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DÉCÈS D’UN ‘’MONUMENT’’ DE LA MUSIQUE TRADITIONNELLE PULAAR : Djengui Bambado s’en est allé

Rédigé par leral.net le Jeudi 7 Novembre 2019 à 09:52 | | 0 commentaire(s)|

Décédé le 30 octobre dernier à Dakar, des suites d’une maladie, El Hadj Djengui Bambado, le Roi du ‘’hoddu’’, considéré comme le ‘’baobab’’ de la musique traditionnelle pular, a été inhumé vendredi 1er novembre dans la cour de la mosquée qu’il a construite au quartier Sikilo Hilèle, dans la commune de Kolda. ‘’EnQuête’’ revient sur le parcours exceptionnel de ce monument.


DÉCÈS D’UN ‘’MONUMENT’’ DE LA MUSIQUE TRADITIONNELLE PULAAR : Djengui Bambado s’en est allé
Talentueux joueur de ‘’hoddu’’, Djengui Bambado avait conquis les cœurs de bien de Sénégalais et de Bissau-Guinéens. Cet homme de scène est parti à jamais, il y a quelques jours, et repose depuis vendredi dernier dans la cour de la mosquée qu’il a construite au quartier Sikilo Hilèle, dans la commune de Kolda.

Issu d’une famille de griots spécialisée dans le ‘’hoddu’’, qui est une sorte de guitare traditionnelle à quatre cordes, El Hadj Djengui Bambado a très tôt embrassé ce métier. Avec sa voix d’or, il incarnait des pans entiers de l’histoire du Fouladou. Le griot était né à Nianthanding, en Guinée-Bissau, berceau de la civilisation des Peulhs. Etant jeune garçon, il avait à peine 7 ans, Djengui Bambado travaillait en chantant dans les champs. Au fil du temps, il est passé des champs aux scènes.

Malgré ses prédispositions et son appartenance à une famille qui connaît les secrets du ‘’hoddu’’, Djengui Bambado a quitté la Guinée-Bissau pour se rendre au Mali, auprès du grand griot malien Djali Baba Cissokho pour se perfectionner. D’abord, il a consacré huit années à l’apprentissage de cet instrument. Ensuite, il s’est intéressé à l’histoire du Mali, du Sénégal et surtout du Fouladou.

Après 16 bonnes années passées au Mali, Djengui Bambado est revenu à Kolda où il a commencé à jouer ses premiers concerts publics. Il savait bercer son public avec sa voix et son instrument. Il avait ce don. Sans effort apparent, il arrivait à faire ressentir de merveilleuses sensations aux mélomanes. Artisan du verbe, généalogiste, traditionnaliste, détenteur des légendes et des mythes, il était une ‘’bibliothèque’’. Il était le chantre, le ‘’héraut’’ de la société pular et avait une certaine influence sur elle.

Ceux qui l’écoutaient se laissaient captiver. Bambado, sur scène, était juste magique. Sans lui, les noms des rois comme Moussa Molo Baldé, Alpha Molo Baldé, entre autres, tomberaient dans l’oubli. Il était la mémoire des hommes. Par la parole, il donnait vie aux faits et gestes des rois devant les jeunes générations.

Au-delà des frontières africaines, Djengui Bambado a fait connaître la culture pular. Il l’a exportée en Europe. Il était assez bien connu en Espagne, en France, au Portugal, en l’Allemagne, etc., où il a donné des spectacles de haute facture. Cet homme, malgré ses succès époustouflants, n’a pas oublié son pays et ses origines. Djengui Bambado a pu construire, sur fonds propres, deux mosquées (une à Kolda et une autre à Nianthanding), 12 maisons au Sénégal, 2 autres en Guinée-Bissau et une en Gambie, sans compter ses 10 véhicules. Aujourd’hui, il est parti pour toujours, laissant derrière lui ses 4 femmes, plus de 12 enfants et un Fouladou orphelin.

Ses inconditionnels souhaitent que les autorités lui rendent un hommage à sa juste valeur. Ils s’attendent à l’érection d’un monument à la dimension du talent de l’homme qui a légué une œuvre éternelle à la nouvelle génération.

EMMANUEL BOUBA YANGA