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Libre Echange Avec… Aminata Sow, Dgpsn: «Le financement reste une entrave à la protection sociale»

Aminata Sow, la Déléguée générale à la Protection sociale et la solidarité nationale dresse dans cet entretien avec « Le Quotidien », un bilan reluisant de sa société dont, en dépit des résultats probants depuis 2012, le secteur connaît des difficultés multiples, notamment au plan juridique, où la Loi d’orientation de la protection sociale tarde à être finalisée. S’y ajoute la question du financement qui reste une entrave du secteur.


Rédigé par leral.net le Samedi 25 Décembre 2021 à 09:24 | | 0 commentaire(s)|

Libre Echange Avec… Aminata Sow, Dgpsn: «Le financement reste une entrave à la protection sociale»
Plus d’un million de ménages ont pu bénéficier d’une assistance alimentaire durant le Covid-19 et 186 milliards 950 millions de francs Cfa, investis dans le programme des bourses sociales selon Aminata Sow. Extraits d’un entretien avec « Le Quotidien ».

Quelles sont les entraves à la protection sociale et à la solidarité nationale ?

Malgré les résultats probants depuis 2012, le secteur de la protection sociale connaît des difficultés multiples. Au plan juridique, la Loi d’orientation de la protection sociale tarde à être finalisée. Son adoption devrait permettre de mieux clarifier les rôles et les responsabilités des acteurs de l’écosystème de la protection sociale.

La fragmentation des interventions avec la multiplication des petits projets et programmes. Cette segmentation révèle un manque de synergie entre les acteurs.

Aussi, la question du financement est-elle une entrave du secteur. Les efforts consentis par le gouvernement au cours de ces dernières années ne sont jamais égalés, mais la demande reste importante.

Des réflexions sont menées en relation avec le Bureau international du travail (Bit) sur les options de financement de la protection sociale au Sénégal, à travers l’identification des espaces budgétaires que le gouvernement pourrait recourir pour assurer un financement adéquat et durable du secteur de la protection.

Parallèlement les contributions des entreprises par le truchement de la Responsabilité sociétale de l’entreprise (Rse), des collectivités territoriales sont des niches de financement du secteur qui méritent d’être analysées.

Pouvez-vous nous faire un bilan de vos interventions depuis de la création de la Dgpsn ?

Dans ce domaine, je reste prolixe à plusieurs égards. La Dgpsn a mis en œuvre le grand programme de lutte contre la pauvreté et l’exclusion sociale que le Sénégal n’ait jamais connu. Le succès du Programme national de bourses de sécurité familiale (Pnbsf) dépasse largement les frontières, il est cité en exemple partout en Afrique et dans le monde.

Actuellement, le programme totalise 316 mille 833 ménages bénéficiaires, composés de 291 mille 270 ménages issus des différentes générations (cohorte) de bénéficiaires, inscrits dans le Registre national unique (Rnu), de 25 mille 507 bénéficiaires de Carte d’égalité des chances (Cec) et de 60 ménages d’enfants dans la rue. Pour rappel, le Pnbsf octroie une allocation annuelle de 100 mille aux ménages vivant dans l’extrême pauvreté.

Ce transfert monétaire, conditionné à l’enregistrement des enfants à l’état-civil, l’inscription et le maintien des enfants à l’école et la vaccination, permet d’interrompre la transmission intergénérationnelle de la pauvreté par le renforcement du capital humain. De 2013 à 2020, le chef de l’Etat a inscrit dans le programme, un montant global de 186 milliards 950 millions francs Cfa.

Par ailleurs, la Dgpsn a mis en place le Registre national unique (Rnu) qui est une base de données contenant l’ensemble des informations démographiques et socio-économiques des ménages à faible revenu et vulnérables. Le Rnu est établi sur la base d’un questionnaire unifié qui intègre, entre autres, les privations socio-économiques de l’ensemble des ménages pauvres du Sénégal. Il permet de réduire la fragmentation et d’améliorer la coordination des interventions en matière de protection sociale.

Aujourd’hui, le Rnu compte plus de 588 mille ménages, soit environ 30% de la population sénégalaise. Eu égard à son importance dans les politiques sociales, le chef de l’Etat a acté son institutionnalisation par décret n°2021-1052 du 2 août 2021.

Cette formalisation consacre le Rnu comme l’unique instrument de ciblage des projets et programmes sociaux. Il fait obligation à tout programme social ou toute structure offrant les prestations sociales ciblant les ménages à faible revenu et vulnérables, de l’utiliser pour cibler ses bénéficiaires (ménages et individus).

En outre, avec l’appui de la Banque mondiale, la Dgpsn a mis en œuvre le Projet d’appui aux filets sociaux pour soutenir la mise en place des éléments constitutifs du système de filets sociaux et d’améliorer l’accès des ménages démunis et vulnérables aux programmes ciblés et adaptatifs. Dans cette perspective, des projets-pilotes ont été développés pour renforcer la résilience des populations pauvres et vulnérables tels que le Projet pour l’accès aux intrants agricoles subventionnés et le Projet Yook Koom Koom.

Plus de 10 mille ménages bénéficiaires ont été sélectionnés à partir du Rnu avec l’intervention des comités de ciblage dans les régions de Kaolack (3114 ménages), Kaffrine (2860 ménages), Kolda (3041 ménages) et Sédhiou (1483 ménages). Le montant global s’élève à 2 milliards 99 millions 800 mille.

Chaque bénéficiaire a reçu un transfert monétaire d’une valeur maximale estimée à 200 mille francs Cfa. L’objectif est d’aider les ménages à s’acquitter de la part non-subventionnée des intrants. Grâce au Projet Yook Koom Koom, la Dgpsn a pu constituer 380 Associations communautaires d’épargne et de crédit (Acec) et financer 6 mille 089 projets pour un montant de 1 milliard 522 millions 250 mille francs Cfa.

Par ailleurs, la Délégation a procédé à la reformulation de la Stratégie nationale de protection sociale (Snsp) sous le prisme du Plan Sénégal émergent (Pse) et des agendas régionaux et internationaux auxquels le gouvernement a souscrit. La Snsps 2016-2021 est bâtie dans une approche cycle de vie, qui prend en charge les problématiques de protection sociale, de la naissance à la vieillesse.

La Snps traduit toute l’ambition du gouvernement dans le long terme. Il s’agit de construire non seulement un système de protection sociale accessible à toutes les Sénégalaises et à tous les Sénégalais, fournissant à chacun (e), un revenu minimum garanti et une couverture maladie, mais aussi un filet de sécurité global assurant la résilience face aux risques sociaux et à tous ceux qui souffrent des chocs et crises pouvant les faire basculer dans la pauvreté. A la lumière de tout ce qui précède, il ne serait pas prétentieux de ma part de dire que le bilan de la Délégation est reluisant. Ses actions ont impacté positivement les conditions de vie des populations pauvres et vulnérables.

Elles ont également contribué à la réduction de l’extrême pauvreté. Les résultats de l’Enquête harmonisée sur les conditions de vie des ménages (Ehcvm) au Sénégal de l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (Ansd) du mois de septembre montrent à suffisance, une baisse de 5,4 points du taux d’extrême pauvreté qui est passé de 12,2% en 2011 à 6,8% en 2018.