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"L’ex procureur de la CREI est–il victime de sa fidélité à l’ex PM Mimi Touré?", s’interroge Ousmane Sène

Le Magistrat Alioune NDAO, nommé Procureur de la CREI par les soins de Madame Mimi Toure, ex Ministre de la Justice, « Maître des poursuites », a fait preuve de zèle extraordinaire dans la traque des biens mal acquis, qui reflétait amplement la fermeté avec laquelle son mentor pilotait le dossier.


Rédigé par leral.net le Vendredi 14 Novembre 2014 à 19:40 | | 0 commentaire(s)|

"L’ex procureur de la CREI est–il victime de sa fidélité à l’ex PM Mimi Touré?", s’interroge Ousmane Sène
Durant toute la période du magistère de Madame Mimi Touré comme Ministre de la Justice, la Dame de « fer », avait son « bras de fer » en la personne du Magistrat Alioune NDAO, dont la fermeté et la détermination dans la traque des biens mal acquis, suscitaient l’admiration des partisans de la reddition des comptes, tout en semant le désarroi dans les rangs des principaux dirigeants de régime déchu du Président Wade.

La migration de Madame Mimi Touré, du Ministère de la Justice, à la Primature, généralement perçue comme une reconnaissance de son sens élevé de l’Etat dans la gestion des dossiers de la traque des biens mal acquis, renforçait la détermination du Procureur dans son travail d’instruction des dossiers des personnes présumées coupables.

Mais entre temps, le Procureur NDAO voyait le Ministère de la Justice, changer de main, avec l’arrivée d’un Avocat «Droit de l’Hommiste », plus regardant dans le respect des procédures d’instruction, notamment dans l’appréciation de « l’opportunité des poursuites ».

C’est ainsi que s’installait rapidement un malaise entre le nouveau « Maître des poursuites » et son Procureur, qui n’avait pas pris la pleine mesure des implications de ce changement, dans la gestion des procédures.

En effet, l’ « Avocat », dont toute la carrière professionnelle était axée dans la défense du Droit, prenait la place d’une « Politique », qui était réputée par son intransigeance à l’égard de ses adversaires politiques, surtout lorsqu’ils sont présumés coupables d’enrichissement illicite.

Le Procureur Alioune NDAO n’a pas su adapter son mode de traitement « zélé » de ses dossiers, au nouveau contexte, qui devait le rendre plus regardant dans sa gestion des poursuites, et surtout, plus attentif à la manière dont le nouveau Maître des poursuites entendait qu’il le fasse.

Tant que son mentor était encore politiquement tout puissant à la tête de la Primature, il se croyait libre de continuer sa manière de faire son travail, sans égard aux observations que lui faisait le nouveau Ministre de la Justice, en poussant même son outrecuidance jusqu’à lui réclamer systématiquement des « instructions écrites », avant de se conformer, à contre cœur, à ses instructions.

Mais le limogeage de son mentor de la Primature, dans les conditions humiliantes que l’on sait, et l’atmosphère de rébellion qu’elle a entretenu envers le Chef de l’Etat, ont dû le « révolter » à tel point, jusqu’à pousser son esprit « d’ indépendance » à l’égard du Maître des poursuites, à défier même les instructions du Chef de l’Etat, dans l’opportunité d’ouvrir une procédure judiciaire avant les élections locales, à l’encontre de Baldé, Maire sortant de l’Opposition, pour éviter toute interprétation politique de cette action judiciaire.

De même, son intransigeance dans la prise en compte du dossier médicale de Bourgi lors du démarrage du procès de Karim, avait étonné beaucoup de monde, y compris les partisans fermes de la reddition des comptes, même si son comportement était à la mesure du dilatoire de la Défense pour empêcher la tenue du procès.
De «guerrier» contre l’impunité que le créditait l’opinion, il devenait « inhumain » dans son comportement face à la nécessité de la comparution de Bourgi, même en civière !

Cela lui faisait perdre beaucoup de sympathisants, tout en donnant l’impression d’un « acharnement judiciaire » contre Karim, que la Défense a largement exploité afin de gagner la compassion des populations envers Bourgi, et par ricochet, envers leur client.

C’est dans cette période que fleurissaient des « sondages » donnant Karim au second tour des élections présidentielles, avec des chances de battre le Président sortant au second tour, dans le but évident de faire passer dans l’opinion, le procès contre Karim comme étant un artifice politique pour lui barrer la route aux Présidentielles de 2017.

Mais, ce qui aurait fait perdre définitivement au Procureur, la confiance du Maître des poursuites et du Chef de l’Etat, serait lié à ses nouvelles tentatives d’ouverture des instructions à l’encontre de hautes personnalités du régime déchu de Wade, sans en référer au Maître des poursuites, alors que le procès de Karim se gérait laborieusement.

Ces nouvelles initiatives allaient donner l’occasion à l’Opposition, de tenter de vicier encore davantage l’atmosphère, pour jeter le doute sur la culpabilité présumée de Karim.

Ainsi, à « l’insubordination » caractérisée du Procureur, s’ajoutait une suspicion d’amalgame des « affaires », perçue comme un «projet de sabotage » de la traque des biens mal acquis, par le sentiment de « cafouillage » , et même de « confusion » que son initiation unilatérale ne manquerait pas de produire dans l’opinion, sous l’effet d’une forte dose de propagande de la Dépense et du PDS.

Son limogeage, en plein procès de Karim, a donc surpris plus d’un, mais paradoxalement pour les non avertis, n’a pas réjoui outre mesure la Défense, dont certains des ténors l’ont mal apprécié publiquement!

L’on est même surpris que les Avocats de Karim n’aient pas demandé une liberté provisoire pour leur client, du fait de ce changement de Procureur en plein procès !
Le Procureur Alioune NDAO a donc était victime de sa fidélité à « l’intransigeance » dans la gestion des procédures judiciaires, jusqu’au zèle, qu’il a héritée de son mentor, du temps de sa toute puissance.

Cet épisode de l’ascension et de la déchéance du Procureur NDAO, avec le malaise qu’elles ont produit chez les partisans de la traque des biens mal acquis, et au sein des plus hautes autorités du pays, traduisent, en fait, les dégâts collatéraux de l’assujettissement du Pouvoir Judiciaire au Pouvoir Exécutif.

Dans un Pouvoir Judiciaire indépendant, comme le préconise l’Avant projet de Réforme des Institutions par la CNRI, un tel comportement de Procureur n’aurait pas pu avoir lieu, et le cas échéant, son limogeage soulagerait plus qu’il ne gênerait le Pouvoir Exécutif et l’opinion publique.

Donc, plus que jamais, l’adoption des propositions de Réforme de la CNRI, est le gage d’une gestion sereine des poursuites judiciaires, qui ne seront plus susceptibles d’être suspectées d’être motivées par des soucis de règlements de comptes politiques entre adversaires.
L’aventure du Procureur NDAO, appelle donc notre pays à tourner rapidement la page dans ce sens.

Ibrahima SENE PIT/SENEGAL
Dakar le 14 Novembre 2014