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Lettre ouverte au Président Macky Sall : Apprenez le Droit Monsieur le Président-Par Ahmadou Mokhtar Sylla

Rédigé par leral.net le Dimanche 21 Février 2016 à 18:07 | | 7 commentaire(s)|

Lettre ouverte au Président Macky Sall : Apprenez le Droit Monsieur le  Président-Par Ahmadou Mokhtar Sylla
Lors de votre allocution mardi soir à la chaine nationale, à ma grande surprise, j’ai appris que le chef de la plus haute organisation juridictionnelle du Sénégal (le conseil supérieur de la magistrature) n’est même pas en mesure de connaitre les principes de base du droit.
En effet, en s’adressant à la nation, monsieur le Président s’est aventuré pendant une bonne dizaine de minutes dans le fief des juristes dont il ne maitrise absolument pas le jeu. Tous ceux qui ont suivi le discours y constatent une contradiction inacceptable en termes juridiques.
Monsieur le Président, au début de votre discours vous nous avez parlé, je cite « j’ai saisi pour avis le conseil constitutionnel… » D’abord en matière juridique, on ne saisit pas pour un avis, plutôt on saisit pour une décision ou un jugement. En droit le mot saisir signifie : soumettre une affaire à une institution ou une autorité compétente pour décider ou juger. Du coup, un avis n’est pas compatible avec une saisine.
Toutefois, l’article 51 de la constitution que vous avez cité, stipule d’une manière claire que « le président de la république peut, après avoir recueilli l’avis du président de l’assemblée nationale et du conseil constitutionnel… donc les termes de cet article démontrent que la note du conseil constitutionnel dans cette affaire ne vaut nullement une décision judiciaire qui doit dans ce cas avoir une valeur juridique, mais tout simplement c’est un avis tel que celui du président de l’assemblée nationale.
En d’autres termes, recueillir l’avis du conseil constitutionnel dans ce cas n’est pas une obligation, et en droit les issus d’une facultative ne constituent jamais une obligation. Alors son excellence vous avez copieusement confondu une décision et un avis.
En poursuivant vos arguments me semble t-il que vous n’êtes pas entièrement responsable, car, le conseil constitutionnel vous a notifié avec tout ce qu’il faut pour une décision (N° de la décision, date etc), mais en catimini, ce qui n’est pas conforme avec une décision judiciaire rendue par cette institution.
En effet le conseil est aussi responsable pare ce que non seulement il a à un moment donné employé le mot avis ainsi, il n’a pas rendu public cette note alors qu’il devait obligatoirement la rendre au public si elle était vraiment une décision judiciaire.
Mais tout cela n’est pas important, le véritable problème en est comment une telle confusion peut être remarquée dans le discours d’un président ?
Où sont vos conseillers juridiques ? Où sont vos conseillers en communication ?
On sait bien que monsieur le président vous n’êtes pas juriste, mais sans tenir compte de vos conseillers en la matière ni vos amis juristes, au moins vous devez en tant que chef de la magistrature suprême pouvoir être en mesure de distinguer un avis d’une décision quand même, c’est la moindre des choses.
Aujourd’hui les juristes qui vous entourent doivent tous démissionner, c’est une honte pour eux, c’est une honte pour la république. Au cas où vos conseillers ont été consultés lors de la rédaction de ce texte, il y a un sérieux problème, s’ils n’ont pas été consultés (comme le cas de la quasi-totalité des conseillers) c’est une catastrophe, car c’est l’intelligence sénégalaise et sa compétence en droit qui sont remises en question. Et dans tout les cas ils doivent rendre leur démission.
Mais, ce n’est pas seulement de leur responsabilité, les conseillers en communication ne sont pas exempts de reproches comme les rédacteurs de ce fameux discours.
En gros, c’est incompréhensible que dans un discours typiquement juridique le président de la république prononce : AVIS et DECISION pour le même sens et DEMANDER et SAISIR pour la même signification, c’est une erreur monumentale.
Apprenez le droit monsieur le président avant de vous faire passer prochainement pour un juriste, car en droit chaque mot a son sens intrinsèque.

Paris 2016 – France