’Etat.
La libération conditionnelle ne signifie pas une absolution qui blanchit. Il s’agit juste d’une suspension de l’exécution d’une peine accordée à une personne déjà condamnée à titre définitif et qui a subi un délai d’épreuve et donné des preuves suffisantes de bonne conduite. Un libéré conditionnel a au moins accompli la moitié de la peine sauf dans les cas de délits liés à la drogue qui exigent au moins 4/5 d’exécution de la peine définitive. Le fait que Mamadou Pouye ait bénéficié de la liberté conditionnelle n’enlève rien au soixante-neuf milliards d’amendes que l’Etat est entrain de recouvrer. Cela n’enlève rien à sa culpabilité établie.
Une autorisation de sortie du territoire pour raisons humanitaires est une disposition qui s’apprécie sur des bases à la fois médicales et judiciaires. Le fait qu’Ibrahima Abdoukhalil dit Bibo Bourgi et Alioune Samba Diassé aient bénéficié de cette disposition ne signifie pas qu’ils sont blancs comme neige loin de là. Les sociétés qu’ils ont créées et qui ont été découvertes sont passées entre les mains de l’Etat.
Concernant le principal mis en cause Karim Meissa Wade, il peut bénéficier d’une libération conditionnelle ou d’une grâce pour suspendre sa peine de prison. Cela n’enlève en rien la constance des faits sanctionnés en jugement définitif.
A ceux qui crient que la CREI a échoué, nous pouvons dire ceci. Elle n’a pas du tout échoué. Bien au contraire elle a réussi sous deux rapports.
1- Elle est allée jusqu’au bout dans ce procès en dépit des menaces et autres tensions.
2- Elle a permis de se dire que la position de pouvoir ne doit plus donner un permis de s’enrichir illicitement par des procédés intelligents qu’une police classique aurait du mal à démêler.
Il est vrai que la CREI qui en est à sa première expérience sérieuse et d’envergure est à parfaire pour allier à la fois le souci de transparence, d’éducation et de respect des droits des uns et des autres. Elle est perfectible. Elle le sera certainement dans le sens de plus de diligence et de communication sur les dossiers en cours et au niveau des améliorations à apporter. Le glas de la CREI ne saurait être sonné sur l’autel de la pression des hommes politiques que nous sommes sauf à trouver une juridiction qui garantira le souci de transparence et lutte contre les formes sophistiquées d’enrichissement sans cause.
Le débat actuel fait de projections de tous ordres appelle de l’Etat une explication claire sur pour éviter les amalgames lourds de conséquences pour un citoyen qui a du mal à se faire sa propre opinion dans un pays où la réflexion simpliste, le sensationnel et le buzz l’emportent souvent sur la vraie vérité comme dirait l’autre. Ne pas assez communiquer sur les dossiers serait faire le lit de la désinformation qui n’a qu’un seul objectif replacer les bannis au cœur d’un dispositif d’émergence et de transparence déjà bien en place depuis 2012. Nous devons dans l’intérêt du Sénégal rester sur cette ligne de masse d’une nation à construire par le dialogue et l’humaniste certes mais surtout par la Vérité qui seule préserve le sens civique qui lie tous les citoyens. L’État a le devoir de communiquer pour lever les équivoques et autres amalgames.

Par Mamadou Ndione
Economiste Ecrivain
Conseiller départemental à Mbour
Responsable politique APR Diass