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Inscription nouveaux bacheliers : Une dangereuse nécessité - Par Yatma Niang

Rédigé par leral.net le Mardi 30 Septembre 2014 à 13:36 | | 0 commentaire(s)|

Un communiqué du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche concernant l’orientation de certains bacheliers et leur inscription dans les écoles, instituts et universités publics est publiés dans le quotidien « Le Soleil » du 17 et 18 septembre et notamment sur le site de www.campusen.sn.


Inscription nouveaux bacheliers : Une dangereuse nécessité - Par Yatma Niang
Le communiqué vient à la veille de l’ouverture de l’année académique est confirme la volonté du ministère de confisquer les droits d’inscription des nouveaux bacheliers qui devaient être encaissés par les facultés et écoles d’enseignement supérieur.

Face à la crise universitaire liée au paiement des bourses et à la surpopulation des facultés, l’Etat veut maîtriser les questions financières et réduire les effectifs dans l’enseignement supérieur. A cet effet, le MESR apporte une solution à travers ce communiqué inacceptable qui répond à une dangereuse nécessité.

I. L’inscription est inacceptable, car inopportun, non efficiente et socialement dangereuse.

Inopportun : La période choisie est la veille de la Tabaski suivie d’une période de soudure et de l’ouverture des classes élémentaires et secondaires. Les parents d’élèves sont pris au dépourvu pour trouver de l’argent et inscrire leurs futurs étudiants dans les délais, avant le 5 octobre. Dès lors, le ministère doit se limiter à orienter les bacheliers et laisser les inscriptions qui relèvent des prérogatives des écoles et facultés.

Non efficiente : Les bacheliers sont contraints de s’inscrire sous peine de forclusion, « Passé ce délai, les bacheliers qui ne seront pas acquittés du paiement de leur droit d’inscription perdront irrévocablement leur droit à être orienté. » Perte du droit à être orienté ! Ces bacheliers sont-ils réellement orientés ? Pourquoi soumettre la validité de l’orientation à l’approbation financière des parents d’élèves et exclure des bacheliers sur la base du critère de l’inscription provisoire ?

D’autres bacheliers non orientés et qui ne peuvent se prévaloir du droit à être orienté vont constituer soit une liste d’attente ou être sacrifiés à l’autel des écoles privées. Ainsi, l’orientation est sélective et incertaine, mais aussi discriminatoire. Discriminatoire, dès lors que la seconde liste d’orientation ne garantie pas l’accès à un enseignement public et gratuit. Quel texte organise le droit du bachelier à être orienté dans une filière publique ou privée ?

Est socialement dérangeant l’inscription provisoire, le MESR ne s’intéresse qu’à encaisser les droits d’inscription, le bachelier doit « Récupérer la quittance de paiement (avec le numéro de la transaction) à garder soigneusement ». Les inscriptions provisoires sont à l’origine de la cacophonie créée à la FSJP de l’UCAD où plus de 2000 non inscrits se sont retrouvés sans carte d’étudiant faute pour la direction des bourses et ECOBANK de reverser les droits d’inscription provisoire à la faculté. Le mardi 12 août, en conférence de presse, le Doyen de ladite faculté, Mamadou Badji, a déclaré que «tout étudiant en inscription provisoire, qui ne se serait pas inscrit jusqu'à la fin de l'année, se voit lui-même exclu d'office».

La FSJP étant un baromètre de la gestion des effectifs, on risque de connaître des non reversement des droits aux écoles et facultés par l’installation dans le processus des écornifleurs, les monstres de la concurrence sauvage du secteur du transfert d’argent qui collectent les droits d’inscription des bacheliers.

II. Une dangereuse nécessité

La nécessité, c’est de trouver des ressources avant l’ouverture officielle des inscriptions dans les écoles et universités, avant le 5 octobre. Les incohérences de ce dicta sont multiples.

Il s’agira ensuite de généraliser cette méthode d’inscription pour le renouvellement des inscriptions en licence et master, si on considère la structuration du site web de campusen.sn, de déconnecter les universités de la collectes physiques d’argent. L’Université étant un établissement public administratif doté de l’autonomie administrative et financière va être tributaire des dotations financière de l’exécutif incompatible avec la liberté d’enseignement.
Quid de la complicité des syndicats des enseignants qui refuse de faire retirer une telle mesure, d’user des voies de recours. Ces syndicats avaient accepté la volonté de l’Etat de recourir aux TICs comme nouvelles méthodes d’approches des crises lors des assises.

Le MESR a choisi « un communiqué de presse » comme nouvelle catégorie d’acte administratif unilatéral, une décision exécutoire qui conditionne des droits à des obligations, qui fait grief aux bacheliers et au budget des universités.
Le communiqué est sans fondement juridique, c’est une violation de procédure. Avec un décret ou un arrêté, les textes de base sont visés et les motifs de la décision explicités. L’arbitraire n’a pas besoin de fondement juridique, c’est la preuve de l’impuissance, l’aveu d’incapacité à orienter les bacheliers, une atteinte à l’égalité d’accès aux études supérieures.

Afin, où va l’argent ? Ne s’agirait-il pas de financer le déficit budgétaire par les bachliers en attendant l’ouverture des universités et l’expression de leur besoins en décembre 2014 !

Yatma NIANG
Juriste, Chercheur en droit de l’homme
Chargé d’enseignement en droit fiscal des universités privées
yatma786@live.fr