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Décryptage- Leral: Après sa condamnation, Barth demeure-t-il toujours éligible ?


Rédigé par leral.net le Vendredi 17 Février 2017 à 18:41 | | 0 commentaire(s)|

Décryptage- Leral: Après sa condamnation, Barth demeure-t-il toujours éligible ?
Ca y est ! L`omerta est levé sur le sort de Dias fils. Après un long procès qui aura tenu en haleine le landerneau politique sénégalais, sous réserve d`un appel, les rideaux sont tombés sur l’affaire du meurtre de Ndiaga Diouf. Le glaive de dame justice s'est abattu sur le député-maire de Mermoz Sacré-Cœur, Barthélémy Dias. Le tribunal de Dakar a rendu son verdict. Dias a été condamné à deux ans de prison dont six mois ferme.

De l'éligibilité ou non Dias ?

En décembre 2011, la mairie de Barthélémy Dias se faisait attaquer par des hommes du PDS, le Parti démocratique sénégalais, alors au pouvoir. L'un des attaquants avait été tué par balle. Cet événement plonge le fils de Jean Paul Dias au cœur d`un tourbillon politico-judiciaire sans précèdent qui a abouti à sa condamnation par le juge correctionnel. A l'instar de Karim Wade qui avait écopé d`une peine de 6 ans de prison ferme assortie d’une amande de 138 milliards lors de la fameuse traque des biens mal acquis, l`avenir politique de Barth préoccupe plus d`un.

Après sa condamnation, les partisans de son éligibilité́ et ceux qui soutiennent le contraire se crêpent le chignon. Cela n'a d'ailleurs rien d'étonnant, car il n'échappe à personne que les juristes sont si friands de débats. Et, à juste raison d"ailleurs, eu égard au dynamisme de la matière juridique. Le fil de la pensée juridique suit, en effet, les méandres d’un ordre qui parfois lui échappe, aurait dit Louise Rolland, Professeure a la Faculté de droit de l'Université de Montréal.

Un raisonnement qui, dans quelques moments privilégiés, paraît clair, direct et parfaitement agencé masque, parfois, l’itinéraire tourmenté, les détours et circonvolutions qui l’ont engendré. Il n'est alors pas sans intérêt d'analyser cette question avec toute la rigueur et le détachement qui siéent.

Le Code pénal à lui seul ne règle pas la question …

D'entrée de jeu, il est nécessaire de préciser, qu'il ne suffit pas, pour régler la question ou non de l'éligibilité de Barth, de se cantonner uniquement au Code pénal, plus précisément en son article 34 qui a servi de base juridique à certains juristes défendant l'éligibilité du maire de Mermoz / Sacré-Cœur. Aux termes de l’article 34 du Code pénal, « lorsque la peine d’emprisonnement prononcée sera supérieure à cinq ans, l’interdiction définitive de tous les droits devra obligatoirement être prononcée ».

Ainsi, se fondant sur cette disposition, les défenseurs de l'idée de l`éligibilité de Barthélémy Dias considèrent que ce dernier pourrait être inéligible s’il était condamné à une peine supérieure ou égale à 5 ans. Dans ce cas de figure, la loi fait obligation au juge de prononcer une déchéance de ses droits civiques et politiques.

Or, en l’espèce, il n’a pas été condamné à ce taux-là. Donc, Dias n’entre pas dans ce cas de figure. En conséquence, avec l’article 34 du Code pénal, rien ne s’oppose à ce qu’il se présente à une élection ou qu’il soit éligible. Ce raisonnement à priori cohérent et juste, cache en vérité les limites d'une analyse tout aussi simpliste que trompeuse. En effet, de la charte fondamentale (la Constitution), au Code pénal, en passant par le Code électoral, les bases textuelles à convoquer dans cette affaire transcendent aussi bien les différentes disciplines du droit que les différents supports juridiques.

Que dit le Code électoral ?

Les articles L31 et L32 du Code électoral prévoient la perte des droits civiques et politiques pour certaines catégories de personnes. L’article L31 dans son alinéa 2 prévoit l’impossibilité de s’inscrire sur les listes électorales pour: «ceux condamnés à une peine d’emprisonnement sans sursis ou à une peine d’emprisonnement avec sursis d’une durée supérieure à un mois, assortie ou non d’une amende, pour l’un des délits suivants : vol, escroquerie, abus de confiance, trafic de stupéfiants, détournement et soustraction commis par les agents publics, corruption et trafic d’influence, contrefaçon et en général pour l’un des délits passibles d’une peine supérieure à cinq (05) ans d’emprisonnement». Selon le juge correctionnel, Barthélémy Dias est l’auteur de la mort de Ndiaga Diouf, coupable à ses yeux des délits de coups mortels, coups et blessures volontaires et détention illégale d’arme.

Il est vrai que la disposition de alinéa 2 de l'article L31 du code électoral ne cite pas nommément les délits de coups mortels, coups et blessures volontaires et détention illégale d’armes pour lesquels Barth est condamné, mais étant entendu qu'ils sont punis de peines d’emprisonnement qui rentrent dans la fourchette des peines de 5 à 10 ans, toute personne qui en est condamnée perd, de facto, ses droits civiques et politiques.

Le principal concerné, en l`occurrence Barth, reconnait lui-même que cette condamnation le disqualifie de la prochaine élection législative. « À partir de six mois ferme, j’ai un casier judiciaire qui me rend inéligible pour les élections législatives du 30 juillet 2017 », a commenté, avec juste raison, Barthélémy Dias devant la presse peu après le délibéré du juge. C'est dire tout simplement que sous réserve des résultats d'un éventuel appel ou d'une amnistie, l'avenir politique de Dias fils est jusqu'ici hypothéqué.


Abdoulaye FALL,