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Me Aïssata Tall Sall, député socialiste : «Super ! Félicitation à Macky Sall qui a réussi la prouesse de réunifier la famille socialiste autour de lui»


Rédigé par leral.net le Vendredi 11 Novembre 2016 à 18:22 | | 0 commentaire(s)|

 
Par rapport à ce congrès de 2014, il s’est dit que vous auriez eu le soutien de Kha­lifa Sall pour battre Ous­mane Tanor Dieng, est-ce vrai ?


Non, je peux vous dire, je m’excuse de ce terme-là, mais ce sont des balivernes. Pourquoi Khalifa Sall m’aurait-il soutenue ? Ces gens lui demandaient d’être candidat non ? Quand j’ai décidé d’être candidate, les seuls avec qui je me suis concertée et qui m’ont donné leur onction, c’étaient les membres de ma coordination à Podor. 



Vous avez été remplacée au poste de chargée de communication du parti par Abdoulaye Wilane. Mais Tanor avait dit qu’il vous avait proposé d’autres postes…


Il m’a proposé un poste, j’ai refusé. 



Quel poste ? 


Je ne me rappelle plus. C’est un truc tellement vague. Il y avait droit de l’Homme, il y avait juriste, il y avait tout dedans. En réalité, il me proposait de continuer à être l’avocate du parti. J’ai dit : «Je le suis naturellement. Je n’ai pas besoin de secrétariat national pour les droits de l’Homme et pour je ne sais quoi.» Et s’il m’avait proposé porte-parole, j’aurais refusé. Attendez, on ne peut pas passer sa vie à être porte-parole ! Ou bien je suis née, estampillée porte-parole sur mon front ? (Rires)



Et comment appréciez-vous aujourd’hui la nomination de Tanor à la tête du Haut conseil des collectivités territoriales ?


(Long silence, puis elle s’éclate). Ecoutez, si sur la forme on doit le féliciter, bon qu’il l’entende ainsi ! Mais honnêtement, je crois que pour l’homme que je connais, il mérite mieux que ça. (Elle insiste).



Il méritait la présidence de la République ?


Ah ! C’est ce qu’on lui a toujours souhaité. Mieux que de le lui souhaiter, on s’est sacrifié pour cela. Bon, le pouvoir c’est de la magie. Il arrive cet instant magique où vous y êtes. Il n’a pas pu l’avoir. Mais pour autant, comme disent les arabes : «Est-ce qu’on peut accepter de jeûner un an pour se contenter d’une sauterelle ?» Non.

Ah oui, c’est une sauterelle ?


Attendez ! C’est quoi ce Haut conseil des collectivités territoriales ? Une sorte de salmigondis. Vous connaissez le salmigondis ? 



Expliquez-nous…


C’est un terme italien qui veut dire des restes de tout. Un peu de salade, un peu d’oignon, un peu de choux, un peu de carotte. C’est cela le salmigondis. Personnellement, j’ai rêvé d’autres choses pour lui (Tanor). Même si, peut-être, les circonstances l’amènent à se contenter de cela. Quand on a voulu pour lui président de la République que ce n’était pas possible, on a pensé Premier ministre que ce n’était pas possible, on a pensé président de l’Assemblée nationale que ce n’était pas possible, je disais : «Il n’a qu’à rester le conseiller officieux de Macky et qu’il soit entouré de ce halo de mystère et de pouvoir.» Aujourd’hui, c’est tout cela qui est percé. Alors, c’est quoi ce Haut conseil des… Comment ça s’appelle d’ailleurs ? Je vous assure, je ne blague pas, je ne connais pas la suite…

Haut conseil des collectivités territoriales…


Dans quel cadre institutionnel ça rentre ? Ce n’est pas une chambre. 



C’est quand même une chambre consultative, dit-on…


Un instrument consultatif pour le président de la République. C’est quoi ses limites de compétence avec l’autre machin de dialogue des territoires. 



Vous parlez de la Commission nationale du dialogue des territoires dirigée par Djibo Kâ…


Il faut un tribunal de conflits parce que va arriver un moment où il va y avoir immanquablement des conflits de compétence. Ensuite, c’est quoi cette façon de prendre 80 qui sont élus, 70 qui sont nommés ? On avait pensé que tout cela était oublié. C’est une institution avec des gens élus, mais qui ne votent pas, qui ne délibèrent pas avec un président lui-même élu à la base, mais nommé par décret et révocable ad nutum. Alors, ce Haut conseil me fait penser à l’histoire institutionnelle de la France dans les années 1800, avec la Chambre introuvable. Tous les juristes l’ont appris. La Chambre introuvable, c’est quand Louis XVIII, rappelé au pouvoir, a eu des gens élus qui lui sont tellement fidèles qu’il les a appelés : «vous êtes plus royalistes que le roi». Tellement qu’ils étaient pressés de satisfaire tous les desiderata de Louis XVIII. 



Sur la parité, la loi a été une nouvelle fois piétinée avec le Hcct…


Oui ! J’allais dire comme ça, sur un coup de tête, que ce n’est pas la première fois. Même sur le bureau de l’Assemblée nationale, non seulement la parité a été violée, mais quand la Cour suprême a corrigé, l’Assemblée ne l’a pas suivie. Aujourd’hui, il y a des collectivités territoriales qui sont gérées sans la parité. 
Le Président avait les moyens de compenser par les nominations... Oui, vous vous souvenez que c’est le Président qui avait fait des remontrances à la Cour suprême en demandant au ministre de l’Education nationale de ne pas se soumettre à la décision de justice non. 




Pour revenir au Parti so­cialiste, qu’allez-vous faire aux prochaines échéances ? continuer à vous battre à l’intérieur ou à l’exté­rieur du parti ?


On va faire les deux, et à l’intérieur du Parti socialiste et en dehors.  Parce que finalement, de quoi est-ce qu’il est question ? Il est question de collecter les suffrages des Sénégalais, puisque vous parlez d’élection, qui ne sont pas seulement à l’intérieur du Parti socialiste. En tout cas aujourd’hui, nous sommes engagés totalement dans ce combat-là, nous avons la claire conscience que ce n’est pas un combat facile, mais croyez-moi, nous sommes déterminés non seulement à l’engager, mais à aller jusqu’au bout, aussi bien à l’intérieur du Parti socialiste qu’auprès de l’opinion des Sénégalais. 



Votre parti a déjà décidé d’aller avec Benno bokk yaakaar aux Législatives…


Ah, on verra ce qu’il adviendra de cette décision parce que c’est cette décision qui est contestée et attaquée en justice. Qu’est-ce qu’elle deviendra d’ici les Législatives ? 



Quelle est votre opinion sur la refonte du fichier électoral et les inscriptions pour l’obtention de la carte biométrique de la Cedeao ?


J’avais dit au ministre de l’Intérieur à l’occasion de son passage devant l’Assemblée nationale que cette question me troublait un peu. D’abord, parce que je ne vois pas la pertinence de refaire le fichier partiellement. On aurait peut-être pu le faire avant. Et si vous lisez l’exposé des motifs de cette loi, vous allez tomber à la renverse. Le ministre de l’Intérieur dit : «On va faire une refonte partielle du fichier pour combattre l’abstention.» C’est ce qui est marqué. C’est hallucinant ! Est-ce qu’on combat l’abstention en faisant une refonte du fichier ? Le vote n’est pas un devoir au Sénégal, mais un droit. Mais je pense que le référendum a tellement traumatisé le pouvoir qu’il a les yeux rivés sur ce fort taux d’abstention. Et d’ailleurs, si les gens vont s’inscrire et qu’ils confirment qu’ils sont électeurs et que, pour autant, le jour-j ils refusent d’aller voter, qui va les obliger à le faire ? Personne. D’où l’inopportunité et la non pertinence de faire cette refonte. Et c’est pour cela qu’une partie de l’opposition pense qu’il y a un jeu caché dans cette refonte. 



Avec cette histoire de fichier, est-ce que vous ne craignez pas un croc-en-jambe du pouvoir de façon qu’on se retrouve à reporter les élections ?


Non ! On a reporté la Présidentielle, on va encore reporter les Législatives ? Ce serait d’un ridicule à mettre le Sénégal au pilori. Non, le pouvoir ne peut s’amuser avec ça et je ne veux pas le croire un seul instant.



Lors du meeting du Ps, Bamba Fall a dit qu’il souhaite que Khalifa Sall soit le président de la République et vous, présidente de l’Assemblée nationale…


Un ticket non ? Que voulez-vous ? Ce n’est pas moi qui l’ai dit. Ce n’est pas non plus Khalifa Sall qui l’a dit. Mais parce que ces gens de Dakar étaient en train de l’interpeller. Moi si Podor m’interpelle, je réponds à Podor. Donc, ce sont des propos d’un militant au cours d’un meeting. Pourquoi moi, responsable de Saint-Louis et de Podor, je viens tomber dans un meeting de Dakar ? Vous savez, Bamba Fall est un garçon intelligent. Depuis 2007, il avait décidé que je serai la marraine de sa coordination. La marraine, ça n’existe nulle part dans une instance du parti. Et je suis partie à ce meeting de 2007, mais comme à l’époque on filait le parfait amour partout, personne ne s’en était rendu compte. Il a voulu refaire un autre meeting de sa coordination en 2016, il est venu m’inviter et je lui ai dit, comme vous me posez la question : «A quel titre ?» Il m’a dit : «Rappelez-vous, maître, vous êtes la marraine de ma coordination.» Et il voulait vraiment que je vienne à ce meeting ès qualités. J’ai accepté parce que c’est de la courtoisie entre camarades. Quand même, vous ne pensez pas que dans le Parti socialiste, il a 10 000 femmes qui auraient pu servir de marraine ! Voilà qui explique ma présence. Maintenant, dans ses volées, il a dit ce qu’il pensait d’un schéma idéal, mais ça n’engage que lui.



Serez-vous candidate à la Présidentielle ?


(Long silence) Vous reposerez la question vers 2019. (Elle s’éclate)



Un temps, on vous a surnommée Ségolène Royal. Aujourd’hui, c’est Hillary Clinton qui est candidate. Allez-vous faire comme elle ?


(Rires) Je voudrais avant tout saluer le courage historique de Hillary Clinton. Pour ma part, je suis Aïssata Tall Sall, femme politique et Sénégalaise qui porte une ambition, la plus grande et la plus honorable pour son pays. 2019 est encore loin, mais tout est ouvert et tout est possible. J’ai toujours laissé mon destin à Allah. 



Le Secrétariat exécutif national, créé après le congrès, prend des décisions du parti. Cette instance est-elle en conformité avec les textes ?


Je vois que vous connaissez bien les textes du parti parce que pour poser cette question-là, il faut avoir lu les statuts et le règlement intérieur du parti. Quand on veut changer le profil de compétence de l’instance, seul le congrès doit en décider. Donc, si le Secrétariat exécutif national prend des décisions qui ne sont pas de sa compétence, ce sont des décisions annulables en justice. C’est dommage d’en arriver là, mais le parti n’est la propriété de personne. 


Maître, qu’est-ce qui vous pousse à continuer à faire la politique ?


Pour répondre à cette question, il faut d’abord demander ce qui m’a amenée en politique.



C’est Tanor.


(Silence, puis rires) Non. Même s’il m’a amenée, il n’a pas pu faire que je reste. Si je reste, c’est de mon fait personnel. Encore que j’ai choisi de faire la politique parce que j’ai une idée claire. Mais j’ai considéré que dans la vie, il y a deux options : la première, c’est de se lever le matin et de se dire qu’on peut être utile à quelqu’un ou à quelque chose. Que dans la vie, il ne suffit pas de manger, de boire, de s’amuser et de pleurer. L’animal mange, boit, s’amuse et pleure. Il faut savoir distinguer les choses et c’est ce qu’on appelle le libre arbitre. Et quand on l’a, on doit avoir la volonté et la générosité de vouloir transformer le monde. Vous voyez que c’est un gros mot, mais le monde s’est toujours transformé parce que quelque part, un jour, il y a eu un seul homme qui s’est levé et qui a aperçu une petite lumière au fond et qui s’est dit : «Ça, c’est peut-être la direction du monde et cela a changé le monde.» Mao Tse Toung l’a fait, d’autres l’ont fait. Pourquoi les Sénégalais ne le feront pas ? Voilà pourquoi je fais la politique.



Tanor, Niasse, Djibo aux côtés de Macky Sall. Qu’est-ce que cela vous inspire ?


Super ! Félicitation à Macky Sall qui a réussi la prouesse de réunifier la famille socialiste autour de lui. Mais c’est une certaine famille socialiste. (Rires) 
 
Source Lequotidien.sn