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Le film de l’arrestation du brigadier de l’Ocrtis Ibrahima Dieng et ses acolytes

Après 4 jours de garde à vue, le brigadier Ibrahima Dieng et l’une des «baronnes» du trafic de drogue à Dakar, accompagnée de sa mère, ont été déférés, hier jeudi, au Parquet. Ils ont bénéficié d’un retour de Parquet. L’Obs vous plonge dans les secrets de l’enquête de la Section de recherches de la Gendarmerie de Colobane.


Rédigé par leral.net le Samedi 17 Mai 2014 à 00:22 | | 0 commentaire(s)|

Le film de l’arrestation du brigadier de l’Ocrtis Ibrahima Dieng et ses acolytes
Dans le courant du mois d’avril, Ibrahima Dieng a été balancé par une source de la gendarmerie, qui l’accuse d’être au cœur d’un trafic intense de drogue dure à Dakar, en provenance de la Colombie via le Brésil et la Guinée-Bissau. La Section de recherches de la gendarmerie de Colobane lâche ses hommes pour enquêter. Les éléments du Groupe d’observation et de surveillance, communément appelé «Gos», se saisit de l’affaire. Leurs investigations et surveillances les mènent à l’une «des baronnes de la drogue à Dakar», Awa Thiam. Très vite, elle est arrêtée avec sa mère Lémou Touré Gaye. Plus tard, Ibrahima Dieng, brigadier de police en service à l’Office central pour la répression du trafic illicite des stupéfiants (Ocrtis), placé à la tête de ce réseau de trafic de cocaïne, est arrêté. C’était dans l’après-midi du dimanche 11 mai 2014, jour de commémoration de la mort de Bob Marley. Dans ce business douteux, les mis en cause sont, selon les enquêteurs, en connivence avec des ressortissants nigérians dont les nommés «Junior» et «Georges», établis dans les différents quartiers de Dakar. Selon les enquêteurs, Ibrahima Dieng «détourne la drogue saisie dans le cadre de ses fonctions d’agent d’Ocrtis afin de la remettre à sa comparse Awa Thiam par le biais d’un certain Georges qui en faisait une activité mercantile. Le produit de cette vente fait l’objet d’un partage entre les différents acteurs au détriment de l’Etat du Sénégal.»

Awa Thiam arrêtée avec 655 grammes de haschich et 53 grammes de cocaïne

Awa Thiam, Awa Cheikh Thiam à l’état civil, est récemment divorcée d’avec un ressortissant nigérian du nom d’Autou Kenneth Ewala, avec qui elle a 5 enfants et qui est sorti de prison il y a moins de 2 ans. Emprisonné pour trafic de drogue, Kenneth et Awa ont été déférés en même temps. Plus chanceuse, Awa, poursuivie de complicité, avait bénéficié d’une liberté provisoire. Après le procès qui s’était terminé tard dans la nuit, Awa avait, de même que son mari, décroché l’acquittement devant la Cour d’Assises de Dakar. Apparemment, elle n’était pas si innocente que cela. L’enquête la dépeint comme une personne qui a une fine connaissance du milieu interlope. «Nantie de sa connaissance de milieux assez particulier, Awa Thiam finit par épouser les habitudes et devient ainsi une grande trafiquante de drogue dure (cocaïne, haschich, amphétamine). Elle parvient à se faire son propre réseau composé de fournisseurs nigérians, de revendeurs et de complices pour réussir son entreprise criminelle. L’affaire juteuse, Awa implique sa mère qui lui vient en appoint pour les livraisons au cas où celle-ci est surveillée par la police ou la gendarmerie», expliquent les enquêteurs dans le compte rendu transmis au «maître des poursuites». Pour simuler son activité, Awa ouvre «une gargote sous forme de restaurant à sa mère dénommée : Du Walo Ainoulady en face de l’Industrie des Technologies de l’Alimentation (Ita), non loin du collège Sainte Marie de Hanne». C’est là où, le 11 mai 2014, elle a été prise en flagrant délit, après avoir reçu de la drogue (haschich) qu’elle devait, à son tour, livrer à des clients potentiels, dans le quartier des Almadies, à Dakar.

Ce jour, après «deux mois d’investigations», tout était fin prêt pour démanteler le réseau. Le 11 mai était le jour idéal. C’est le jour de la commémoration du décès de Bob Marley et jour de grande consommation de drogue.

Un dispositif est mis en place. Des éléments de la Section de recherches requis pour boucler le domicile d’Awa, sise à Castors. Les maisons des autres suspects sont surveillées par des éléments du Groupement d’intervention de la gendarmerie nationale (Gign). Le Cyno groupe, composé de gendarmes et de chiens renifleurs, était aussi de la partie. C’était vers 16 heures. Une fois sur les lieux, les pandores remarquent des va-et-vient incessant de personnes venues, certainement s’approvisionner, devant la maison, située non loin du Collège Notre Dame de Liban. Certains avaient des sacs et même descendaient de taxis qui les déposaient à quelques mètres de la maison avant de les reprendre comme passager après qu’ils se soient ravitaillés. Convaincu de l’activité illicite qui se passe dans la maison, les gendarmes entrent en scène. La perquisition de la maison R+1 ne donne rien. Mais dans le sac de la dame, un sachet en plastique contenait 8 plaquettes de haschich pesant 655 grammes, un sachet contenant de la cocaïne en poudre d’un poids de 53 grammes et 203 225 FCfa.

96 grammes de cocaïne composée de poudre et de pierre trouvés sur Ibrahima Dieng

Juste après l’arrestation de la dame Awqa Thiam avec de la drogue dans son sac, le brigadier Ibrahima Dieng, dont le renseignement avait signalé qu’il assure la couverture de la «baronne» pour la livraison avec son véhicule Peugeot, arrive comme hasard sur les lieux avec la voiture signalée. Il est immédiatement arrêté. La fouille de sa voiture Peugeot 306 grise permet aux gendarmes de découvrir 96 grammes de cocaïne composée de poudre et de pierre. Le tout enveloppé dans un sachet de plastique noir et mis dans une boîte de cigarettes en fer, enfoui dans la poche du dossier du siège passager du véhicule. Interrogé, le policier, selon l’enquête, essaie de convaincre les enquêteurs que la drogue est tombée des délinquants qu’il a tenté d’arrêter et qui se sont enfuis vers la plage de Yoff. Un argument qui ne convainc pas les gendarmes. Ses chefs sont immédiatement saisis. Ils disent n’être pas au courant de ce qu’il faisait. Il est alors délesté de son arme de service, remise à sa hiérarchie.

Ne voulant pas s’arrêter en si bon chemin, les enquêteurs se transportent au domicile de la maman d’Awa, Lémou Touré Gaye, sis aux Hlm 4, avec l’équipe du Cyno groupe. Dans un coffre-fort, des bijoux appartenant à la «baronne» ont été trouvés. La maman qui aurait participé à l’activité de sa fille est aussi arrêtée. Tous les trois ont alors été gardés à vue dans les locaux de la Section de recherches de la gendarmerie. Hier jeudi, ils ont tous été déférés avant de bénéficier d’un retour de Parquet. Awa Thiam qui, selon l’enquête, fréquente le brigadier depuis 1996, semble avoir entraîné sa mère dans le gouffre. Aujourd’hui, mère et fille sont dans un trou noir, ne sachant quand est-ce qu’elles vont voir le bout du… tunnel.

T. Marie Louise Ndiaye

L'Observateur