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La solitude des veuves: Entre angoisses, indifférences et délivrances - Par Yacine Bodian

Rédigé par leral.net le Mercredi 5 Mars 2014 à 09:00 | | 0 commentaire(s)|

Unis par les liens du mariage et partageant tout ensemble, brusquement celui qu'on appelait chéri, mon cœur ou Papa s'en va sans dire au revoir, emportant avec lui tous les projets du couple. Cela paraît d'abord impossible, incroyable et surtout inacceptable ; mais les cris, pleurs et lamentations des parents et amis venus dès les premières heures pour consoler la veuve, la mènent vers la triste réalité : Le chéri n'est plus !


La solitude des veuves: Entre angoisses, indifférences et délivrances - Par Yacine Bodian
On est d’abord dépassé par les événements, on se sent impuissant devant cette fatalité et seuls les réflexes commandent les faits et gestes. Tout s’embrouille, mais des questions sérieuses viennent à l’esprit :
Que vais-je devenir ? Comment vivre sans lui ? Pourquoi lui, si ambitieux, si vivant, pourquoi pas un autre à sa place ? Pourquoi, pourquoi et pourquoi ? Autant de questions dont les réponses se cherchent encore dans les chaudes larmes déversées par la veuve. Mais, ce n'est là, que l'arbre qui cache la forêt. Ce n'est que le début d'une grande angoisse.

Il y a du monde présent et on ne mesure pas encore l'ampleur des dégâts. Les deux ou trois enfants sont là, comment leur expliquer que papa ne reviendra plus ? Comment s'organiser pour leur éducation ?
Les jours passent difficilement même si, pour les autres, on le prend bien.

Dès l’enterrement, les autres ont déjà oublié ; on cause, on rit tout autour et on ne réalise toujours pas. L’imam explique ce que sont le huitième et le quarantième jour, où le corps explose, où les os se décollent. Ces jours deviennent, les plus douloureux de la période de veuvage. On pleure, quand, seule, on prend sa douche, quand, seule, on s’habille, mais dès qu’on est avec les parents, on sèche les larmes ; car c’est la volonté de Dieu et on est obligé de l’accepter.

Le veuvage est passé et les parents et amis venus apporter leurs soutiens sont rentrés vivre leurs vies. La solitude s'installe. La chambre devient immense pour une seule personne, mais le grand lit n'est pas assez large pour rechercher son odeur, sa chaleur et sa présence. On a mal et les vraies larmes coulent dans le noir. Toute la nuit durant, les yeux grands ouverts, on pense à ce qu’on aurait pu faire pour qu’il reste encore en vie. On peut ne manquer de rien, mais la joie a disparu !

Le même scénario se renouvelle chaque nuit et seuls les parents et vrais amis sont capables de comprendre l'immense douleur que l'on vit. Dès qu'on voit une veuve, on revit le même cauchemar. On pense à lui sans arrêt. Le chagrin est si grand, qu'on regrette de ne lui avoir pas assez dit combien il était aimé.

La seule question vers le créateur à ce moment là est : pourquoi ? Pourquoi ? Pourquoi ?

On essaye ensuite d'entrer en contact avec le mari adoré, on lui parle comme s’il pouvait entendre : qu’est ce que je vais devenir sans toi? Comment éduquer notre fils quand la crise de l'adolescence se pointera ?
Viennent alors les prières : mon Dieu pardonne lui toutes ses fautes, offre lui le paradis, et donne-moi la force d'accepter mon destin.

Par dilection, on s'interdit le bonheur ou un autre mariage; on se condamne à la solitude, à la douleur et à vivre dans un passé plein de regrets et de souvenirs. Pourtant, le temps passe et il faut recoller les morceaux. Il faut beaucoup de courage et de présence pour sortir du gouffre et se refaire une vie normale.

Ces veuves sont parmi nous, fortes à vue, elles sont d'une sensibilité incroyable dès qu'on fait allusion à leur perte. Elles ont besoin d'affection et d'amitié au vrai sens de terme, pour que leurs regards toujours tristes changent ; pour que leur esprit toujours connecté au passé leur revienne. Mais, le principal est de leur rappeler le plus important :

Quand Dieu ferme une porte, il en ouvre plusieurs autres.

Mais……,
Mais il y a les autres ;
Celles qui ne s’étaient "pendues" que pour l’argent. Ces veuves joyeuses n’attendaient que ce départ pour enfin pouvoir jouir des biens laissés par le riche conjoint. Elles commencent aussitôt à chercher de nouvelles proies parmi les ex, les cousins et amis du défunt.

Il y a les plus téméraires qui n’envisagent plus de se remarier; elles entendent bien profiter de l’héritage laissé par le défunt, pour se refaire une nouvelle jeunesse et une nouvelle vie !

En parallèle, les veuves, devenues des proies faciles, sont convoitées par les hommes qui concoctent des stratégies de séduction dès les premières heures du veuvage. Tout y passe, du Diakhal consistant aux cadeaux somptueux et périodiques, aux visites régulières pour consoler l’ex-femme de leur frère, de leur cousin ou ami. Aussi, les masques tombent-ils et font place à l’hypocrisie et à la délinquance. Il faut noter que c’est durant cette phase à la fois triste et dramatique qu’on remarque toutes les contre-valeurs qui accompagnent la période de veuvage et de pré-veuvage.

Que la nature humaine est complexe, c’est comme si la vie est une grande scène de théâtre.

ybodian3@gmail.com