Leral.net - S'informer en temps réel

Pôle Urbain de Diamniadio : Entre Lueurs et Leurres - Par Abdou Aziz Wane

Rédigé par leral.net le Mercredi 28 Mai 2014 à 10:54 | | 0 commentaire(s)|

Pour trouver une solution à l’hypertrophie de Dakar et de sa banlieue, le Président Macky Sall a eu l’ingénieuse vision de penser à développer des pôles urbains qu’il définit comme des villes caractérisées par l’efficacité économique, la mixité sociale, le respect de l’environnement et un cadre de vie attrayant.
Conformément à son programme électoral (Yonou Yokute), le Président de la République, veut développer autour de ces pôles, des activités créatrices d’emplois et de richesses, faire face au déficit en logements et faire de Diamniadio un creuset d’excellence pour l’enseignement supérieur et la recherche.


Pôle Urbain de Diamniadio : Entre Lueurs et Leurres - Par Abdou Aziz Wane
Lors d’une visite officielle au Maroc, il signe le 26 Juillet 2013 avec le groupe Alliances, un contrat qui porte sur la réalisation d’un pole urbain de 375 hectares à Diamniadio, pour 4 milliards de dirhams. Le Président du groupe Mohamed Alami Lazrak avait même insisté sur le timing en promettant de démarrer en Mars 2014. Nous rappelons que la Délégation Générale des Pôles Urbains n’était pas encore créée. Monsieur Seydou Sy Sall a été nommé lors du Conseil des Ministres du 26 Septembre 2013, et la nouvelle entité a été rattachée à la Présidence. Le 26 Janvier 2014, le Groupe Alliances, a eu l’honneur de recevoir Le Président Macky Sall en visite privée, au niveau de son programme immobilier de Chwitter. C’est un privilège que les sociétés nationales de promotion de l’habitat (SICAP et SNHLM) n’ont pas eu depuis l’accession du Président Sall à la magistrature suprême.
Au delà du symbolisme, la relégation de ces instruments étatiques au second plan, est inquiétante et soulève des interrogations. La SICAP et la SNHLM ont construit le Dakar Moderne. Rien de nouveau ou de neuf n’est proposé par les marocains et Teylium Group présentés comme des références et pompeusement appelés « développeurs »
Une société comme la SICAP SA, a fait de la mixité depuis sa création : de la chambre au Centre Commercial, en passant par les studios, les terrains viabilisés, les villas économiques, les villas grand standing (comme la résidence privée du Président à Fenêtre Mermoz), les immeubles du Point E (CREI, GIABA...), la prisée Cité Keur Gorgui avec ses immeubles abritant des ministères, le premier Centre Commercial moderne de Dakar avec ses escalators…
Le commun des sénégalais ne peut pas comprendre pourquoi le Président de la République n’a pas profité de ses Grands Travaux pour réhabiliter ces instruments qui sont sous son autorité ?
Saviez-vous que depuis 2000, la SICAP n’a été affectataire d’aucun lopin de terre par l’Etat du Sénégal ?
Saviez vous que la SICAP finance ses lotissements en s’appuyant sur le secteur bancaire classique avec des taux d’intérêts exorbitants ?
Saviez vous que cette société ne bénéficie d’aucune exonération fiscale ?
Voilà une société dont plus 90% des actions sont détenues par l’Etat, avec un Conseil d’Administration composé de représentants de l’Etat et de ses démembrements. La conclusion qu’il faut en tirer, c’est que le Président de la République et son gouvernement sont les dépositaires des orientations de cette entreprise.
Voilà une société qui a un statut hybride : une société anonyme à participation publique largement majoritaire qui évolue dans un secteur concurrentiel et qui est également astreinte aux obligations d’un service public. La SICAP est un fardeau de charges et d’obligations, de compétences sans recettes, de devoirs sans droit.
Depuis l’avènement du Président Sall, les décisions prises en Conseil des ministres en matière d’habitat, n’ont pas été diligentées
Nous rappelons que le 10 Octobre 2013, le Chef de l’Etat avait demandé au gouvernement de « s’appuyer sur les instruments et institutions déjà existants pour relancer la politique de l’habitat, en mettant en œuvre, un plan d’intensification des réalisations de la SICAP et de la SNHLM, en mobilisant davantage les moyens de la Caisse de Dépôts et de Consignation (CDC), ceux du secteur bancaire national, la Banque de l’Habitat du Sénégal (BHS) notamment. Ces initiatives sont destinées à promouvoir un système et des mécanismes de financement efficaces et durables du logement social au Sénégal ».
Nous rappelons que le 15 Janvier 2014 en Conseil des Ministres, le Chef de l’Etat avait demandé à son Gouvernement de « conclure avant fin Février 2014, des contrats d’objectifs et de moyens avec la SICAP SA et la SNHLM ». Il avait aussi invité le gouvernement à préparer la tenue, courant Mars 2014, d’un Conseil Présidentiel sur le financement du logement. Il avait également donné des instructions pour « la préparation avant fin Mars 2014, d’un projet de loi d’orientation pour la promotion de l’habitat social ».
C’est déplorable de constater que dans ce domaine, le gouvernement du Sénégal « n’accélère pas la cadence ».
Revenant au Pole Urbain de Diamniadio, l’Etat du Sénégal compte sur des promoteurs immobiliers appelés « développeurs » qui sont majoritairement des étrangers (marocains, turcs, indiens, français) et qui sont affectataires de centaines d’hectares sans bourse délier. Dans un souci de transparence, les cahiers de charges doivent être rendus publics par la DGPU.
Dans son allocution lors du lancement des travaux, le Président de la République dit que : « grâce à un partenariat public privé intelligent et novateur, les logements de Diamniadio pourront être acquis moyennant une mensualité déterminée, sur une durée de 15 à 20 ans voire 25 ans, selon le cas. De plus, aucun apport initial ne sera exigé pour le logement social ».
Ce n’est pas nouveau ! La SICAP et l’OHLM l’ont fait pendant des décennies.
Le logement social a ses exigences. Pendant l’âge d’or du logement social au Sénégal, la Caisse Française de Coopération Economique (actuelle Caisse Française de Développement) octroyait à la SICAP et à l’OHLM, des financements à des conditions douces :
- Pour la location vente, des prêts avec des taux d’intérêt de 3,5% à 5% remboursable sur 15 ans avec un différé de 5 ans
- Pour la location simple, des prêts avec des taux d’intérêt de 2,5% à 5% remboursables sur 20 ans avec 5 ans de différé.
Par le biais d’un impôt (impôt sur les traitements et salaires), l’Etat finançait sous forme de subvention, les voieries et réseaux divers (VRD) des différents programmes. Ces VRD représentent 25 à 30 % du cout du logement. En plus, ces sociétés étaient exonérées de l’impôt sur les fonds empruntés aux bailleurs de fonds destinés au logement.
La Caisse de Dépôts et de Consignation créée en 2006, pour remplir la mission de financer le logement social, de financer les PME, la politique de la ville, les travaux d’équipements des collectivités locales, s’illustre malheureusement dans les acquisitions foncières, le mécénat et le sponsoring.
La question du logement dit social est une question de volonté et de décisions politiques. Quand l’Etat du Sénégal l’a voulu, des milliers de logements sont sortis de terre à Tivaouane Peul et Niague en moins de six mois. S’il responsabilise ses instruments que sont la SICAP SA, la SNHLM et les privés nationaux avec l’accompagnement du secteur bancaire et de la CDC, les défis seront relevés. Nous rappelons que les Marocains de Diamniadio sont soutenus par le groupe Attijarawafa Bank.
Dans ces moments de crise mondialisée, le patriotisme économique doit être mis en bandoulière pour éviter que nos entreprises sombrent.
C’est le lieu d’interpeller nos amis nationalistes de la gauche sénégalaise qui ont aujourd’hui la lourde tache d’impulser le Ministère de tutelle et de bâtir les fondamentaux au niveau de la Délégation Générale des Pôles Urbains.
Revenant sur les logements dits sociaux exposés par certains « développeurs », nous doutons fort qu’ils soient en adéquation avec l’article 2 du décret n°2013-1381 du 30 Octobre 2013 qui définit le logement social au Sénégal. Il stipule que : «peut être considéré comme un logement social tout logement présentant les caractéristiques suivants :
- Un terrain de superficie comprise entre 150 et 200 m²
- Trois pièces principales au plus
- Un WC et une douche séparés ou réunis dans une même pièce, avec carrelage du sol au moins
- Une surface libre de planchers inférieure ou égale à 60 m²
- Un point lumineux dans chaque pièce
- Un cout plafond de vingt (20) millions de Francs CFA.
Pour conclure, nous rappelons que l’échec et la déliquescence de la SICAP ou de la SNHLM seront ceux de l’Etat central qui n’a pas su à un moment donné de l’histoire redresser la barre et assumer ses responsabilités.
Dans son discours de Diamniadio, le Président de la République nous laisse quand meme une lueur d’espoir ; il dit que : « le gouvernement est prêt à donner les possibilités aux promoteurs immobiliers qui ont demandé à accéder à la terre, en vu de la construction de logements bon marché pour les populations ».
LES PIONNIERS NE SAURAIENT ETRE EN RESTE !!!
VIVE LA REPUBLIQUE SOBRE ET VERTUEUSE

Abdoul Aziz WANE
Secrétaire Général de la Section Syndicale SICAP SA
azizwane@sicap.sn