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Il faut licencier les enseignants grévistes ! (Par « Le Témoin »)


Rédigé par leral.net le Vendredi 1 Mai 2015 à 13:46 | | 0 commentaire(s)|

Il faut licencier les enseignants grévistes ! (Par « Le Témoin »)
Lorsque nous étions gamins, le père d’un de nos copains aimait souvent raconter les conditions assez miraculeuses, en tout cas insolites, dans lesquelles il avait obtenu un emploi salarié. Cela donnait à peu près ceci : « les travailleurs de l’hôpital Le Dantec s’étaient mis en grève, le gouvernement du président Mamadou Dia les avait sommés de reprendre le travail. Ils n’avaient pas obtempéré. Alors, un matin, les responsables de l’établissement accompagnés d’officiels se sont pointés au portail pour demander à ceux qui étaient là s’ils ne voulaient pas travailler. Moi, j’étais un vendeur et j’avais ma petite table à l’entrée de l’hôpital. J’ai d’abord cru à une blague mais je me suis présenté quand même. A ma grande surprise, on m’a dit que j’étais embauché ! On m’a d’abord affecté au nettoiement avant que je ne devienne, quelques années plus tard, un garçon de salle ou aide-infirmier si vous préférez. »

Après plus de 30 ans de bons et loyaux services, le père de notre ami avait pris sa retraite, heureux d’avoir eu un emploi de « fonctionnaire ». En même temps que lui, cette fameuse matinée du début des années 60, à l’aube de notre indépendance, ils étaient des dizaines à avoir été recrutés pour remplacer au pied levé des grévistes qui avaient pris les malades en otages. Après cela, pendant de nombreuses années, peut-être des décennies, il n’y eut plus de grèves dans cet hôpital. Si je rappelle cette histoire, c’est pour dire, en rapport avec l’actualité marquée par l’interminable grève des enseignants de l’élémentaire et du secondaire, qu’il est temps que le gouvernement sévisse enfin. Depuis plus de deux mois, les enfants ne vont plus à l’école publique parce que, tout simplement, ces messieurs leurs enseignants sont en grève.

Entre autres revendications, ils exigent l’alignement de leurs indemnités de logement sur celles de certains fonctionnaires qu’ils estiment plus favorisés. Il y avait également des doléances relatives à la validation des années de vacation, de contractualisation et de volontariat, la grande masse de ces enseignants étant entrée dans la Fonction publique par la petite porte, d’abord sous forme d’ « ailes de dinde », c’est-à-dire de maîtres ou de professeurs d’abord pris comme volontaires ou vacataires à 50.000 ou 60.000 francs le mois, des rémunérations qui représentaient une fortune à leurs yeux à l’époque. Puis, à force de grèves, d’implorations, de supplications et de pleurnicheries, ils ont obtenu leur recrutement dans la Fonction publique. Là, nos anciens misérables se sont enhardis demandant à présent, en plus de leurs traitements qui ont été revus à la hausse, que toutes leurs années de galère soient revalorisées sous forme d’indemnités à payer en guise de rappel. Et quoi encore !

Le problème c’est que, les enseignants étant les bataillons les plus nombreux de la Fonction publique — devant même les forces de défense et de sécurité —, la moindre augmentation salariale prend tout de suite des proportions financières absolument insupportables pour nos pauvres finances publiques. Les effectifs des différentes corporations qui composent l’Administration sont ainsi constitués que là où un doublement des indemnités de logement des magistrats, par exemple, peut être facilement digérée par le budget de l’Etat, quand bien même cette indemnité ou ce salaire passerait de 400.000 à 800.000 francs, les mêmes finances publiques ne pourraient pas supporter une augmentation de ne serait-ce que 10.000 francs sur les primes ou les indemnités des fonctionnaires. Question de proportions.

Toujours est-il qu’en raison du nombre de travailleurs concernés, toute mesure à incidence financière prise en faveur des enseignants coûte toujours beaucoup d’argent. A preuve, une source ministérielle nous a confié il y a quelques jours qu’une étude confidentielle commandée par le président de la République sur, justement, les incidences financières de la plateforme revendicative des enseignants a fait apparaître que celles-là seraient de l’ordre de 83 milliards de francs ! Oui, vous avez bien lu. A moins de ne travailler et de ne collecter des impôts que pour la satisfaction des exigences des seuls enseignants, on voit mal comment le gouvernement pourrait satisfaire de telles prétentions. Surtout que nos enseignants ne sont pas des modèles de productivité et sûrement pas des stakhanovistes !

Voilà donc de braves gens qui, seuls de toute la Fonction publique, ont droit à trois mois de vacances durant lesquelles ils perçoivent intégralement leurs salaires. Sans compter un mois supplémentaire de congés constitués par le vacances de Noël, de Pâques et on en passe. Il convient d’ajouter à tout cela les inévitables jours de grève qu’ils s’octroient immanquablement chaque année sous les motifs les plus farfelus, juste comme ça, pour se reposer. Des enseignants qui sont aussi devenus des spécialistes du « khar matt », c’est-à-dire du travail au noir, qui désertent les salles de classes des écoles publiques pour mieux aller donner des cours dans les établissements privés dont la plupart leur appartiennent d’ailleurs. Sinon franchement, comment peut-on concevoir un enseignant, un vrai, qui a la vocation, mais qui reste deux mois sans travailler, sans inculquer du savoir aux pauvres élèves qu’il est chargé de sortir des ténèbres de l’ignorance ?

En vérité, il n’y a qu’en Afrique, et singulièrement au Sénégal, que l’on voit des élèves perdre non pas des heures, non pas des jours, non pas des semaines mais des mois de cours ! Ce alors que dans les Nations les plus développées, celles-là mêmes qui maîtrisent tous les savoirs, il est inadmissible, inacceptable de perdre ne serait-ce qu’un seul jour de classe. Au Sénégal, on a entendu un inspecteur de l’éducation déclarer tranquillement que, sur le quantum horaire nécessaire pour qu’une année soit considérée comme valide, les élèves n’avaient perdu « que » 200 heures. Ce alors qu’une seule heure perdue est de trop ! Toujours est-il que le Gouvernement a eu beau faire des concessions, nos teigneux enseignants syndicalistes (le Sénégal compte 57 syndicats d’enseignants !) campent sur leurs positions, refusant d’en bouger d’un iota. C’est soit l’alignement des indemnités de logement, soit il n’y a pas de cours. Et tant pis pour les pauvres élèves et, surtout, leurs parents qui ne savent plus où donner de la tête devant le chômage forcé de leurs enfants.

Les 33.000 candidats inscrits au concours de la douane dans l’attente…

Face à ces enseignants qui ne connaissent pas le langage de la négociation, encore moins celui de la raison ou de la carotte, il faudra bien que le Gouvernement sorte le seul qu’ils comprennent vraiment : celui du bâton. Parce qu’il est inadmissible qu’un travailleur en grève perçoive son salaire — partout ailleurs dans les grandes démocraties, les heures ou jours de grève des travailleurs sont payés par les caisses des syndicats —, il faut que l’Etat défalque des salaires des enseignants grévistes les jours non travaillés. C’est aussi simple que cela. Pour rappel, il y a quelques années, la longue grève du Saes (Syndicat autonome des Enseignants du Supérieur) n’avait pris fin que lorsque le Gouvernement s’était résolu à suspendre les salaires des profs du Supérieur. Mais ce serait encore trop facile car aux grands maux, il faut apporter les grands remèdes : nous préconisons de licencier tout simplement tous ces enseignants grévistes qui tiennent le pays en otage et compromettent l’avenir de nos enfants.

Ainsi que l’avait fait l’Etat à l’époque, lorsque le père de notre copain obtenait son embauche à l’hôpital Le Dantec, il faut renvoyer les grévistes et recruter d’autres enseignants parmi les milliers de diplômés chômeurs que compte notre pays. Ne révélions-nous pas récemment dans ces mêmes colonnes que, rien que pour le concours d’entrée à la douane, 33.000 candidats se sont inscrits ? C’est dire l’ampleur du chômage des jeunes diplômés dans notre pays. Ils sont en effet des dizaines de milliers dont on peut présumer qu’ils vont accepter avec empressement, si on le leur demande, de servir dans l’enseignement à la place de nos grévistes professionnels. Oh certes, il existe des maîtres et des professeurs du secondaire comme ceux qui sont affiliés à l’USEQ (Union syndicale pour l’Enseignement de Qualité composée du Sudes, du Sypros, du Sneel mais aussi de l’Uden qui, elle, a refusé de se joindre au mot d’ordre de reprise des cours) qui ont estimé que le gouvernement a fait suffisamment de concessions pour reprendre les chemins des classes. Et qui méritent donc notre respect.

On notera au passage que l’Uden, mais c’est sûrement un hasard, est un syndicat présenté comme étant proche de la Ligue démocratique, un parti qui, bien que membre de la mouvance présidentielle, se signale ces temps-ci par la virulence de ses attaques contre le président de la République. Ceci explique-t-il cela ? En tout cas, les autres syndicats satellites de partis membres de la même majorité présidentielle ont, eux, levé leur mot d’ordre de grève. Quant à toutes les autres formations politiques qui ne trouvent pas leur compte dans le partage du gâteau gouvernemental, dire qu’elles soufflent sur les braises serait en deçà de la réalité, le caractère politique de la grève en cours étant aussi visible que le nez sur le visage. Mais foin de toutes ces considérations, le seul langage que comprenne l’âne, c’est le bâton et, nous le répétons, la seule manière d’avoir une paix sociale durable dans notre espace scolaire, c’est de licencier les enseignants grévistes comme l’avait fait le gouvernement kenyan il y a une dizaine d’années. Telle est notre position.

Le Témoin quotidien