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Lettre ouverte à Me Sidiki Kaba


Rédigé par leral.net le Vendredi 5 Juin 2015 à 15:42 | | 11 commentaire(s)|

Lettre ouverte à Me Sidiki Kaba
Cher Monsieur,

Ma génération a grandi en entendant votre nom, qui résonnait partout comme pour donner un visage à l’engagement de tous les hommes de tous les continents pour la promotion, et surtout la Défense des Droits de l’Homme.

Nous avons toujours ressenti une fierté citoyenne de voir un digne fils du SENEGAL être le porte étendard du combat pour le respect des Droits des plus faibles, dans un monde tourmenté où la loi du plus fort s’appliquait toujours, surtout dans le contexte du début des années 2000, avec tous les bouleversements socio politiques qui ont marqué l’évolution des nations.

Nous étions admiratifs devant votre courage, car vous avez toujours tenu tête à tous les gouvernements dictatoriaux adeptes de la violation des Droits de l’Homme, où l’anomie régnait en maître.

Quand nous apprîmes que vous étiez nommé Ministre de la Justice, tout le monde s’était écrié : « the right man at the right place » !

Un sage avait dit : « On ne connait vraiment la véritable nature de l’Homme, que quand il détient une parcelle de pouvoir, ou une richesse qui le mette à l’abri du besoin ».

Aujourd’hui, M. KABA, vous avez montré votre véritable nature. Vous avez démontré que vous avez été nommé sur la base d’un deal pour légitimer et justifier la chasse aux sorcières initiée par MACKY en échange de l’appui du SENEGAL pour votre candidature à la présidence de l’Assemblée des Etats parties de la Cour pénale internationale (CPI), et quoi d’autre encore ?

La presse vient de publier la lettre que vous aviez envoyée au Groupe de réflexion pour protester contre la détention arbitraire des prisonniers afghans à Guantanamo, en votre qualité de Président de la FIDH. Cet organe dont vous n’aviez jamais contesté la légitimité et dont vous aviez à l’époque mesuré la pleine compétence à intervenir sur les questions de violation des Droits de l’Homme aurait –il perdu inopinément toute sa crédibilité, à vos yeux propres, au vu de votre situation d’aujourd’hui ?

Vous venez de donner la preuve de votre attitude machiavélique en servant des arguments des plus alambiqués pour justifier le refus du SENEGAL de se conformer aux directives de ce Groupe de réflexion.

Par là, parce que vous êtes à une position de redevabilité, vous donnez la preuve de votre renonciation au « devoir d’ingratitude » qui devrait guider votre position, en ces circonstances où vous êtes aux portes de l’Histoire.

Malheureusement pour vous, l’Histoire retiendra que vous fûtes celui qui renonça à y entrer par la grande porte, en choisissant éhontément le camp des délinquants judiciaires, en toute connaissance de cause, au nom de raisons personnelles et de choix de carrière politique.

Vous nous donnez manifestement la preuve de votre duplicité. Les droits de l’hommiste doivent rire sous cape de vous voir avaler goulûment des couleuvres en défendant l’indéfendable, en foulant au pays les valeurs que vous défendiez avec autant de brio et de prestance.

Vous administrez effectivement la preuve que vous êtes aussi capable de défendre le camp des dictateurs.

Cela me rappelle une scène du film Ridicule : le prêtre confesseur de Mme la favorite du roi avait brillamment démontré au roi l’existence de DIEU. Et dans sa fougue et son envie de lui plaire, il avait aussitôt ajouté, après que le roi se fut émerveillé de la qualité de son argumentaire : « je pourrais tout autant vous démontrer le contraire, Sir ! ». Cela avait suscité le courroux du Roi ; Il était tombé en disgrâce tout aussitôt.

Robert Ménard a surpris son monde en se faisant élire sur une liste du FN pour défendre des idées frontistes au point de s’attirer les foudres de la Justice française, après une brillante carrière à Médecins sans frontières ; nous voici avec notre Robert Ménard à nous : Vous, M. KABA !

Votre position devrait faire de vous le premier conseiller de MACKY et le premier défenseur des droits du peuple sénégalais, dont les impôts payent votre salaire.

Après avoir combattu la CREI dont vous contestiez la légalité en votre qualité d’avocat de Karim WADE, vous venez aujourd’hui de récuser l’avis d’une instance dont vous connaissez parfaitement la légitimité.

Vous faites mieux que Judas ; en effet, il n’avait trahi le Christ qu’une seule fois.

Vous venez de trahir deux fois le peuple sénégalais, en vous faisant le complice d’une forfaiture qu’il réprouve.

Malheureusement vous êtes si bien engoncé dans votre déni qu’il n’est pas possible que les valeurs que l’on vous reconnaissait refassent surface.

Chaque matin, en vous regardant dans votre miroir, vous ressentirez ce que le tribunal de votre conscience vous reproche. Je vous souhaite d’avoir le courage de supporter le regard condescendant de tous ceux qui vous scrutent, avec le regard de quelqu’un qui vous fait voir le peu d’estime qu’il pense de quelqu’un qui aura vendu son âme, et ses convictions, pour figurer où vous êtes !

Cela en vaut-il le prix ?

Nous pouvons tolérer que de petits acteurs politiques immatures accusent sans fondement le PDS d’avoir actionné des lobbys pour obtenir la déclaration du Groupe de réflexion sur les Droits de l’homme.

En ne le démentant pas, par votre silence coupable, vous confirmez que vous êtes bien le complice de d’un déni de justice dont vous rendrez compte, assurément.

Camus recevant son Prix Noble de la Paix avait déclaré que la place des hommes de son rang, de votre rang, ne devaient pas être « aux cotés de ceux qui font l’Histoire, mais de ceux qui la subissent ».

Ressaisissez-vous !

Cissé Kane NDAO
Président de l’Alliance démocratique pour la République-A.DE.R