Les deux jambes et un bras fracturés, Khadim Nguing, 52 ans, s’entortille sur son lit d’hôpital au pavillon des urgences de l’hôpital Ahmadou Sakhir Ndiéguène. Il revient de loin pour avoir échappé de justesse à la mort. Ainsi, il rembobine sans cesse le film de l’accident mortel et spectaculaire de la circulation survenu le premier jour de l’an vers 4 heures du matin sur la route de Khombole au moment où il se rendait à Touba pour la célébration du Magal. Il a du mal à contenir son affliction. Il frisonne de douleur et d’horreur sur son lit d’hôpital. Il a les deux jambes et un bras fracturés. Le regard plastronné dans le creux vague d’un vide imaginaire, Khadim Gnuing déverse sa bile sur les chauffeurs des véhicules en collision. «Je peux jurer que les deux chauffeurs des véhicules accidentés dormaient au volant. Il était presque 3h à 4 h du matin. Presque tous les passagers dormaient. Nous étions à bord d’un minicar que nous avions pris à Dakar pour nous rendre à Touba. C’est après de Khombole à hauteur du village de Kaba que notre véhicule est entré en collision avec un bus de transport. Je somnolais. C’est le choc brutal des engins déchirant le calme de la nuit qui m’a extirpé de ma torpeur. Comme une broyeuse, le bus a déchiqueté le minicar et ses passagers », a confié Khadim Gning. Le rescapé de l’accident se morfond dans sa détresse surtout qu’il a perdu sa fille Astou Gning, morte sur le coup. Au pavillon des urgences, les infirmiers et infirmières d’Etat vaquent à leurs occupations comme si de rien n’était, habitués à ces images banalisées par la fréquence des accidents dans le département de Thiès. Le cœur ravagé par le bilan lourd des morts, Khadim Gning n’en finit pas de remercier le Bon Dieu qui a fait de lui un « veinard rescapé ». « J’aurai pu y laisser la vie puisque tous les autres qui étaient à mes côtés dont ma fille Astou Gning y ont laissé leur vie », dit-il. Il maudit mille fois encore les chauffeurs qui seraient à l’origine du drame. Etreint par la douleur, Khadim a mal un peu partout au corps. « C’est normal. C’est des contorsions », rassure Aminata Ndiaye Tine, major aux urgences à l’hôpital régional de Thiès. Les complaintes et les plaintes de Khadim Gning, rescapé de ces véhicules tombeaux dissiperont-elles l’excitation des chauffeurs pressés de gagner toujours plus d’argent lors des grands événements. Toujours obnubilés par l’appât du gain, les automobilistes se précipitent pour rallier les destinations et repartir à la recherche de clients sans jamais se reposer à leurs risques et périls.
OUSSEYNOU MASSERIGNE GUEYE
OUSSEYNOU MASSERIGNE GUEYE