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Partenariat Sénégal-Eiffage concernant l’autoroute Dakar-Aibd : Un contrat à multiple déséquilibres !


Rédigé par leral.net le Mardi 8 Décembre 2020 à 08:53 | | 0 commentaire(s)|

Le Collectif citoyen des usagers de l’autoroute à péage (Ccuap) Dakar-Aibd a fait mener une étude d’évaluation socio-économique et environnementale de l’exploitation de ladite autoroute. L’étude qui a été confiée au Think tank Leadership, éthique, gouvernance et stratégies pour l’Afrique (Legs-Africa) qui a bénéficié d’un accompagnement technique et financier de la Fondation Heinrich Böll, fait ressortir une pléthore de déséquilibres, notamment en ce qui concerne le tronçon Malick Sy-Patte d’Oie, les tarifs exorbitants du péage et le partage des revenus qui bénéficie principalement au Titulaire.
Partenariat Sénégal-Eiffage concernant l’autoroute Dakar-Aibd : Un contrat à multiple déséquilibres !
Des déséquilibres à foison ! C’est qui ressort de l’étude socio-économique et environnementale de l’exploitation de l’autoroute Dakar-Aibd menée par Legs-Africa sur demande du Collectif citoyen des usagers de l’autoroute à péage. En effet, l’étude révèle qu’« il importe de préciser que pour le tronçon Malick Sy-Patte d’Oie l’essentiel de l ́ouvrage est financé sur fonds publics. Sur ce tronçon, le financement de Eiffage, le Titulaire du contrat, est limité seulement aux équipements nécessaires à l’exploitation ».

Pour le tronçon Pikine-Diamniadio, il s’agissait, selon le document, pour Eiffage de concevoir, financer, construire, exploiter et entretenir. A l’en croire, l’étendue des obligations de Eiffage sur ce tronçon est plus large que sur le tronçon Malick Sy-Patte d ́Oie. «Ce tronçon entièrement financé sur ressources publiques est pourtant intégré dans la phase d ́exploitation et de gestion dans le cadre du contrat Eiffage/Sénégal.»

Ainsi, confie l’étude, les recettes d’exploitation de l’autoroute Patte d’Oie-Pikine sont affectées aux coûts d’investissement initiaux. Or, à l’en croire, il est important de préciser que cette partie de l’autoroute est construite sur des fonds publics, le titulaire, Eiffage, n ́ayant supporté que les frais relatifs aux installations pour l ́exploitation. Par conséquent « cette approche qui combine investissement public et exploitation privée est problématique ». Car, « à défaut de rendre gratuit ce tronçon, l’investissement public consenti dans cette phase devrait avoir une incidence sur les prix du péage au bénéfice des usagers ».

Déséquilibres contractuels

Sur le plan financier, le document souligne que le contrat révèle un déséquilibre considérable au bénéfice du Titulaire de la concession, Secaa Sa (dont le capital est détenu par Eiffage Sa). En effet, « ce déséquilibre se manifeste, entre autres, sur le montage financier (l’apport de l’autorité concédante étant de loin beaucoup plus consistant que l’apport du Titulaire), les tarifs exorbitants du péage et le partage des revenus qui bénéficie principalement au Titulaire ». Pour les auteurs de l’étude, ce déséquilibre important entre la subvention étatique et les fonds propres engagés par Eiffage remet profondément en cause l ́équilibre financier recherché dans le cadre des contrats de Partenariat public-privé (Ppp).
En vérité, l’étude montre que sur un coût d ́investissement de 138 milliards, la subvention de l’Etat s’élève à 77,6 milliards et l’apport de Eiffage en financement privé n’est que de 61 milliards de F Cfa.

Mieux, « il importe de préciser que Eiffage n ́a investi que 20,8 milliards de F Cfa en fonds propres, le reste de sa contribution financière étant financé par les partenaires privés notamment les banques ». En plus de ce reversement, l ́Etat apporte un concours financier sous forme de subvention d ́investissement (77 673 025 000 F Cfa) qui est sujet à des pénalités en cas de retard dans la mise à disposition des fonds (10% et 15%). « Le niveau élevé de la subvention de l’Etat combiné à d ́autres aspects du contrat de concession comme le niveau élevé des tarifs, montre clairement que le concessionnaire a été avantagé par rapport à l’Etat », estime le texte. Qui soutient qu’avec le faible niveau d’apport en fonds propres du titulaire, il aurait été possible de financer l’ouvrage entièrement sur fonds publics et appliquer des tarifs de péage acceptables.

L’Etat ne perçoit de retombées financières qu’à partir de la 15e année de mise en service de l’autoroute

Les recettes résultantes de l ́exploitation de l ́autoroute à péage font l’objet d’un partage entre l’autorité concédante (L’Etat du Sénégal) et le Titulaire (Eiffage). Les modalités de partage sont définies à l ́article 26 du contrat CET (construire, exploiter, transférer). Mais selon les auteurs de l’étude, il ressort de l’analyse de cette disposition un déséquilibre profond des modalités de partage. Car, « en résumé, l’autorité concédante (l’Etat du Sénégal) ne commence à percevoir des retombées financières qu’à partir de la quinzième année de mise en service de l ́ouvrage.

« La structuration de la société d ́exécution et de gestion avec l ́exclusion du concédant du capital interpelle », note le rapport. En effet, explique-t-il, la question se pose de savoir pourquoi l’Etat du Sénégal n’a pas négocié une entrée dans le capital de la Senac SA au moment de la négociation du contrat de concession. Parce que « cette entrée dans le capital permettrait à l’Etat du Sénégal non seulement d ́avoir plus de contrôle sur le Titulaire, mais également de bénéficier des retombées financières de l’exploitation de l’infrastructure dès sa mise en service ».

L’Etat du Sénégal supporte tous les risques liés à la résiliation du contrat

L’étude dévoile un autre déséquilibre. Car, à l’en croire, « tous les risques financiers liés à la résiliation du contrat sont supportés par l’autorité concédante (L’Etat du Sénégal) ». « Le Titulaire (Eiffage) ne supporte aucun risque financier lié à la résiliation du contrat, même en cas de manquement à ses obligations contractuelles ». En effet, appuie les auteurs, même si le contrat est résilié pour faute du Titulaire, ce dernier a droit à une indemnité substantielle. Par conséquent, ils soutiennent  que les conditions de la résiliation reflètent un déséquilibre total dans le partage des risques entre l’autorité concédante et le titulaire.
Bassirou MBAYE



Source : https://www.lejecos.com/Partenariat-Senegal-Eiffag...

La rédaction